Budget 2026 : la Cour constitutionnelle toujours absente des priorités de l’État

Dans un article publié sur sa page Facebook, le professeur d’économie à l’Université de Nabeul, Ridha Choukandali, a passé au crible le projet de loi de finances pour l’année 2026. Son analyse, chiffrée et critique, met en lumière un fait marquant : aucun crédit n’a été réservé à la création de la Cour constitutionnelle, pourtant institution essentielle au fonctionnement démocratique du pays.
Une institution-clé ignorée du budget
Pour le professeur Choukandali, le message du gouvernement est clair : « Il n’y a aucune intention de créer la Cour constitutionnelle en 2026, puisque le ministère des Finances ne lui a pas réservé un seul millime ».
Alors que les crédits budgétaires globaux atteignent 54 574 millions de dinars contre 53 016 millions en 2025, la Tunisie tourne une nouvelle fois la page d’une réforme institutionnelle en suspens depuis plus d’une décennie.
Le Conseil supérieur de l’éducation fait son entrée
À l’inverse, le gouvernement consacre une enveloppe de 10 millions de dinars à la création du Conseil supérieur de l’éducation et de l’enseignement, une nouvelle structure censée renforcer la gouvernance du système éducatif.
Une initiative saluée par certains, mais que Choukandali perçoit comme une priorisation discutable : « On crée de nouvelles institutions, mais on en oublie une qui figure dans la Constitution depuis 2014 », écrit-il.
Des coupes notables dans deux ministères
Le projet de budget prévoit aussi une réduction des crédits pour deux départements :
Le ministère de l’Économie et de la Planification, en baisse de 62,7 millions de dinars, un ajustement jugé logique si la préparation du plan quinquennal 2026–2030 est achevée.
Le ministère de l’Industrie, des Mines et de l’Énergie, qui subit une coupure spectaculaire de 110,2 millions de dinars.
Une décision « surprenante », selon l’économiste, dans un contexte où le complexe chimique de Gabès traverse une crise profonde, et où le secteur du phosphate, en forte reprise (+30 % au deuxième trimestre 2025), nécessite d’importants investissements dans le transport ferroviaire et la modernisation des équipements.
Tourisme : un secteur performant, mais moins soutenu
Autre point d’interrogation : le ministère du Tourisme voit ses crédits reculer de 7,6 millions de dinars, malgré une croissance sectorielle de 7 % enregistrée au deuxième trimestre.
« Réduire le budget d’un secteur qui tire la reprise économique n’est pas un signal encourageant », estime Choukandali, appelant à une vision plus cohérente de la politique de soutien aux activités productives.
Un effort social affirmé, mais à concrétiser
Le volet social du budget 2026 enregistre les plus fortes augmentations.
Les ministères de l’Éducation (+656 millions de dinars), des Affaires sociales (+612,5 millions), de la Santé (+350 millions) et du Transport (+190,8 millions) concentrent une hausse globale de 1,8 milliard de dinars.
Un choix salué, mais que Choukandali nuance : « L’essentiel est de savoir si ces augmentations se traduiront par une amélioration réelle de la qualité des services publics ».
Sécurité et présidences mieux dotées
Les ministères de la Défense nationale et de l’Intérieur enregistrent à leur tour des hausses respectives de 569 millions et 308,8 millions de dinars, confirmant la priorité donnée à la sécurité.
Les budgets de la Présidence du gouvernement et de la Présidence de la République progressent également, respectivement de 13,5 millions et 15,4 millions de dinars.
Un budget sans souffle institutionnel
Pour conclure, Choukandali estime que ce projet de loi de finances « reflète un recentrage sur la sécurité et le social, mais sans véritable vision institutionnelle ».
L’absence de la Cour constitutionnelle dans le budget 2026 illustre, selon lui, un choix politique lourd de sens, celui de repousser encore l’achèvement de la transition démocratique.
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