Bouchamaoui au MEDEF: ""Il faut des réformes douloureuses pour remettre la Tunisie en selle"

Bouchamaoui au MEDEF: ""Il faut des réformes douloureuses pour remettre la Tunisie en selle"
 
 
La 18ème édition de l’Université d’été qu'organise la centrale patronale française ( MEDEF), depuis hier sur le campus d’HEC à Jouy-en-Josas, a vu la participation de la Présidente de l’UTICA Wided Bouchamaoui (membre du Quartet prix Nobel de la paix pour l’année 2015).
 
Wided Bouchamaoui était l’invitée d’honneur de la troisième demi-journée ce mercredi 31 août 2016. Cette demi-journée, placée sous le thème  « Y croire pourquoi ? », se concentre sur la mondialisation des entreprises à travers l’innovation. 
 
Dans un long et brillant discours, Bouchamaoui, après avoir rendu un hommage à toutes les équipes du Medef, a rappelé l'intérêt de cet événement qui se positionne chaque année comme une plate forme de débats d’idées , un vecteur de propositions et un vivier de pistes d’actions pour les entreprises d’abord , mais aussi et surtout pour leur porte voix auprès des pouvoirs publics et des instances internationales.
 
L'UTICA, le dialogue national, la révolution du jasmin, la transition politique, les élections en Tunisie...sont autant de sujets évoqués par Bouchamaoui dans son cours. 
 
Bouchamaoui déclare: "La transition politique connait, en dépit des espoirs des élections de la fin 2011, un coup d’arrêt en raison de clivages et de tiraillements politiques, de pressions sociales de toutes parts et d’erreurs manifestes de gouvernance. Un paysage, pour le moins tendu, et envenimé par deux assassinats politiques, un faux débat public sur le modèle social et une régression de l’atmosphère sécuritaire.
 
La menace de dérive, de dérapage et pour les plus pessimistes de guerre civile était latente dans un pays qui, quelques mois plus tôt, suscitait par l’image de sa révolution pacifique, l’admiration et la sympathie du monde entier.
 
Face à cette impasse, il fallait réagir dans une ultime tentative, pour rétablir la situation et offrir une perspective à une sortie de la crise politique qui s’installe. C’est ainsi que sur une initiative spontanée de quatre organisations de la société civile, fortes de leur histoire, et soutenues par leur crédit auprès de l’opinion publique, naissait le processus du Dialogue National, qui aura permis à la Tunisie d’éviter le pire.
 
Cette expérience inédite menée entre autres par une organisation patronale et une organisation syndicale autour d’un même projet a connu le succès que vous connaissez, par une consécration du Prix Nobel de la Paix en 2015.
 
J’ai fait le parallèle avec l’Université d’été du Medef , juste pour dire , que dans un monde ou les crises politiques , économiques et sociales fusent de partout , les organisations d’employeurs que nous sommes , ont désormais une responsabilité historique pour intervenir là où on les attend le moins .
 
Aux politiques de saisir cette fabuleuse capacité d’indépendance, de souplesse, de créativité et de génie de la société civile pour sonder et explorer dans la cohérence les pistes de résolution de conflits, de sortie de crises et de développement durable."
 
Et la patronne de l'UTICA n'a pas manqué d'évoquer le nouveau gouvernement qui vient de bénéficier du vote de confiance à l'ARP: "En Tunisie, où la transition politique et démocratique, a certes connu des progrès notables dans un environnement régional en effervescence, vient de voir se former un gouvernement d’union nationale qui a obtenu le vote de confiance de l’Assemblée des Représentants du Peuple il y a juste quelques jours.
 
Le gouvernement de coalition issu des élections législatives de 2014, n’a pas pu hélas redresser la situation économique, malgré une amélioration sensible de la situation sécuritaire et d’énormes progrès dans la lutte contre le terrorisme.
 
La classe politique, toutes sensibilités confondues, semble enfin accorder à la question économique, la priorité qu’elle mérite, dans un pays dont la croissance est tirée essentiellement par les exportations et les IDE."
 
 
Concernant la recherche de solution à la situation de crise, Bouchamaoui pense que les solutions ne relèvent pas du miracle mais dépendent d'une volonté politique : "Pour un diagnostic partagé par l’ensemble des acteurs politiques et économiques, les solutions ne relèvent pourtant pas du miracle .Elles sont toutes à la portée si une volonté politique réelle, une vision consensuelle clairement définie et un projet fédérateur sont réunis."
 
Pour remettre en selle l’image de la Tunisie comme un pays en mouvement de transition démocratique mais aussi comme site de développement économique, Bouchamaoui pense que cela passe aussi par le respect de l’application de la loi, la valorisation du travail et le consentement au sacrifice.
 
"Des réformes, si douloureuses soient–elles, sont inévitables dans cette perspective de réinsertion de l’économie tunisienne dans son environnement régional naturel et de repositionnement international. L’investissement, maitre mot, dans l’avenir immédiat, ne saura s’accomplir sans une stabilité retrouvée, une sécurité renforcée et une visibilité durablement installée.", lance la patronne de l'UTICA.
 
Bien évidemment, Bouchamaoui ne pouvait ne pas évoquer ce phénomène "étrange, barbare, et inhumain" qu'est le terrorisme. Et Bouchamaoui de rappeler: "Les souvenirs du Bardo , de Sousse , de Paris , de Bruxelles , de Nice et de bien d’autres lieux aux quatre coins de la planète sont là , présents en permanence, pour nous rappeler que ce fléau désormais universel, ne peut être éradiqué que dans une démarche de solidarité et de Co-développement.
 
Les solutions sécuritaires, quoi qu’indispensables, n’arrivent toujours pas, à en finir avec cette menace persistante de la culture de la sauvagerie et de la mort avec parfois la genèse d’attitudes de rejet de l’autre, d’isolement et d’enfermement sur soi.
 
C’est pourquoi faudrait-il aller plus loin et plus en profondeur dans le traitement de ce phénomène dévastateur en s’attaquant à ses origines et à ses racines. Rien au monde, rien dans les enseignements de toutes les religions et rien dans les valeurs universelles de l’humanité n’excuserait d’ôter la vie à des êtres
innocents, sous n’importe quel prétexte !
 
L’islam, ma religion, la religion sur la quelle s’est adossée toute ma culture et celle de l’immense majorité de mes compatriotes bannit, et dans des termes, on ne peut plus explicites, ces agissements ! Condamner ces actes d’où qu’ils viennent c’est bien .S’y opposer de la manière la plus énergique qui soit c’est encore mieux. Mais encore faut-il se les expliquer, les diagnostiquer pour apporter l’antidote qu’il faut !"
 
 
 

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