Le Mohsen Marzouk nouveau est arrivé, moins arrogant et plus accommodant

Le Mohsen Marzouk nouveau est arrivé, moins arrogant et plus accommodant

 

Mohsen Marzouk, le secrétaire général du parti Machrou3 Tounés a mûri et changé. A l’entendre, il n’est plus l’homme pressé que l’on connaissait qui tire tout ce qui bouge et qui court plus vite que son ombre. C’est un homme réfléchi, totalement sûr de lui mais non dominateur que l’on a écouté ce lundi deviser sur le gouvernement d’union nationale en gestation.

Pas un mot au dessus de l’autre, aucune attaque frontale ni de biais, aucune allusion à Nidaa Tounés, il était complètement transformé. La situation du pays est extrêmement grave pour qu’on puisse se permettre des écarts ou de tomber dans le ridicule, dit-il avec une conviction d’autant plus forte qu’elle tombe sous le sens.

Pour montrer qu’il prend son temps et qu’il ne joue plus de la précipitation, il a expliqué que son parti tout juste sorti de son congrès constitutif n’est pas encore prêt pour entrer au gouvernement. Mais il ne sera pas avare de son soutien s’il trouve qu’il répond à ses vœux. Même qu’il lui donne le temps pour faire ses preuves. C'est-à-dire si on comprend bien qu’il lui accorde son soutien et attend les cent premiers jours pour lui demander des comptes. On ne peut être plus rationnel et plus accommodant.

Il n’oublie pas cependant d’énumérer les « conseils » qu’il donne à Youssef Chahed pour que sa mission « de la dernière chance » soit une « réussite ». Est-ce des « conditions » pour que ses députés accordent leur confiance au gouvernement, se hasarde Amina Ben Doua, la journaliste qui l’interviewait dans son émission « Midi-Show » sur Mosaïque Fm. « Pas du tout » répond-il comme pour esquisser que le temps des conditions est révolue et que c’est désormais le temps de l’action au service du pays. Son premier conseil c’est que Youssef Chahed s’adresse aux Tunisiens pour leur faire part de l’état réel du pays. Sans fard, ni inutiles circonvolutions. En ne le faisant pas Habib Essid a eu les déboires que l’on connait, ajoute-t-il.

Second conseil c’est que Youssef Chahed se sépare des ministres qui ont échoué dans le gouvernement sortant. Ils constitueront des boulets pour son action et il n’y a rien à en tirer, fait-il savoir. Toujours au niveau des conseils c’est que l’équipe ne soit pas choisie sur la base de « quotas non restrictifs ». En régime parlementaire, les quotas, on ne peut pas y échapper mais ils doivent être restreints. Selon lui la moitié des membres du gouvernement doivent être indépendants des partis. Au sein des partis, le choix doit se faire de sorte à favoriser les gens consensuels mais surtout pas conflictuels qui se sont singularisés dans les attaques contre tout et tout le monde. Certainement il doit avoir des noms en tête.

Mais surtout il est contre la « gadgétisation » du gouvernement. L’image qu’il présente est frappante c’est celle des schtroumpfs, ces petites créatures imaginaires bleues logeant dans un village champignon au milieu d'une vaste forêt (et poursuivies par leurs pire ennemis, le sorcier Gargamel et son chat Azraël ). Il ne veut pas d’un gouvernement de schtroumpfs c'est-à-dire de gens formatés pour le besoin de la cause. Pour lui le maître mot doit être compétence. « Plus de jeunes, plus de femmes, c’est bien dit-il mais à condition que ce soient des compétences avérées », fait-il remarquer sans détours.

Mais là où on retrouve le Marzouk que tout le monde connait mais avec la virulence en moins, c’est quand il refuse toute coalition avec Ennahdha. Irréductibles adversaires nous le sommes, irréductibles adversaires nous le resterons, a-t-il l’air de dire sans montrer la moindre concession.

Mohsen Marzouk dit qu’il rencontrera le chef de gouvernement désigné incessamment, aujourd’hui ou demain. Il attend de lui qu’il lui présente l’architecture de son gouvernement à défaut de noms. Ce sera pour lui l’occasion de lui faire des observations idoines. Là aussi sans concession aucune.

Le Mohsen Marzouk nouveau est arrivé. Plus soft, moins arrogant. Plus consensuel, moins hautain. Plus affable moins présomptueux. Enfin un homme politique qui cherche non à ratisser large, mais à rassembler sa famille et si possible au delà.

L’artisan de la politique va-t-il se révéler un artiste de la chose publique ?

Raouf Ben Rejeb

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