Les jeunes Africains réclament « des actes, pas des promesses » pour faire de la paix une réalité sur leur continent

Les jeunes Africains réclament « des actes, pas des promesses » pour faire de la paix une réalité sur leur continent

« Des actes, pas des promesses » Les jeunes militants africains pour la paix qui se sont exprimés devant le Conseil de sécurité et la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour l’Afrique, ce matin, ont rappelé les réalités, parfois brutales, d’un continent en proie à divers conflits en soulignant que la jeunesse ne constituait pas un problème mais la solution à bien des maux.

Réunis par la nouvelle présidence sud-africaine sur le thème « Paix et sécurité en Afrique: Mobiliser les jeunes en vue de faire taire les armes d’ici à 2020 », les membres du Conseil ont entendu un jeune Ougandais, Victor Ochen, leur raconter -en visioconférence depuis Kampala- une vie « entamée dans la douleur » dans les camps de déplacés de son pays, craignant chaque jour d’être enlevé ou tué, une vie dédiée depuis à promouvoir la paix à travers la jeunesse du continent. 

« 2020 c’est bientôt », les a-t-il interpellés, alors que « les armes sont partout sur le continent ».  En République démocratique du Congo, un jeune homme lui a expliqué qu’il ne pouvait déposer les armes qui lui permettent de protéger ses parents et d’assurer sa propre sécurité.  Que répondre à cela? a-t-il demandé.  Comment faire pour que la paix soit gratifiante? Les initiatives lancées ne répondent « pas du tout » aux besoins des jeunes, a-t-il jugé.

Avant lui, Hafsa Ahmed, 27 ans, fondatrice de l’ONG Naweza, a expliqué depuis Nairobi, au Kenya, comment elle s’est mobilisée contre les violences policières dans sa communauté jusqu’à devenir une interlocutrice du chef de la police.  En Afrique, 80 % des violences mortelles sont perpétrées hors des zones de conflit, particulièrement en zone urbaine, a-t-elle témoigné.

« Si l’on veut faire taire les armes en 2020, il faut tenir compte de cette réalité, mieux comprendre les processus de transformation de la violence et investir davantage dans la jeunesse », a-t-elle souligné en regrettant que les processus de paix soient souvent « le domaine exclusif des hommes des vieilles générations ».

« Mobiliser la jeunesse et faire taire les armes en Afrique n’est pas un choix, mais une nécessité absolue » sur l’un des continents les plus jeunes du monde, a reconnu en prélude aux débats Mme Bience Gawanas, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour l’Afrique.  Il s’agit de l’un des continents les plus jeunes, avec quelque 220 millions de filles et garçons de 19 à 24 ans pour 1,2 milliard d’habitants, et qui seront 350 millions lors de la prochaine décennie, a-t-elle relevé.

Et pourtant: « Nous sommes une génération prise au piège d’un état d’attente perpétuel, parce que nous sommes toujours en train de négocier notre liberté politique et économique », a dénoncé Aya Chebbi, Envoyée spéciale de l’Union africaine pour la jeunesse.  Citant de nombreux exemples, de la Tunisie au Burkina Faso, de l’Afrique du Sud au Kenya et, plus récemment, au Soudan et en Algérie, la jeune femme a appelé à « reconnaître les mouvements initiés par la jeunesse » qui balayent le continent depuis 2010 et demandé davantage de droits pour cette catégorie de population -à la santé, à l’éducation et à des emplois de qualité- pour éviter que la rancœur née de l’injustice et des inégalités ne pousse les jeunes gens vers la violence armée.  « Nous voulons des actions, pas seulement des promesses creuses », a-t-elle martelé avant de préciser: « Ma génération veut davantage d’espace politique pour favoriser le changement, considérer les jeunes comme partie intégrante de la solution et non comme source de problème ».

« Les jeunes doivent avoir leur mot à dire », a reconnu en retour le représentant du Royaume-Uni.  La Côte d’Ivoire a ainsi rappelé qu’elle avait créé un parlement des jeunes qui leur offre un cadre d’expression démocratique et de participation active à la politique gouvernementale de réconciliation nationale, mais favorise également l’émergence d’une « conscience citoyenne ».

L’une des principales inquiétudes manifestées par les membres du Conseil s’est concentrée sur le risque de voir des jeunes délaissés et frustrés grossir les rangs des mouvements terroristes et extrémistes.  « Ignorer les aspirations des jeunes en Afrique, continuer de leur fermer les portes, risque de les pousser vers la radicalisation et l’extrémisme » a averti le Koweït, à l’unisson avec la Fédération de Russie et l’Indonésie.  Cette dernière a aussi jugé important d’associer les jeunes aux processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR). 

Exhortant la région à endiguer le flux des armes, la représentante des États-Unis a dénoncé « certains dirigeants » qui ne défendent que les intérêts d’une petite élite au détriment de la population et des jeunes.  Or, « perçus souvent comme passifs ou fauteurs de troubles, ils sont déjà beaucoup à jouer un rôle positif », a-t-elle relevé.  « Beaucoup d’exemples concrets et instructifs d’initiatives conduites par des jeunes femmes et hommes existent déjà sur le continent » a renchéri la France, regrettant que, « malheureusement », les jeunes continuent d’être victimes de stéréotypes et de discriminations, et largement exclus des processus prises de décisions, des institutions politiques et du marché de l’emploi.

Rappelant que son pays avait proposé la résolution 2457 (2019) sur la « Coopération entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales aux fins du maintien de la paix et de la sécurité internationales - Faire taire les armes en Afrique » en février dernier lors de sa présidence, le représentant de la Guinée équatoriale a annoncé la tenue d’une conférence sur ce thème, à Malabo, en novembre prochain. 

 

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