Election du président de l’ISIE : peut-on parler d’indépendance ou de neutralité ?
Enfin le troisième président de l’ISIE a été élu mardi soir au 5ème tour de vote auquel a procédé l’Assemblée des représentants du Peuple. Il a fallu le « consensus » entre Ennahdha, Nidaa Tounés et l’UPL pour que Mohamed Tlili Manser obtienne 115 voix soit tout juste 6 voix de plus que la majorité requise.
Pourtant les trois blocs totalisent 136 voix. C’est dire que plusieurs députés n’ont pas respecté la consigne de la direction de leurs partis respectifs.
Cet exercice fort laborieux a montré les limites de l’élection par l’ARP des membres et du président de l’ISIE. Pour les premiers il faut la majorité qualifiée des 2/3 soit 145 députés alors que pour le second, la majorité absolue de 109 députés est requise. C’est la loi organique portant organisation de l’ISIE, n°2011-23 du 20/12/2012 telle qu’amendée et complétée par la loi organique n°2013-44 du 01/11/2013 et la loi organique n°2013-53 du 28 décembre 2013 qui le stipule.
La loi organique n° 2016-30 en date du 05/07/2016 portant sur les dispositions communes aux instances constitutionnelles a maintenu l’élection à la majorité des 2/3 des députés des membres des instances alors qu’il a modifié le mécanisme de choix du président. Celui –ci, ainsi que le vice-président sont désignés par l’assemblée de l’instance réunie sous la présidence du doyen d’âge, assisté du benjamin, par « consensus » et à défaut par un vote à la majorité des deux tiers des membres.
D’ailleurs on se demande pourquoi cette dernière disposition n’a pas été appliquée à l’ISIE, du moment que la loi organique ci-dessus mentionnée est entrée en vigueur.
Pour l’élection des membres des instances, celle des élections et les autres à la majorité des deux tiers, il s’agit d’une disposition très difficile à mettre en application puisque le consensus qu’elle suppose entre les divers partis politiques, par la force des choses divergents, s’il a été acquis difficilement actuellement du fait de l’alliance entre les deux principaux partis, serait impossible à atteindre à l’avenir.
Il serait urgent de modifier cette disposition. Pourquoi ne pas alléger cette méthode en donnant aux trois têtes de l’Etat(le président de la République, le chef du gouvernement et le président de l’Assemblée des représentants la capacité de nommer chacun un tiers des membres des instances.
Le chef du gouvernement doit prendre la décision de nomination en conseil des ministres ce qui suppose l’accord de l’ensemble des partis membres de sa coalition. Le président de l’ARP doit pour ce qui le concerne soumettre ses nominations au bureau de l’assemblée représentatif de la Coupole pour obtenir son aval. Le président de la République symbole de l’unité nationale nomme le tiers en conscience en essayant de respecter les équilibres inhérents à la société comme la représentation de la femme par exemple.
C’est ainsi que cela se passe dans les pays développés. Pourquoi ne pas les imiter.
Si on tient toujours à l’élection des membres de l’instance par l’ARP, il est nécessaire que le vote se fasse à la majorité absolue pour le premier tout. Si cela ne donne pas de vainqueur, un second tour est organisé entre les deux premiers issus du premier tour. En cas de second échec, un troisième tour est organisé le même jour entre les deux premiers et cette fois-ci à la majorité simple, le vainqueur étant celui qui obtient le plus grand nombre de voix, et en cas d’égalité, le poste revient au candidat le plus âgé ou le plus jeune, selon ce que décide le législateur.
Ainsi il n’est plus possible de voir le scénario d’une suite sans fin de tours qui risquent d’être tous sans issue. Le spectacle auquel on vient d’assister est consternant car même si un président de l’ISIE a été enfin élu, sa crédibilité est contestable car il a fallu que des partis politiques donnent leur feu vert pour qu’il soit désigné. Si c’est le cas peut-on réellement parler d’indépendance ou de neutralité. La question mérite d’être posée.
RBR
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