Ils s’appellent Kermiche et Petitjean, les tueurs du prêtre de Rouvray : La guerre de religions n’aura pas lieu

Ils s’appellent Kermiche et Petitjean, les tueurs du prêtre  de Rouvray :  La guerre de religions n’aura pas lieu

Le premier s’appelle Adel Kermiche, un français issu par ses parents ou ses grands parents de l’immigration maghrébine. Le second porte le nom d’Abdelmalek Nabil Petitjean, un français de souche né et élevé dans les Vosges.

Tous les deux ont dix-neuf ans. Ceux-là sont les deux terroristes qui ont commis l’acte inqualifiable de tuer un homme de Dieu, le père Jacques Hamel alors qu’il officiait dans son église de Sainte Etienne-de-Rouvray près de Rouen en Normandie. Tous les deux ont été recrutés par DAECH qui ose s’appeler « Etat islamique » pour semer la mort et terroriser de paisibles personnes qui n’ont d’autre tort que d’avoir croisé leur chemin. Ce duo de la mort résume à lui seul ce terrorisme de genre nouveau auquel l’humanité est confrontée en cette période critique de son existence.

La France vit ces événements dramatiques, à partir de Charlie Hebdo, Paris, Nice et ailleurs avec une grande colère et une immense tristesse. Choqués, traumatisés, les Français le sont à juste raison comme d’autres avant eux et après eux. Si on regarde la carte peu de pays ont été épargnés et rien ne dit que ceux-là ne subiront pas des traumatismes encore plus durs commis par des amis ou des frères d’Adel Kermiche et d’Abdelmalek Petitjean.

Alors pointer du doigt la communauté d’origine immigrée ou l’Islam dont l’islamisme est une des formes, comme le font certains politiciens et même certains penseurs en France c’est à la fois mettre en accusation de paisibles citoyens français dont le tort est d’être né musulman car pour l’extrême majorité l’islam est un héritage culturel et familial sans plus, mais désigner à la vindicte générale une communauté qui ne cherche qu’à s’intégrer dans le tissu social français mais qui a du mal à y réussir pour des raisons qui ne tiennent pas à elle mais à la perception que se font les français de souche à son égard.

Ce terrorisme-là est dangereux non pas parce qu’il tue des gens aveuglément mais parce qu’il le fait à dessein pour mettre les communautés les unes contre les autres, les arabes contre les non arabes, les musulmans contre les non musulmans, les français de souche contre les français issus de l’immigration. En s’attaquant à des démocraties séculaires, il sait que ses actes ont le plus grand retentissement car là-bas la vie humaine est précieuse et le trouble ainsi porté risque de faire éclater la cohésion sociale que ces peuples ont mis des siècles à construire et à cimenter.

En s’attaquant à un prêtre catholique dans une église lieu de paix par excellence, ce terrorisme-là cherche à raviver les guerres de religions qui ont créé un large fossé entre le sud et le nord de la Méditerranée pendant des siècles. Ce fossé n’a commencé à se résorber que depuis un demi-siècle avec la décolonisation. Mais si on n’y prend garde tout peut ressortir à la surface rendant impossible une cohabitation autour de cette mer dont on voulait faire « un lac de paix et de propsérité » pour tous ses riverains.

Des deux côtés de la Mare Nostrum, il doit y avoir une prise de conscience que ce terrorisme-là ne peut pas être combattu chacun pour soi. Il ne peut pas être combattu avec en arrière plan la stigmatisation d’une communauté ou d’une religion, car toutes les communautés et toutes les religions sont dans le point de mire de ce terrorisme. D’ailleurs, il a fait plus de victimes dans les rangs de fidèles musulmans que partout ailleurs.

Ce terrorisme-là est un fléau. Parce qu’il tue sans discrimination, il peut être comparé à la peste qui tuait des milliers de gens aux siècles sombres de l’humanité. Venu d’ailleurs en infestant par les rats des populations entières, la peste est comparable à ce genre de terrorisme véhiculé par des jeunes radicalisés infectés par le virus de la culture de la mort. Eux aussi à l’image des rats sont venus avec des idées d’ailleurs.

Pour les exterminer ce terrorisme-là il faut des efforts de part et d’autre de la Méditerranée. Des efforts réels et une coopération active dénuée de tout calcul et de tout parti-pris. Une coopération sur tous les plans et non pas uniquement sur le plan sécuritaire.

Combattre la misère, la marginalisation, la ghettoïsation, c’est combattre le terrorisme. Ouvrir les horizons devant les jeunes, les sortir de la désespérance et de la dévalorisation de soi, c’est aussi combattre le terrorisme.

La tâche n’est pas aisée, car ce terrorisme-là va ouvrir des boulevards devant les partis d’extrême droite dont le fonds de commerce est la xénophobie, l’islamophobie et le repli sur soi.

Mais il ne faut pas désespérer des bonnes volontés de part et d’autre de la Méditerranée pour que cette guerre de religion et ce clash des civilisations n’aient pas lieu.

Sinon d’autres Kermiche et Petitjean seront enfantés par le monstre qui dévorera tout sur son passage.

Raouf Ben Rejeb

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