Ridha Belhadj chez El Wafi: La politique discréditée et la démocratie déconsidérée

Ridha Belhadj chez El Wafi: La politique discréditée et  la démocratie déconsidérée

 

Quand on a été  à un poste très proche de la plus haute autorité de l’Etat peut-on tout dire et tout livrer à la curiosité du public toujours avide de nouvelles croustillantes sur la vie des gouvernants ? On est en droit de se poser cette question en regardant l’émission de Samir El-Wafi «  Liman yajroo fakat » dont l’invité principal était dimanche 25 septembre Ridha Belhadj ex-bras du droit du président de la république successivement à la Kasbah en 2011, au mouvement Nidaa Tounès de  sa fondation à fin 2014 et enfin à la présidence de la république comme ministre directeur du cabinet présidentiel jusqu’à son limogeage «  à l’amiable » quand il a été sommé de choisir le  parti et de quitter le palais de Carthage.

Ridha Belhadj est en droit de se venger comme il l’entend car la rancune peut être mauvaise conseillère mais de là à  laisser libre cours à des racontars qui ne peuvent servir personne sauf à porter atteinte au prestige du premier magistrat du pays et de l’Etat lui-même,  voilà un dérapage dangereux qui porte de sérieux risques et ne peut servir nullement la liberté de presse, d’opinion et d’expression. Celle-ci est certes le  fondement essentiel  de la démocratie mais elle peut être aussi son fossoyeur si on en fait mauvais usage.

Avoir été à une responsabilité éminente de l’Etat aurait dû conduire Ridha Belhadj à éviter de tomber aussi bas surtout que l’émission où il a accepté de paraitre bénéficie d’un taux d’audience élevé. Que l’on se délecte dans les chaumières d’un président  manœuvrier,   prisonnier de son entourage familial et otage d’un fils qui n’a ni compétence ni rayonnement, cela peut être risible un instant mais quel effet dévastateur sur l’image de l’Etat. Que l’on mette en évidence la montée et la déchéance d’un homme  fort du régime pour des raisons qui sont tout sauf politiques, cela nous renvoie à des agissements que l’on croyait d’un temps révolu. Mais le pire c’est quand il dit avoir refusé la reconnaissance de la république sous forme de décoration par le chef de l’Etat suite à la fin de sa mission à Carthage. Quand son rusé d’interviewer lui dit s’il considérait la décoration comme une médaille de fin de service, il a opiné du chef donnant ainsi une piètre image des dignitaires de la république.

Quand on a été à une haute fonction à la présidence de la république peut-on sans mal profond affirmer que le régime est en voie de présidentialisation contrairement à ce que prévoit la Constitution. Une telle déclaration est tout sauf opportune. Elle sème le trouble sinon la zizanie. Etait-ce indispensable que Belhadj lui-même le dise avec l’effet désastreux que cela risque d’avoir. Nidaa Tounés y perdrait comme l’Etat.

La politique c’est du sérieux, c’est être au service des autres, c’est porter des idéaux et défendre des principes,  mais comment la considérait comme telle quand elle devient la scène de violences, de coups de poing et de bâton échangés. Jusque là on refusait d’accepter que des hommes politiques soient impliqués directement dans la violence. Mais que ceux-ci le reconnaissent sans ambages cela crée un malaise. Est-on en droit de le faire ? La question mérite d’être posée.

Dans tous les cas, on sort de cette émission avec un sentiment de malaise. Ce genre d’émissions qui déflore l’intimité de la politique et de l’Etat, qui conduit non à les humaniser comme on le croit,  mais à les rabaisser ne peut que créer de la gêne. L’inquiétude gagne aussi les téléspectateurs. A voir les hommes politiques arrivés au sommet de l’Etat s’étriper de la sorte et porter  ainsi atteinte au prestige de la république  ne peut que  discréditer la politique et déconsidérer la démocratie naissante dans laquelle le pays tente de s’engager.

La culture de l’Etat aurait dû inspirer Ridha Belhadj et lui éviter des dérapages qui vont mettre à mal sa carrière politique si elle ne va pas lui être fatale.

Raouf Ben Rejeb

 

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