Fairouz ne chante plus !
Le Liban, pays coincé dans une impasse historique institutionnelle, est en voie de dépasser un passé toujours présent et à imposer un avenir qui a du mal à s'installer. La preuve, la voix de Fairouz, pourtant encore de ce monde, s'est éteinte. Elle ne chante plus, et plus jamais ne chantera.
On dirait qu'elle nous a quittés. On dirait qu'il n'y a plus rien à chanter. On dirait qu'on ne verra plus jamais d'aussi belle voix et que son timbre unique et atypique, disparu, est perdu comme est perdu le beau Liban d'antan, pourtant qui chante toujours.
Seulement un nouveau diapason tente de s'imposer pour être la nouvelle voix du Liban de demain. Un son de cloche différent se profile comme l'écho d'un déjà entendu. Une nouvelle partition s'écrit et un nouveau destin se dessine, se profile. Le lyrisme se perd au Proche-Orient pour céder aux cris de détresse.
En Tunisie, les choses quoique différentes ne sont pas mieux. Un pays qui foisonne de jeunes et de gens compétents est comme asphyxié et en manque d'oxygène et d'inspiration. Pour preuve, on n'y compte plus les chanteurs qui ne font que reproduire des produits de leurs aïeuls.
Au Liban comme en Syrie où la vie relève du miracle, chaque chanteur a son propre répertoire et la machine de production tourne toujours à plein régime, contrairement à la nôtre qui, grippée, est à l'arrêt à quelques exceptions près.
En Tunisie, on dirait qu'on ne sait plus produire que de la calamité et du mauvais sous-produit et on n'entend que les dissonances des voix stridentes de politicards des temps modernes post-révolutionnaires où désormais on ne discerne plus les torchons des serviettes.
Depuis des décennies, le monde arabo-musulman se disloque par la faute des "identités meurtrières", expression chère au Franco-libanais Amine Maalouf.
Seuls les peuples en payent le prix. On en a fait des martyrs? Les vrais martyrs d'une existence juste sommaire et du jihad de la survie, dans des pays sans vie. Des pays où le passé est fait de mensonges, le présent est souffrance et l'avenir tant espéré n'est que chimère. Il ne s'agit pas de pays. Juste des leurres où Fairouz ne chantera plus.
Naoufel Ben Aissa
Votre commentaire