L'heure de Najem Gharsalli et Rafik Chelly a-t-elle sonné?

L'heure de Najem Gharsalli et Rafik Chelly a-t-elle sonné?

 

Le chef du gouvernement Habib Essid l’a reconnu, vendredi 03 juillet. Les unités sécuritaires n’ont pas été promptes à intervenir pour limiter le massacre de Sousse le 26 juin dernier et qui a fait 38 victimes parmi les touristes. « Le temps de la réaction, c’est là le problème », a-t-il déclaré à la BBC, avant de présenter des excuses, au nom de la Tunisie, aux familles et aux pays des victimes.« Nous sommes vraiment désolés pour ce qui s’est passé », a-t-il dit. Ce faisant, il a avoué des défaillances au niveau des forces de la police et des dysfonctionnements au niveau de la gestion de la sécurité des sites touristiques en particulier et dans le pays de manière générale. Le tueur a pu déambuler pendant au moins 30 minutes selon plusieurs témoignages, Kalachnikov à la main, avant d'être abattu par les forces de police.

Le ministère de l’intérieur a payé le plus lourd tribut de l’après 14 janvier 2011. « Nettoyage », sanctions, décapitation des services sensibles. Déstabilisé par la succession de plusieurs gouvernements et par le passage catastrophique de certains ministres dont notamment Farhat Rajhi, ce département a été le plus diabolisé et le plus  vilipendé. Dans la guerre contre le terrorisme, les agents de la sécurité ont fourni un grand nombre de martyrs et sont les premières cibles des attaques terroristes, mais aussi de la colère des manifestants et plusieurs postes de police et de la garde nationale ont été incendiés.

On sacrifie les subalternes

A la suite de chaque attentat terroriste ou chaque mouvement social, des responsables sécuritaires sont limogés pour cause de défaillance. Le Bardo, Kébili, Monastir, Gammarth et tout dernièrement Sousse et Kairouan. Mais est-ce suffisant pour contenir la grogne des Tunisiens et corriger les défaillances et les dysfonctionnements ? Et pourquoi à chaque fois, sacrifie-t-on des responsables régionaux, des subalternes, comme pour étouffer l’affaire et ménager les grosses têtes ? Et si le mal était plus profond que cela et que les dysfonctionnements n’avaient pas atteint des niveaux supérieurs ? Avec la nomination d’un secrétaire d’état, on a supprimé la direction générale de la sûreté nationale, une direction sensible qui était chargée de la coordination entre les différents services de sécurité. Sur un autre plan, la nomination d’un gouverneur, magistrat de son état, au poste le plus important dans le gouvernement, s’est avérée, avec le temps, une erreur de casting. Najem Gharsalli  ne manque ni de bonne volonté ni d’autorité. Mais il a, peut-être, péché par ce manque de flair que devrait avoir le premier flic du pays, en plus du manque d’expérience dans le domaine de la sécurité, bien sûr. Et si Habib Essid, qui a été ministre de l’intérieur dans le gouvernement de Béji Caid Essebsi en 2011, à une des périodes les plus difficiles et les plus cruciales du pays, avait réussi dans sa tâche, c’est parce qu’il connaissait les rouages de l’appareil pour y avoir passé près de cinq ans en tant de chef de  cabinet de trois ministres successifs.

Le choc psychologique

Repêché après plusieurs années d’éloignement des questions sécuritaires, l’ancien directeur de la sécurité présidentielle Rafik Chelly, par ailleurs un homme honnête et intègre, a été tiré de sa retraite et nommé au poste le plus sensible en cette période. En sa qualité de secrétaire d’état à la sûreté nationale, il devrait avoir la main haute sur tout l’appareil sécuritaire, mais l’a-t-il vraiment ? N’y a-t-il pas un blocage quelque part  entre les  deux têtes du ministère ? Beaucoup de questions qui taraudent les esprits dont cette histoire de police parallèle qu’on sort à chaque mauvais coup.

L’heure du changement a sonné et le chef du gouvernement doit frapper fort et à la tête, car, en définitive, c’est lui qui assume la responsabilité de la sécurité du pays. Avec la sécurité du pays, il ne devrait pas y avoir d'état d'âme.

Gharssalli, même s’il n’a pas tout à fait échoué, pourrait être utile ailleurs. La nomination d’un nouveau ministre de l’intérieur sera interprétée beaucoup plus comme un choc psychologique et non comme un aveu d’échec.

Après l’attentat terroriste contre la synagogue juive de Djerba en avril 2002 et qui avait fait une vingtaine de morts, le ministre de l’intérieur et le secrétaire d’état à la sûreté nationale furent immédiatement relevés de leurs fonctions. 

B.O