Spéculations sur un remaniement : ce n’est pas sérieux !

Même pas quatre mois depuis qu’il est en place et on parle déjà de remaniement du gouvernement Youssef Chahed. On revient donc au sport favori des Tunisiens. Il a suffi que le patron de la Kasbah réunisse ses ministres et secrétaires d’Etat pour procéder à une évaluation globale de l’action de son équipe pour que les bruits commencent à aller bon train sur un réaménagement prochain de cette équipe. Alors chacun y va de ses pronostics.

Au départ on dit que Youssef Chahed n’est pas satisfait du rendement de certains de ses ministres et qu’il envisage d’ici peu de procéder à un remaniement ministériel. Comme personne ne trouve à redire à cette spéculation qui est de l’ordre de la prévision, car tous les gouvernements subiront un jour ou l’autre un réaménagement, on va plus loin. On avance alors des supputations encore plus précises. Le remaniement projeté, dira-t-on concernera des ministres qui n’ont pas donné satisfaction ainsi qu’un département de souveraineté et aussi des ministres délégués. Du flou artistique.

Bien que l’on ne soit pas plus avancé, les médias ne s’arrêtent pas en si bon chemin, encouragés qu’ils sont par le fait que personne dans l’entourage du Chef du gouvernement n’ait pris la peine de démentir de telles spéculations. On soupçonne que certains ne sont pas mécontents d’user de cette arme pour montrer la toute-puissance du Chef du gouvernement.

Troisième étape : les informations colportées sous le manteau deviennent plus précises. On a l’impression de quitter la spéculation pour aller vers le possible sinon le probable. Ainsi, voit-on, certains, parler de ministres désignés bel et bien par le nom et la fonction. Bien sûr chacun y va de « ses moutons noirs », ces ministres qu’il veut voir quitter le gouvernement ou qu’ils considèrent comme n’ayant pas donné satisfaction de son point de vue quand ce ne sont pas ceux qu’ils désignent à la vindicte générale.

Ce qui peut paraitre un jeu ou un sport est en fait un moyen de déstabiliser bon nombre de ministres qui n’ont pas encore pris leurs marques au gouvernement. Il est primordial que les membres du gouvernement puissent disposer d’un minimum de temps. Arrêter leur élan en plein vol n’est pas bon, c’est même mauvais, en tout cas contre-productif.

Le pays a souffert de l’instabilité ministérielle ces dernières années. Depuis janvier 2011, on a vu défiler ministres et secrétaires d’état à un rythme effréné. Cela a eu un effet dévastateur sur l’action des pouvoirs publics. Il est indispensable que l’équipe actuelle puisse durer aussi longtemps que possible.

On ne peut envisager de remaniement avant un an au moins. Il est même recommandé qu’à moins d’un accroc majeur toute l’équipe soit maintenue jusqu’aux élections législatives de 2019. Donc envisager un remaniement dans un mois est un aveu d’échec qu’il faudrait impérativement éviter.

Ce ne serait pas du tout sérieux, car rien ne pourra le justifier.