Les amis de Rached…

Les amis de Rached…
 
 
Illustrer une citation de Rached Ghannouchi par une photo de B’chira Ben M’rad, pionnière du militantisme pour l’émancipation des femmes en Tunisie, peut étonner, faire rire ou même choquer.Un peu moins après avoir consulté les publications de la page Facebook au nom des Amis de Cheikh Rached Ghannouchi comptant plus de 50 mille fans.
 
En première réaction après avoir consulté cette page, on peut penser à une énième campagne de communication pour redorer l’image d’un parti politique ou d’une personnalité publique en perte de vitesse. Graphiquement, les illustrations et les vidéos sont très soignées. 
 
Sur le fond, les extraits et les prises de position sont méticuleusement sélectionnés. Une volonté claire de séduire des franges de la société tunisienne viscéralement hostiles au leader islamiste, en leur parlant avec leurs codes et sur les thématiques qui les intéressent. Ses farouches adversaires pourraient encore contre-attaquer sur le supposé machiavélisme de Rached Ghannouchi et sur son art consommé double langage.
 
Sauf que la page est en train de faire découvrir un politique et surtout un intellectuel, surprenant d’audace… et de constance. 
 
Les positions philosophique et sociétales, de celui qu’on accuse d’être un affilié de « l’internationale ikhwaniste », n’ont pas changé depuis 40 ans. Vieilles vidéos et extraits de livres publiés depuis 30 ans à l’appui. Dans les années 80 le « cheikh » défendait le droit des femmes d’accéder à la magistrature suprême. Ses attitudes, ses rhétorique, ses références, ses idées fixes pourraient être reprise intégralement par quiconque se revendiquant des Lumières. Il ne s’agit pas de Charia ni de Califat.
 
Rached Ghannouchi martèle encore et encore les mêmes messages : l’homme est fondamentalement bon, l’Islam est ontologiquement une religion de la libération, la Liberté et la dignité humaine sont des droits universels, il n’existe pas d’exception arabe, la démocratie est le meilleur régime politique pour l’époque dans laquelle nous vivons… et le plus compatible avec l’esprit de l’Islam.
 
Et pour défendre ses idées, Rached Ghannouchi ne cite pas Ibn Taymiyya ou Sayyid Qutb. Il évoque Emmanuel Kant lors d’un prêche du vendredi pour parler de la sacralité de la vie humaine. Dans un documentaire il rapproche la dimension contestataire de l’Islam avec la pensée de Marx. Dans une ancienne interview de Al Jazeera il prédit la fin du régime de Ben Ali en usant d’une métaphore darwinienne… 
 
Des positions qu’on pourrait entendre dans la bouche de tous les supposés modernistes tunisiens… Le sourire et la sérénité en plus. 
 
 
 

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