Qui veut la peau du gouvernement ?

Qui veut la peau du gouvernement ?
 
 
A peine installé, le gouvernement de Habib Essid s’est trouvé la cible de plusieurs attaques y compris dans les rangs du parti majoritaire, Nida Tounes. Des critiques souvent acerbes et parfois dans des mots crus, genre « gouvernement de ramassis » lancé par un éternel « révolutionnaire » qui a, depuis les premiers jours ayant suivi le 14 janvier 2011, investi les plateaux et les journaux. Ce gouvernement qui a été formé après d’âpres négociations entre les partis politiques et dans un souci d’équilibre entre les différentes forces en présence, en vue de conduire le pays à bon port, se trouve en  butte à des  problèmes monstres, pour la plupart insolubles, et doit répondre aux revendications de toutes les franges de la société. Revendications, tout à fait légitimes et qui ne datent pas d’aujourd’hui. Les raisons qui ont poussé les jeunes tunisiens à se soulever se sont approfondies : chômage, précarité, pauvreté et disparités régionales n’ont pas reculé. Que peut faire un gouvernement qui a hérité d’un lourd legs, dénué de moyens, si ce n’est sa simple volonté, face à une telle situation qui devient de plus en plus préoccupante ? 
Travailler dans la discrétion
 
Habib Essid, un haut commis de l’Etat, pur produit de l’administration publique, presque apolitique, est réputé être un grand bosseur et homme de dossiers. Il préfère travailler dans la discrétion, loin des caméras et des medias. Choisi pour former et conduire le premier gouvernement issu d’élections législatives libres et démocratiques, après une période de transition qui n’a que trop duré, il a dû composer avec plus d’une partie et plus d’une personnalité, non loin des pressions de toutes sortes. Il s’est même ravisé pour revoir sa première copie après s’être rendu compte de certaines erreurs.
A quelques petites semaines des cent premiers jours,  on le dit déjà démissionnaire, chose qui a été démentie par ses services. On parle d’un éventuel remaniement qui toucherait trois ou quatre portefeuilles dont les titulaires  n’auraient pas fait impression. Et puis, il y a eu cette histoire des nominations de gouverneurs qui a soulevé beaucoup de réactions même chez les alliés politiques. Entre temps, les grèves et les débrayages continuent et les négociations sociales achoppent. La compagnie des phosphates, l’un des fleurons de l’économie nationale, est presque complètement paralysée. En plus de cela, le terrorisme se fait de plus en plus menaçant, malgré les coups qui lui sont portés par les forces de sécurité et de l’armée nationale.
 Diminuer l'impact de sforces destructrices
 
Il faut reconnaitre, aussi, que la crise frappe de plein fouet l’économie nationale. Ralentissement des investissements, doute des hommes d’affaires tunisiens qui se trouvent être à l’écart du processus en cours, en attendant la concrétisation de l’initiative présidentielle sur la réconciliation nationale ,  promesses non encore tenues des donateurs étrangers, à cela s’ajoutent les arrêts incessants de la production dans certaines entreprises, volontairement causés par les débrayages. Situation, des fois, inextricables qui a fait perdre beaucoup  d’argent à l’Etat.
 
Qui veut donc la peau du gouvernement actuel et quels sont les desseins inavoués des parties qui cherchent à le descendre et ont-elles des solutions de substitution ? Le gouvernement actuel, faut-il le rappeler, n’est plus provisoire. Au contraire, il est soutenu par une large majorité au sein de l’Assemblée des représentants du peuple et dans les partis politiques. Certes, il n’est pas exempt de reproches, mais ce serait injuste que de  lui faire assumer tous les problèmes et les tares de la société. Il n’a pas baguette magique et il est beaucoup plus un partenaire stratégique pour la multitude de partis qu’un adversaire politique. Il a la motivation, le sens du sacrifice, mais il n’est pas à l’abri de l’erreur.
Toutefois, on ne doit pas lui donner un blanc-seing, mais plutôt lui apporter un soutien critique qui lui permet d’avancer plus sûrement et d’assumer pleinement ses responsabilités, conformément à ses engagements. Car « chaque idée constructive diminue l’impact des forces destructrices ». 
Brahim Oueslati