Tout sur les rémunérations des députés et des membres des instances constitutionnelles

Tout sur les rémunérations des députés et des membres des instances  constitutionnelles

 

Les députés font souvent l’objet de critiques, parce que jugés bien payés. Mais leur situation est tout autre en comparaison de leur mission et aussi des salaires des membres des instances constitutionnelles. Ils coûtent moins cher au contribuable et ne bénéficient pas des avantages alloués aux membres des instances. Le salaire moyen d’un député après la dernière augmentation est de l’ordre de 3.200 dinars. Alors que la rémunération mensuelle  d’un membre d'une instance est de l’ordre de 3.400 dinars, sans compter les avantages en nature, à savoir la voiture, le carburant, le bureau et ses fournitures, le secrétariat, le frais de déplacement et de mission, le téléphone…comme nous allons le démonter dans la suite de l’article. Ce qui pourrait atteindre les 6.000 dinars par mois.  La décision a été prise d’augmenter les salaires des députés d’une prime  entre 900 et 1.200 dinars par mois, comme indemnité de déplacement, de frais de bouche et de logement. Ainsi un député aura un salaire mensuel moyen d’environ 3.200 dinars contre 2.200 précédemment. 
Cette indemnité remplace les avantages en nature servis jusque-là aux élus du peuple, à savoir  l’hébergement dans un hôtel et la gratuité des repas, lors des séances plénières et des réunions des commissions, pendant trois semaines par mois. Ces augmentations ont été incluses dans le budget de l’Assemblée des représentants du peuple qui a été  voté, à l’unanimité des voix, au cours des débats budgétaires en décembre dernier. Rien donc de particulier. Sauf que ces augmentations tombent mal, à un moment où la situation sociale, marquée notamment par « la révolte des jeunes chômeurs », n’est pas propice à une telle mesure. Et parce que mal expliquées, elles risquent d’avoir un effet révulsant  sur l’opinion publique, peu permissive et  très  critique à l’égard des élus.

Un salaire maigre
Les députés, toutes sensibilités confondues, disent que l’indemnité qui leur est servie est une bagatelle et qu’elle ne suffit pas à satisfaire leurs besoins impérieux. Mieux, certains d’entre eux vont jusqu’à affirmer qu’avec  « un salaire aussi maigre », ils ne peuvent pas  assumer convenablement la mission pour laquelle ils ont été élus. D’autant plus qu’ils ne bénéficient d’aucun autre avantage en nature, si ce n’est la gratuité du transport public. Ils ne disposent ni de bureaux, ni d’assistants, ni de  téléphone, ni d’aucune autre assistance sous quelque forme que ce soit.  Alors qu’ils tirent leur légitimité du peuple, participent au travail législatif et au contrôle de l’action du gouvernement, ils se trouvent en bas de l’échelle en comparaison des membres des instances constitutionnelles qu’ils ont eux-mêmes « désignés ». Ou encore en comparaison de leurs collègues dans d’autres pays dont les salaires sont calculés sur  la base du traitement des hauts fonctionnaires. 
Bien qu’élu dans une circonscription, chaque député, compte tenu de la mission de vote de la loi et de contrôle de l’action du gouvernement dévolue à l’Assemblée des représentants du peuple, représente la Nation tout entière et est à ce titre « détenteur d’un mandat national ». Il jouit de l’immunité parlementaire qui le protège contre toutes sortes de « poursuites judiciaires civiles ou pénales » et il « ne peut être arrêté ou jugé, en raison d’opinions ou de propositions formulées ou d’actes effectués dans l’exercice de ses fonction », comme le stipule l’article 68 de la Constitution. Aussi faudrait-il « l’immuniser contre toutes les tentations du pouvoir et de l’argent en lui garantissant un salaire respectable », comme l’explique un député membre de la commission des finances.

Les membres des instances considérablement avantagés
Les membres des trois instances constitutionnelles formées jusque-là sont grassement payés et bénéficient de  beaucoup d’avantages et coûtent énormément cher aux contribuables.   Jugez-en. Les membres de la haute autorité de l’audiovisuel (Haica) sont rémunérés en vertu du décret 33100 du 26 juillet 2013, promulgué par le chef du gouvernement de l’époque, Ali Laârayedh. Le président perçoit un salaire mensuel de 3.500 dinars, bénéficie  d’une voiture de fonction et 500 litres de carburant. Le vice-président, quant à lui, perçoit 100 dinars de moins, soit  3.400 dinars et bénéficie, à son tour, d’une  voiture de fonction et 360 litres de carburant. Alors que les sept autres perçoivent chacun 3.200 dinars et ont droit à une voiture de fonction et 360 litres de carburant. Ils sont, relativement, moins payés que leurs collègues de l’Instance vérité et dignité (IVD) dont la présidente perçoit 3.800 dinars par mois et bénéfice d’une voiture de fonction et d’un contingent de carburants égal à 500 litres. 
Son vice président a un traitement mensuel de 3.600 dinars et a droit à une voiture de fonction et 360 litres de carburant. Les  autres membres perçoivent chacun un traitement mensuel de 3.400 dinars et bénéficient, également, d’une voiture de fonction et 360 litres de carburant (décret n° 2014- 3125 du 2 septembre 2014, fixant le régime de rémunération du président et des membres de l’Instance vérité et dignité). Quant aux membres de l’Instance supérieure indépendante des élections (Isie), ils ont un traitement mensuel de 3.600 dinars chacun, en plus d’une voiture de fonction et de 360 litres. Par contre, le salaire du président n’est pas mentionné dans le décret 1140 du 11 avril 2014 fixant le régime de rémunération des membres de l’Isie. Mais selon certaines sources, son salaire est homologué avec celui d’un ministre ou le président de l’ARP, y compris les avantages en nature. Sans compter, bien entendu, les autres avantages, comme le bureau et ses fournitures, le secrétariat, le téléphone, les frais de déplacement et de mission, les journaux… Un membre d’une instance reviendrait à près de six mille dinars par mois.

Moins payés que leurs homologues ailleurs
Sur un autre plan, nos députés se comparent, souvent, avec leurs collègues des autres pays et se considèrent comme les moins payés. 
Ainsi, un député algérien  gagne l’équivalent de  près de 6.300 dinars tunisiens et bénéficie de plusieurs autres indemnités (logement, compensation, complémentaire…), ce qui porte son traitement à environ 8.000 dinars, soit  23 fois le Smig. Alors que le libanais perçoit en moyenne l’équivalent de 11.500 dinars tunisiens par mois, toutes indemnités confondues, soit 16 fois le Smig. Le palestinien et le jordanien, quant à eux, ne sont pas moins nantis puisqu’ils gagnent environ 9.000 dinars par mois, soit respectivement 6 et 26 fois le Smig de leur pays.
Inutile de comparer les traitements de nos députés avec leurs collègues européens dont les salaires peuvent s’élever à des milliers de dinars tunisiens, comme c’est le cas des députés du parlement de  Strasbourg qui gagnent en moyenne plus de 12.000 euros bruts par mois, soit plus de 25.000 dinars.
Les salaires des élus sont avantageux, certes, mais leurs responsabilités sont élevées et leur situation instable. 
Ils ne sont pas tous logés à la même enseigne, car si les hommes d’affaires et les fonctions libérales, médecin et avocats notamment,  d’entre eux n’ont pas de souci d’argent, les autres en ont besoin pour pouvoir assumer convenablement leur mission  et ne pas tomber dans le besoin.

B.OUESLATI

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