Youssef Chahed : un membre du gouvernement est limogeable à tout instant

Youssef Chahed : un membre du gouvernement est limogeable à tout instant

 

Le Chef du  gouvernement Youssef Chahed s’est évertué à dégonfler les effets négatifs du remaniement ministériel partiel qu’il a introduit sur  son équipe et qui a été contesté de façon acerbe par l’Union Générale tunisienne du travail(UGTT). Il a, d’ailleurs, tenu  à mettre l’accent sur le rôle national de l’organisation syndicale qui est, selon lui, un partenaire principal du gouvernement sur les grands dossiers et les réformes essentielles qu’il compte entreprendre. Il a, en outre, rendu hommage au secrétaire général  de l’UGTT, qu’il a qualifié de patriote en faisant remarquer qu’il s’est entretenu avec lui (au téléphone) à propos du  remaniement pour lever toute équivoque à son sujet.  « Je lui ai expliqué qu’il n’existe aucun message chiffré destiné à l’UGTT », a-t-il dit. « N’importe quel chef du gouvernement au monde qui se respecte aurait procédé de la même façon car le prestige de l’État était en jeu et cela doit avoir la priorité sur le reste»,  a souligné Youssef Chahed.

Dans une longue interview de plus d’une heure trente sur la chaîne privée Al-Hiwar Ettounsi, il n’a consacré d’ailleurs que quelques minutes au remaniement en laissant entendre que la menace de démission d’Abid Briki l’a résolu à l’évincer. Il n’a pas manqué de louer l’action de l’ancien ministre de la fonction publique et de la gouvernance ainsi que les efforts qu’il a accomplis notamment lors de la discussion de la loi des Finances 2017.

S’agissant de la nomination de Khalil Ghariani il a rappelé que l’UTICA, tout comme l’UGTT, a joué un rôle majeur dans toutes les étapes du pays et qu’il est également un partenaire du gouvernement. Il a loué  les  compétences du nouveau ministre, en estimant que la polémique que cette nomination a suscitée n’a pas besoin d’être.

Sur d’éventuels autres remaniements, il a souligné que le réaménagement de l’équipe gouvernementale figure parmi les attributions du Chef du gouvernement. « Tous les ministres sont soumis à une évaluation permanente. Si l’on constate que l’un des ministres ou des secrétaires d’État est défaillant, il sera limogé », s’est-il contenté de répondre.

La souveraineté n’est à brader à  aucun prix 

Youssef Chahed a d’autre part confirmé son opposition à la création en Tunisie de centre d’accueil pour les immigrés illégaux sur le sol tunisien. Notre opposition est irrévocable, a-t-il dit lorsque le journaliste lui a rappelé que la Turquie a accepté l’ouverture de centres d’accueil sur son sol moyennant des contreparties financières. « La souveraineté n’est à brader à  aucun prix », a-t-il ajouté.

D’autre part, il n’a pas écarté la possibilité pour lui de prendre la présidence du parti Nidaa Tounés. « Nidaa est mon parti et j’ai l’honneur de lui appartenir. Il traverse une crise certes, mais il importe de lui faire recouvrer sa santé. »  Cependant, il a fait remarquer que sa « priorité aujourd’hui ce sont  la Tunisie et les Tunisiens en faveur desquels il veut consacrer tous ses efforts ».

Questionné sur ses relations avec  le président de la république et sur la prééminence  de l’un par rapport à l’autre, il a tenu à dire que ces relations au beau fixe. « On dit que je demande conseils auprès du président de la république, je dois dire que c’est un privilège pour moi de bénéficier des conseils d’un homme de la trempe de Béji Caïd Essebsi qui a derrière lui une expérience de plus de soixante ans au service de l’Etat. ».

C’est moi le chef

A la question : « qui dirige  le pays ? », sa réponse coulait de source. « C’est la Constitution qui a défini les attributions du Président de la république, du Chef du gouvernement et de l’Assemblée des représentants du peuple et je peux vous assurer  que le souci premier  du président  Béji Caïd Essebsi   est que les dispositions de la Constitution soient scrupuleusement respectées», a-t-il souligné.

Youssef Chahed joue sur la durée puisque son gouvernement va rester, selon ses dires, jusqu’en 2019, date des prochaines élections législatives et présidentielles. Ainsi après  une période où il a fallu éteindre les incendies dans le pays en raison des tensions, des difficultés et des contestations, il est venu le temps de lui donner une vision et de lui tracer une perspective. Selon lui, le pays va engager dans les prochains mois les grandes réformes dont le pays a besoin pour gagner la bataille économique et du développement qui est restée en panne au cours des six dernières années.

Parmi les  grandes réformes qui vont démarrer rapidement, il a cité  la réforme de l’administration et des entreprises publiques. « L'État doit  avoir un rôle de régulateur et d’incitateur, il  ne peut plus continuer à s’occuper  des secteurs concurrentiels. Les entreprises publiques non  stratégiques doivent être restructurées et il n’y a aucun mal d’aller vers la privatisation. Nous avons, aujourd’hui, trois banques publiques; est-ce que la Tunisie a réellement besoin de trois banques étatiques? Ne sont-elles pas plutôt devenues une grande charge pour l’État? N’oublions pas que l’État a été obligé de verser 700 millions à la STB pour qu’elle ne coule pas et je suis sûr que d’ici quelques temps, on sera obligé de lui verser une nouvelle somme importante. »

Parlant de la lutte contre la corruption, la contrebande et les malversations, il a révélé qu’il passe plusieurs heures par jour à étudier les dossiers et à  les transmettre à qui de droit. Il a chiffré le montant des saisies de la contrebande à deux cent millions de dinars. « Au dernier conseil des ministres nous avons adopté le projet de loi de l’instance de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption à laquelle nous avons confié des prérogatives qu’aucun gouvernement n’a osé lui attribuer. De plus nous travaillons actuellement  sur une nouvelle loi sur l’enrichissement illicite », a-t-il encore révélé.

Raouf Ben Rejeb

 

 

 

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