"Il y a urgence à se soucier de ce petit pays du Maghreb"

"Il y a urgence à se soucier de ce petit pays du Maghreb"
 
 
L'accord historique sur l'Iran – et il l'est – et le compromis trouvé avec la Grèce – l'avenir dira si celui-ci était vraiment réaliste – ne doivent pas faire oublier la Tunisie. Il y a urgence à se soucier de ce petit pays du Maghreb de 11 millions d'habitants, à quelques heures de bateau de l'Italie.
 
La Tunisie est, en effet, la porte d'entrée du groupe État islamique (EI) en Afrique du Nord. Que ce pays flanche et ses deux voisins occidentaux, l'Algérie et le Maroc, n'en sortiront pas indemnes. L'Europe sera, elle aussi, secouée par ricochet (menaces djihadistes et arrivée de nouveaux réfugiés).
 
Rien de surprenant, donc, à ce que le 10 juillet les États-Unis aient accordé à la Tunisie le statut d'"allié majeur non membre de l'Otan", qu'avait promis Barack Obama au président Béji Caïd Essebsi lorsque ce dernier lui avait rendu visite à Washington, en mai. Il doit permettre à son pays (16e État doté de ce statut, aux côtés du Maroc et de l'Égypte) d'accroître sa coopération militaire avec les États-Unis et d'acquérir certains armements. Tunis devrait ainsi recevoir 12 hélicoptères UH-60M, la dernière version du Black Hawk, pour remplacer ses vieux appareils.
Édification d'un mur sur la frontière tuniso-libyenne
 
Washington veut faire d'une pierre deux coups : aider la Tunisie à lutter contre le terrorisme et se positionner à la porte de la Libye, ce "trou noir" qui inquiète les Occidentaux. Trois des responsables des tueries du musée du Bardo, à Tunis, le 18 mars, et à Port El-Kantaoui, le 26 juin (60 morts au total), sont passés par un camp d'entraînement pour Tunisiens à Sabratha, à l'ouest de la Libye. Les deux attentats ont été revendiqués par l'organisation État islamique.
 
Pour empêcher les infiltrations venues de Libye et le départ de jeunes Tunisiens vers les camps d'entraînement libyens, Tunis a commencé à édifier un mur de terre doublé d'un fossé entre les postes de Ras Jedir et la bourgade de Dhehiba, sur la frontière tuniso-libyenne. Il devrait être terminé à la fin de l'année sur 168 km d'une frontière qui en compte 520. La Libye proteste vigoureusement contre cette mesure "unilatérale" à l'efficacité probablement relative.
 
Washington voudrait aussi disposer de facilités en Tunisie pour installer des drones lui permettant de surveiller les allées et venues des djihadistes, croit savoir The Wall Street Journal.
 
En Tunisie, les djihadistes sont des nationaux. C'est depuis les années 1990 et la répression de Ben Ali contre les "barbus" que de jeunes opposants se sont tournés vers le salafisme. Des Tunisiens figurent parmi les auteurs de tous les grands attentats commis à travers le monde depuis une quinzaine d'années. Ce sont, par exemple, de faux journalistes tunisiens qui ont tué le commandant Massoud en Afghanistan.
 
Un groupe d'experts de l'ONU estime actuellement à 5 000 le nombre de Tunisiens engagés dans le djihad. Ils seraient 4 000 en Syrie, plus de 1 000 en Libye, 200 en Irak. Soixante sont engagés au Mali et cinquante au Yémen aux côtés d'Al-Qaïda. Globalement, ils forment la deuxième communauté dans le djihad au Moyen-Orient après les Saoudiens. Le Premier ministre Habib Essid a d'ailleurs annoncé vendredi que 15 000 jeunes avaient été empêchés de quitter le pays.(Le point.fr)