Le député d'Ennahdha Mohsen Soudani: « Qui vous a dit que nous avons rompu avec les Frères musulmans »?

Le député d'Ennahdha Mohsen Soudani: « Qui vous a dit que nous avons rompu avec les Frères musulmans »?

 

Le Congrès d’Ennahdha a-t-il noyé le poisson en embarquant tout le monde dans un choix purement sémantique entre la séparation du politique de la prédication et la spécialisation de ses affidés entre l’un ou l’autre des deux volets. La question essentielle est, en fait ailleurs. Oui ou non Ennahdha a-t-il rompu avec les Frères musulmans. La confrérie fondée par Hassan El-Banna en Egypte en 1928, devenue une internationale islamiste est dangereuse car elle compte essentiellement sur la clandestinité pour imposer y compris par la force le califat islamique. Il n’est question dans sa littérature que de renaissance « Nahdha » et de lutte contre « l’emprise laïque occidentale. Panislamiste, elle est officiellement considérée comme organisation terroriste par le gouvernement égyptien, la Russie, l’Arabie saoudite, et les Emirats arabes unis. La question n’a pas été posée car on a tenu à ne voir dans le parti à référence islamiste qu’une formation politique purement tunisienne. Le président Béji Caïd Essesbi ne fait qu’accréditer cette thèse. Le président d’Ennahdha Rached Ghannouchi, fort de cette prise de position évacue la question d’un revers de main ; « nous sommes un parti politique tunisien ancré dans l’identité nationale » dit-il sans plus de précision.

On veut bien le croire mais voilà qu’un des membres de son parti, plus est un des théoriciens du mouvement car membre de la commission du contenu, préparatoire du congrès, Mohsen Soudani, en outre député à l’ARP sort du gué. « Qui vous a dit que nous avons rompu avec les Frères musulmans, rien dans les textes ni les motions issus du Congrès n’accrédite cette affirmation », dit-il. On doit le croire sur parole, car les textes il les connait sur les bouts des doigts. Intervenant que la chaine libanaise El-Hiwar il va plus loin : « Nous sommes fiers d’avoir des liens intellectuels et spirituels avec les Frères musulmans compte tenu des qualités de résistance, de dignité et de discipline qu’on leur connait » ajoute- t-il. « Nous n’avons pas écrit même pas un mot ni de façon explicite ou implicite sur la question, nous n’y avons à aucun moment dit cela dans nos documents ou nos motions » dit M.Soudani. On ne peut pas être plus explicite. Il se met même en colère : « la relation d’Ennahdha avec les Frères musulmans n’est pas un chef d’inculpation ni une accusation » martèle ce connaisseur des textes du mouvement.

Ressentant l’effet désastreux de telles déclarations, Samir Dilou membre du Majlis Choura et un des dirigeants du mouvement est monté au créneau pour minimiser les propos de son collègue de l’assemblée. « Nous étions à l’origine influencés par la confrérie mais nous ne le sommes plus. Les Frères musulmans sont une organisation égyptienne, alors que nous sommes un parti politique tunisien et rien que tunisien » tempère-t-il. Seul bémol, les qualificatifs de Mohsen Soudani à propos de la confrérie égyptienne sont bien vrais, précise Samir Dilou à l’endroit des « faucons » du mouvement. Il ne manque pas d’ailleurs de faire part de sa solidarité avec ses frères égyptiens qui font face à la répression dans leur pays. Double discours, double langage, les propos de Mohsen Soudani le laissent savoir quand bien même Samir Dilou essaie de les minimiser. Mais les Saoudiens et les Emiratis, les adversaires résolus des Frères musulmans, qui vont-ils croire ?

R.B.R.

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