« Les éditocrates », ces experts autoproclamés qui envahissent les plateaux

« Les éditocrates », ces experts autoproclamés qui envahissent les plateaux

De retour en Tunisie, parmi les choses qui m’ont impressionnée le plus (au-delà de l’incivisme, de l’anarchie, de la pollution, de la saleté envahissante, des chômeurs qui remplissent les cafés de bonne heure et le long de la journée , la circulation anarchique indescriptible, la cherté de la vie, l’école publique délaissée, les fréquentes coupures d’eau, les factures monumentales, les nuisances sonores, les pollutions multiples, l’assainissement primitif,… ) sont les débats d’experts autoproclamés tous les soirs sur les chaines tunisiennes. Je reviendrai lors d’une prochaine chronique sur ces sujets qui pourrissent la vie à tout le monde et qui renvoient une image négative de ce qui est la Tunisie et le tunisien.

Vous les connaissez bien. Leur visage et leur voix vous sont familiers. Ils, ce sont les « éditocrates ».  Apparu dans les années 2000, ce terme péjoratif «  désigne une personnalité très présente dans les médias, qui donne régulièrement son opinion sur un grand nombre de sujets dont elle n'est pas forcément spécialiste ». Il est utilisé pour dénoncer une sorte d'aristocratie médiatique, un cercle fermé de journalistes, essayistes ou éditorialistes constamment invités dans les médias, et qui sont souvent accusés de connivence avec les élites politiques et économiques.

Ils signent tous les jours un éditorial dans la presse écrite ; ils livrent une chronique chaque matin sur une antenne de radio ; ils occupent les plateaux des grandes - et des petites - chaînes de télévision ; chaque année, voire plusieurs fois par an, leur nouveau et médiocre livre  envahit les tables des librairies. Ceux qui animent les « débats » sur les chaînes de télévision, ne sont pas des têtes pensantes, mais des militants du système, les yeux toujours rivés sur les courbes d’audience? La politique est une tragédie humaine et les médias en font un divertissement. La norme est décrétée depuis les comités de rédaction, la direction des chaînes ou des grandes éditions, déclarant ce qui fait «polémique», ce qui est « acceptable » ou « inacceptable ».

Ces « éditocrates » ne sont experts en rien et de rien mais ils ont des choses à dire sur (presque) tout et, à longueur de journée, ils livrent à l'auditeur-lecteur-téléspectateur-citoyen leurs commentaires creux ou délirants sur le monde comme il va et comme il devrait aller. Sentencieux, ils racontent (à peu près) tous la même chose et dans (presque) tous les domaines, que ce soit sur la vie politique, la crise économique, le terrorisme, les problèmes de société, les questions internationales, etc. Pontifiants, ils répètent à tout bout de champ qu'ils sont « politiquement incorrects » - alors qu'ils sont les plus illustres représentants du conformisme intellectuel.

Loin des contingences des petites mains du journalisme, les « éditocrates » se sont érigés en crème de l’aristocratie médiatique, en élite au sein de l’élite, soigneusement cadenassée. Où l’on n’entre que par cooptation, après avoir montré patte blanche. Après s’être coulé dans le moule d’une complète adhésion aux dogmes libérale de l’époque. Après avoir pieusement psalmodié, qu’il n’y a aucune alternative à la loi absolue du marché - celle du renard libre dans le poulailler de la concurrence « libre et non faussée »…

Avec eux, nous constatons une standardisation de l’information dans laquelle il est tentant de voir, en réalité, le triomphe de la désinformation. Il ne faut plus réfléchir : Les sources de l’information sont les mêmes : tous les médias disent et répètent en boucle la même chose : c’est le psittacisme incantatoire de la liturgie médiatique. On nous submerge donc d’informations torrentielles de telle sorte que nous ne pouvons plus prendre le temps de la réflexion critique, ni prendre celui de vérifier les éléments divulgués en confrontant les sources diversifiées possibles. Le réel est systématiquement tamisé aux grilles de la norme de ce que doit être la vision juste des choses.

Notre avenir est dans le fait d’être pleinement nous-mêmes. Le principal problème c’est que les personnes n’ont pas d’idéal, elles n’ont pas le niveau de conscience qui accompagne naturellement la liberté de l’esprit, elles n’ont que des besoins à satisfaire! Dans ces conditions, on peut être sûr, que d’autres décideront à leur place ce que sera leur vie, c’est-à-dire une survie en attendant d’être éliminées dès qu’elles ne serviront plus les intérêts du système… Et de manipulées elles seront fatalement manipulatrices à leur tour !

Il est temps de se réveiller et de devenir citoyen éclairé et être son propre arbitre sur tous les sujets de notre vie et de notre société.

 A.K

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