"Marche républicaine": Peut-on dénoncer le terrorisme et marcher avec un... terroriste !?

"Marche républicaine": Peut-on dénoncer le terrorisme et marcher avec un... terroriste !?
 
 
Rarement une manifestation, une marche n'aura réuni autant de monde. Solidarité internationale, mobilisation planétaire... les superlatifs ont fusé de toutes parts pour décrire cette marée humaine qui a envahi les rues de Paris pour dire non au terrorisme et à la barbarie et rendre hommage aux victimes.
 
En tout, pas moins de cinquante chefs d'Etat et de gouvernement étaient en tête de la marche aux côtés de François Hollande, pour qui Paris était devenu subitement la capitale du monde. Les manifestants avaient un seul dessein, dénoncer le terrorisme qui est une calamité et qui est contraire aux principes de la religion. 
 
Mais après la dénonciation, l'émotion et l'indignation légitimes suscitées par cette affreuse tuerie, il est nécessaire de se poser un certain nombre de questions. 
 
Peut-on marcher et protester avec n'importe qui? Qu'est-ce que la liberté d'expression version française? Est-il permis de tout faire au nom de la liberté d'expression? Peut-on insulter une communauté au nom de la liberté d'expression? 
 
Tout le monde a vu en première ligne du cortège, un certain Netanyahu, qui avait l'air de marcher fièrement pour dénoncer le terrorisme. Quand on connaît la réputation de ce homme qui a tué froidement des milliers d'enfants à Gaza et fait souffrir le martyre aux Palestiniens, l'on ne peut rester de marbre face à ce culot et à une telle indécence. Indécence est un euphémisme. 
 
Est-il légitime de marcher avec un front national qui a toujours cultivé un climat xénophobe et raciste, la peur de l'étranger et du musulman. Un front national qui a toujours fait de la dénonciation des immigrés, des étrangers et des musulmans son fonds de commerce. Que nenni !
 
Est-il légitime de marcher pour défendre la liberté d'expression aux côtés de dirigeants et de fossoyeurs de la liberté de la presse, qui se soucient comme d'une guigne de la liberté de la presse et qui emprisonnent (chez eux) des journalistes pour une peccadille? 
 
Voir la Hongrie, l’Egypte, la Russie,la Turquie, Qatar et les Emirats arabes unis représentés dimanche à Paris lors de la marche républicaine contre le terrorisme et pour la liberté, alors que ces pays sont connus pour leurs politiques répressives à l’égard de la presse et des journalistes est tout simplement scandaleux. 
 
Des organisations de défense de la liberté de la presse et des droits de l’homme s'en sont même indignés vigoureusement. Au nom de quoi les représentants de ces régimes prédateurs de la liberté de la presse viennent-ils défiler à Paris en hommage à un journal censé défendre la liberté d'expression ? Quelle "écœurante hypocrisie" que de voir des ennemis de la liberté de la presse assister à cette marche pour la liberté !
 
En Egypte, trois journalistes d’Al-Jazeera sont toujours emprisonnés, accusés de soutien aux Frères musulmans. Fait révélateur, le pays du Nil est au 159 ème rang sur 180 dans le classement mondial de la liberté de la presse publiée par Reporters Sans Frontières. 
 
Que dire de la Russie où le journalisme est un métier à haut risque. Quand Lavrov participe à une marche pour condamner le meurtre des journalistes, il y a là une contradiction manifeste. C'est Anna Politkovskaïa qui va se retourner dans sa tombe. 
 
Quant à la Turquie, son Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan, a été récemment critiqué pour les arrestations massives qui avaient visé les médias opposés à son régime en décembre dernier, notamment le quotidien Zaman.
 
Et puis, disons-le franchement sans hypocrisie ! Quelle est cette liberté d'expression qu'on ne cesse de brandir en France? Quelle est cette liberté d'expression qui permet qu'on insulte un milliard de musulmans en caricaturant de la façon la plus abjecte le Prophète de l'Islam ? Et chose incroyable, au lieu de revoir cette notion floue de liberté de la presse, et respecter la foi (c'est-à-dire ce que les musulmans ont de plus sacré) de l'autre, l'on continue de jeter de l'huile sur le feu en exhibant les mêmes caricatures. 
 
En hommage aux victimes de Charlie Hebdo, certaines personnes ont même jugé bon de déchirer un exemplaire du Coran aux yeux de tous. Hier encore, une chaîne française en a même rajouté une couche en faisant une sorte d'interview avec le prophète de l'Islam.
 
Et puis, quelle est cette mauvaise foi, quelle est cette politique du deux poids deux mesures qui condamne et censure un Dieudonné et permette que l'on traite le prophète de l'Islam de terroriste en transformant son turban en bombe?
 
Quelle est cette indignation sélective ? Admettons qu'il s'agisse de liberté de la presse, mais cette liberté est-elle permise pour tous? Le dessinateur Siné, figure emblématique du journal Charlie Hebdo, n'a-t-il pas été licencié pour avoir ironisé dans une chronique publiée le 2 juillet 2008, l’éventuelle conversion au judaïsme de Jean Sarkozy avant son mariage avec la fille du fondateur des magasins Darty. Motif du licenciement: propos antisémites !
 
Lorsqu’il s’agit, à l’inverse, d’insulter  publiquement la religion musulmane, cela n’a pas l’air de déranger. Cela s'appelle de la liberté d’expression à... géométrie variable !
O.D.