La corruption, ce fléau rampant qui risque de détruire l’Etat

 La corruption, ce fléau rampant qui risque de détruire l’Etat

 

La Tunisie  abrite du 5 au 7 septembre courant la Cinquième Conférence Ministérielle du Réseau Arabe pour l’Intégrité et contre la Corruption (ACINET). Faisons un point sur la corruption en Tunisie. Faisons un point sur cette fatalité qui gangrène la Tunisie.

La corruption est un vice aussi vieux que la nature humaine. La corruption est l'utilisation abusive d'un pouvoir reçu par délégation à des fins privées comme l'enrichissement personnel ou d'un tiers (famille, ami...). Elle consiste, pour un agent public, un élu, un médecin, un arbitre sportif, un salarié d'entreprise privée..., à s'abstenir de faire, de faciliter quelque chose, du fait de sa fonction, en échange d'une promesse, d'un cadeau, d'une somme d'argent, d'avantages divers...

Selon une estimation de la Banque mondiale, 1 000 milliards de dollars seraient détournés en pots-de-vin par à l’échelle du monde. Ce montant représente environ 3 % des échanges de la planète.

La corruption existe tant dans les pays riches que dans les pays pauvres, même s’il est démontré qu’elle frappe les populations pauvres de façon disproportionnée.

La corruption s'attaque aux fondements des institutions démocratiques en faussant les élections, en corrompant l'État de droit et en créant des appareils bureaucratiques dont l'unique fonction réside dans la sollicitation de pots-de-vin. Elle ralentit considérablement le développement économique en décourageant les investissements directs à l'étranger et en plaçant les petites entreprises dans l'impossibilité de surmonter les « coûts initiaux » liés à la corruption. Elle dégrade la qualité de vie et favorise la criminalité organisée, le terrorisme et d’autres menaces pour la sécurité humaine. Elle contribue à l’instabilité et à la pauvreté et constitue un facteur dominant qui conduit les États fragiles à la déliquescence.

Les indices de Transparency International ou de la Banque mondiale font autorité pour évaluer l'ampleur du fléau sur les pays.

La corruption un énorme défi pour la Tunisie.

Les gouvernements successifs d’après le 14 janvier 2011 ne sont pas parvenus à endiguer ce fléau destructeur qui dépouille l’économie tunisienne de plus de 2% de son PIB. Plusieurs secteurs dont le secteur financier, les industries minières et pétrolières, le transport, les marchés publics, l’import-export…,  piliers de l’économie nationale sont victimes depuis longtemps de malversations et de corruption.

Au lendemain de la chute de Ben Ali, les nouveaux partis comme le CPR  et Ennahdha s’étaient emparés du sujet, pratiquant, à coups d’accusations tonitruantes, infondées et farfelues, une surenchère autour de la question pour gagner les élections de 2011. Une fois les élections gagnées, au pouvoir, ces partis n’ont rien fait. Ils n’ont rien obtenu comme résultats concrets en matière de bonne gouvernance, de transparence et de lutte contre la corruption. Rien n’a changé la situation s’est plutôt empirée.

Cinq ans après, la corruption continue ainsi de faire rage et semble même s’être généralisée, comme si l’instabilité sociopolitique de la transition démocratique l’avait nourrie. Cinq ans après la révolution, un nouveau phénomène la petite corruption est en train de se propager de façon exponentielle au point de devenir une mentalité socioculturelle qu’il est impossible d’éradiquer. La police, les tribunaux, et les services publics relatifs à l’obtention d’un document pratiquent la corruption. Le billet glissé à un employé des hôpitaux pour accélérer une admission ou à un policier pour éviter une contravention, comme le paquet de cigarettes tendu à un douanier, relèvent de la petite corruption quotidienne.

« Transparency International » a rendu public  son classement annuel de l’indice de perception de la corruption 2015 dans le secteur public. En Tunisie la corruption loin de diminuer prend de plus en plus d’ampleur. Classée au 76ème rang mondial et 13ème rang africain, la Tunisie a obtenu cette année un score de 38 points sur une échelle de 0 (Plus corrompus) à 100(moins corrompus) contre 40 points en 2014 et 41 points en 2013 et 2012. La Tunisie fait ainsi partie de la zone «  Alerte Orange », au même titre des pays ou la corruption bat son plein : le Maroc, l’Egypte, la Syrie, l’Irak et la Libye.

Réussir sinon ce serait la déliquescence de l’état!

« La Tunisie a déclaré la guerre au terrorisme. Elle devrait en faire autant avec la corruption. L’un et l’autre sont liés au commerce informel – plus de 50 % de notre PIB – et obèrent l’économie du pays. Nous risquons à ce rythme de dériver vers un État mafieux », prévient Chawki Tabib.

Des institutions et des lois suffiront-elles à endiguer le fléau ? La transparence est l’affaire de tous, à commencer par celle des partis qui ne publient pas leurs comptes et des dirigeants qui ne font pas leurs déclarations de patrimoine à la Cour des comptes malgré l’obligation légale. Pour rappel, le parquet de Paris demande un procès pour l'ex-président Nicolas Sarkozy pour avoir dépassé le plafond du financement de sa campagne électorale. Que c’est loin Paris !

Un ministère de la Gouvernance n’y changera rien et que de simples outils ne suffiront pas pour venir à bout d’une culture du bakchich et d’un système clientéliste solidement ancrés dans les mentalités. On pense souvent que la corruption « fait partie des mœurs ». Or, chaque société, chaque secteur et chaque individu aurait tout à gagner en disant « non » à ce crime.

Comment Restaurer le prestige de l’État le cheval de bataille qui a fait le succès de la campagne électorale de Beji Caïd Essebsi. Alors que l’État semble pour le moment bien incapable de s’imposer face à la corruption rampante ?

Comment le nouveau  gouvernement de Youssef Chached  va-t-il réussir à instaurer les bases d’une pratique gouvernementale transparente et intègre?

Je conclus avec la citation de William Shakespeare

« Si les empires, les grades, les places ne s'obtenaient pas par la corruption, si les honneurs purs n'étaient achetés qu'au prix du mérite, que de gens qui sont nus seraient couverts, que de gens qui commandent seraient commandés. »

A. Klai

6/09/2016

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