Attaque Hamas : Qu’en est-il des positions de la Russie et de la Turquie ? Ambiguïté et pragmatisme
Le chef de la diplomatie russe, Serguei Lavrov, s'est entretenu lundi 9 octobre avec le secrétaire général de la Ligue arabe et a rappelé que pour la Russie, la création d'un État palestinien est la solution la plus crédible au règlement du conflit. Mais il insiste sur le fait qu'il faut maintenant s'interroger sur les raisons pour lesquelles le problème de la Palestine n'a pas été résolu depuis des décennies.
Si la Russie a bien conscience que dans sa position actuelle, elle peut difficilement apparaître comme un médiateur possible vers une solution diplomatique, elle profite néanmoins de l'occasion pour souligner une nouvelle fois ses désaccords avec Washington.
L'ancien président russe et actuel vice-président du conseil de sécurité nationale Dmitri Medvedev a accusé les États-Unis d'être les principaux instigateurs de la crise. "Au lieu de travailler activement au règlement du conflit israélo-palestinien, les États-Unis dressent l'une contre l'autre deux nations proches, la Russie et l'Ukraine", a-t-il déclaré hier.
Les relations entre la Russie et Israël sont assez ambiguës. Tel-Aviv a condamné l'invasion de l'Ukraine mais n'a pas pris de sanctions contre la Russie. Israël soutient officiellement l'Ukraine mais refuse de lui envoyer des armements sophistiqués. Vladimir Poutine avait salué le retour de Benyamin Netanyahou au pouvoir, disant vouloir accroître la coopération entre les deux pays, mais dans le même temps Moscou s'est rapproché de l'Iran ces derniers mois, l'ennemi juré d'Israël. C'est donc une relation complexe qui fluctue au gré des crises et des opportunités.
De son côté, La Turquie, qui entretient de bonnes relations avec le Hamas, ne soutient pas pour autant l’offensive contre Israël menée par la branche armée du mouvement islamiste palestinien. Pour l’instant, elle adopte une position mesurée : elle condamne la mort de civils mais le président Erdogan a appelé "toutes les parties à agir avec retenue" et à "s’abstenir d’actions impulsives qui augmenteraient les tensions".
La diplomatie turque s’active. Le ministre des Affaires étrangères, Hakan Fidan, s’est entretenu au cours du week-end avec ses homologues du Qatar, d’Arabie saoudite, d’Égypte, d’Iran et de l’Autorité palestinienne. Il s’est aussi entretenu à deux reprises avec le secrétaire d’État américain Anthony Blinken. Pour l’instant, Recep Tayyip Erdogan n’a donc pas revêtu ses habits de fervent défenseur de la cause palestinienne, comme il l’a fait par le passé. Le président turc choisit plutôt de se poser en possible médiateur, un peu comme il le fait dans la guerre en Ukraine.
Le changement géopolitique important, c’est que, tout en maintenant des liens étroits avec le Hamas, la Turquie s’est récemment rapprochée d’Israël. Après des années de tensions, les deux pays ont complètement rétabli leurs relations diplomatiques en 2022. Recep Tayyip Erdogan et Benyamin Netanyahu se sont même rencontrés pour la première fois à New York en septembre.
L’un des raisonnements, côté turc, derrière ce rapprochement, c’est justement que la Turquie sera plus à même de faire avancer la cause palestinienne en ayant de bonnes relations avec Israël. Ankara y voit aussi un intérêt stratégique et économique. Recep Tayyip Erdogan a notamment pour ambition d’acheminer le gaz naturel israélien vers l’Europe. Le ministre turc de l’Énergie devait d’ailleurs se rendre en Israël cette semaine pour en discuter. Des projets qui semblent compromis par la reprise du conflit israélo-palestinien.
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