Accord UGTT-Gouvernement : Gagnant, gagnant

Accord UGTT-Gouvernement :  Gagnant, gagnant

 

L’accord entre le gouvernement et l’UGTT est enfin signé et la grève générale de la fonction publique prévue pour jeudi est annulée.

C’est sans nul doute une victoire de la Tunisie post-révolution. Le dialogue qui a vaincu toutes les crises du pays depuis six ans est une fois de plus le moyen qui a permis de dépasser une crise qui paraissait insoluble. Elle était d’autant plus préjudiciable au pays qu’elle opposait le gouvernement d’union nationale dont l’UGTT est partie prenante à celle-ci qui était la promotrice de l’Accord de Carthage qui formait l’acte de naissance de ce gouvernement.

L’accord signé à la Kasbah par cinq ministres et cinq secrétaire généraux adjoints de la centrale syndicale(le chiffre cinq n’est-il pas porte-bonheur!) est certainement un succès pour le gouvernement. Certes, c’est lui qui a fait le plus de concessions par rapport au projet initial qui consistait à reporter à 2019 les majorations prévues pour 2017 par l’accord de septembre 2015, mais il a fini par faire entendre raison à la centrale syndicale récalcitrante à la remise en question dudit accord qui ne date pourtant que d’une année.

Quand on se rappelle l’opposition farouche de la direction de l’UGTT au report considéré comme une violation pure et simple de la politique de négociations sociales entre les partenaires sociaux on prend conscience de l’ampleur de l’effort fait par la centrale syndicale pour parvenir à la paix sociale dont le pays a besoin.

L’UGTT peut se targuer d’avoir placé l’intérêt national au dessus des intérêts catégoriels. Au lendemain de la commémoration du 64ème anniversaire de l’assassinat du leader national et dirigeant syndical Farhat Hached, la centrale ouvrière revient à ses fondamentaux et au premier d’entre eux, la patrie avant tout. En acceptant cette solution de compromis, elle fait un grand sacrifice en faveur de la Tunisie. Elle montre ainsi qu’elle demeure l’organisation fédératrice en laquelle les Tunisiens peuvent placer leur confiance. En transcendant son rôle purement syndical, elle inscrit son action dans l’histoire qui est la sienne depuis quelques sept décennies. Cela donne plus de lustre au Prix Nobel de la Paix qu’elle a obtenue il y a deux ans pour avoir été la promotrice du « Dialogue national » qui a permis de régler une crise autrement plus risquée.

Sans nul doute, c’est le président de la République qui doit se sentir le plus satisfait de l’Accord obtenu. En faisant « Monsieur Bons Offices » entre le Chef du gouvernement et le Secrétaire général de l’UGTT au titre de son magistère, il a prouvé sa capacité à être un acteur majeur sur la scène nationale. Lui qui connait si bien l’histoire de la relation tumultueuse entre le pouvoir et la centrale syndicale dans l’histoire récente de la Tunisie ne pouvait laisser pourrir un conflit qui pourrait se transformer en affrontement. On ne peut que lui rendre grâce d’avoir fait éviter au pays un hiver chaud porteur de tous les risques pour la paix civile. Tous ceux qui se sont réjouis d’une conflagration sociale à la faveur d’un conflit entre le pouvoir et l’UGTT en sont pour leurs frais.

L’accord sauve le gouvernement d’union nationale. Car celui-ci n’a plus de raison d’être en cas de conflit majeur avec une partie prenante principale à l’Accord ayant été à la base de la constitution de ce gouvernement. On se rappelle que Béji Caïd Essebsi a déclaré lorsqu’il a fait part de son initiative de gouvernement d’union nationale en juin dernier que celui-ci n’a pas de sens sans la participation de la centrale syndicale. Sans l’Accord de ce jour, c’est l’échec indubitable du gouvernement.

Cette victoire est à mettre à l’actif de la Tunisie nouvelle capable ainsi de résoudre ses problèmes aussi ardus soient-ils par le dialogue et la négociation. Cet esprit gagnant-gagnant ne peut qu’impacter positivement le cheminement de la Tunisie post-révolution. Il faut maintenant espérer que les instruments du dialogue social soient finalisés par la mise en place du Conseil national du dialogue social de sorte que des conflits analogues à celui qui est réglé aujourd’hui ne surviennent plus.

Raouf Ben Rejeb

Votre commentaire