Qui veut attiser le feu de la haine ?

Qui veut attiser le feu de la haine ?

 

« Jamais la haine ne cesse par la haine ; c'est la bienveillance qui réconcilie ».

Alors que le pays peine à accomplir sa transition économique, que cette union nationale autour du gouvernement de Youssef Chahed commence à se fissurer et que le terrorisme résiduel pointe du nez, voilà que les dernières condamnations des anciens hauts dignitaires du régime de Ben Ali sont venues pour nous enfoncer davantage dans nos craintes et nos doutes. L’unité tant prônée et la réconciliation nationale tant galvaudée ne sont pas pour demain.  La crainte du retour des vieux démons de la haine et de la vengeance font planer un climat de suspicion et de méfiance. Et de peur et d’incertitude sur l’avenir du pays. Cette haine ambiante qui obscurcit le ciel du pays est présente dans les médias et notamment dans les réseaux sociaux. Elle est attisée par des politiques à la recherche d’un nouveau positionnement ou d’une nouvelle virginité, des chroniqueurs et des animateurs stipendiés par leurs « maitres » pour remonter les Tunisiens les uns contre les autres et souffler sur des plaies encore béantes. Ceux qui ne partagent pas la même opinion sont dénigrés et trainés dans la boue. Une fois accumulée, la haine va exploser au visage de tout le monde.

Tant que certains resteront enfermés dans une sorte d’autisme, repliés sur leur passé, leurs blessures, leurs certitudes et leurs haines, il serait difficile d’entrevoir la lumière au bout du tunnel.

Il faudrait déconstruire les contre-vérités et les idées reçues et savoir aller au-delà de son appartenance politique ou idéologique pour agréger de sensibilités différentes voire contraires.

Une réponse aux divergences  

La crise aigüe que traverse le pays nécessite l’union de toutes les composantes de la société pour une véritable réconciliation nationale afin de panser les plaies, renforcer la cohésion nationale et ouvrir une nouvelle page pour construire l’avenir commun. Elle constitue elle-même une réponse aux divergences politiques et sociales et aux menaces qui guettent le pays.  Elle est également un préalable à tout processus de reconstruction.

Aujourd’hui, plusieurs voix s’élèvent pour exprimer leur inquiétude face aux «procès qui continuent, contre nombre de cadres de l’Etat parmi ceux qui ont servi l’Etat sans en tirer bénéfice, ni personnel, ni matériel ». Elles appellent à accélérer le processus de réconciliation nationale qui est au cœur du programme du président Béji Caid Essebsi. Des partis politiques, des députés, des personnalités de la société civile et des hommes de culture et de médias multiplient les appels pour éviter d’ouvrir la boite de Pandore. Et puis, tout le passé devrait-il être totalement rejeté et ses acteurs complètement «sacrifiés» sur l'autel d'une justice transitionnelle à son tour, critiquée et jugée « vindicative » ? Plusieurs milliers d’anciens hauts fonctionnaires, dont une trentaine de ministres, sont poursuivis en vertu du fameux article 96 du code pénal. Ils se sont trouvés impliqués dans des affaires judiciaires parce que dans l'exercice de leurs fonctions, ils ont été amenés à appliquer des consignes et des recommandations parvenant d'une autorité supérieure. D'autres ont été «dégagés» par des «néo-révolutionnaires» qui ont confisqué «la révolution des jeunes» en s'autoproclamant «protecteurs et défenseurs de la révolution» et «nettoyer l'administration». Aidés en cela par de nouveaux «inquisiteurs» qui avaient orchestré une véritable «chasse aux sorcières», ne lâchant pas de leur vindicte des fonctionnaires, pour la plupart honnêtes et consciencieux, en leur fabriquant de toutes pièces des dossiers. Ils ont droit à la dignité.

Ce genre d’affaires à caractère politique doivent-être traitée par les politiques. Les fautifs, ceux qui ont bénéficié d’un quelconque avantage illicite, confondus de corruption ou de malversation, doivent répondre de leur forfait devant la justice. Et payer.

L’exemple de l’Afrique du Sud doit nous inspirer plus qu’aucun autre. Nelson Mandela, aujourd’hui disparu, a réussi à dépasser « les sentiments de vengeance et de haine en se faisant le défenseur inlassable de la réconciliation nationale ».

B.O

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