IA ou Géo-AI : Où en sommes-nous exactement ?

IA ou Géo-AI : Où en sommes-nous exactement ?

Par Mahjoub Lotfi Belhedi, (Chercheur, spécialiste en réflexion stratégique)

Pourtant omniprésente dans notre quotidien par ses logiciels de géolocalisation et ses différents systèmes intelligents,  les passerelles d’interconnexions possibles entre IA et la Géo-AI - que je désigne par l’expression « Géomatique Augmentée » le long de cet article/communication - échappent non seulement au grand public mais, elles se situent, paradoxalement, au centre d’une rivalité discrète axée sur : A qui revient la barre de direction ? entre une partie de spécialistes en Géomatique et d’experts en Intelligence Artificielle…

En effet, un groupe de la communauté géomatique voit en l’Intelligence Artificielle un simple outil d’optimisation des données à dimension spatiale, alors qu’une grande partie des experts en IA  considére l’information géographique comme étant une data d’apprentissage comme d’autres qui sert à alimenter les systèmes intelligents supervisés ou non supervisés …

Au moins, cette « bousculade de positionnement scientifique» a le mérite de poser la question existentielle suivante : Où en sommes-nous exactement ?

1ère Réponse/Pavlovienne : en toute évidence nous sommes à l’intérieur d’une grande bulle IA parsemée d’exploits et de mythes !

2ème Réponse/Piste : l’humanité s’inscrit, sans se rendre compte vraiment, dans une logique d’Intelligence Géographique à ciel ouvert (Géomatique Augmentée) en phase d’expansion planétaire !

Décryptons ça de tout près par un jeu d’hypothèse !

Hypothèse 1 : Rien n’échappe à l’IA !?

Pour les adeptes (clergés) de cette hypothèse (prééminente en littérature scientifique et auprès du grand public) vraiment rien n’échappe à l’IA de la simple reconnaissance vocale et faciale à la génération des contenus via ChatGPT, tout en créant un univers magique de type techno-mythologique !

Bien qu’elle s’inscrive parfaitement sur la même lignée des pères fondateurs d’IA (Alain Turing & Cie), l’Intelligence Artificielle d’aujourd’hui présente à plusieurs égards un Continum/Rupture des concepts fondamentaux et des modus opérandi de « l’IA primaire » lui permettant ainsi d’envahir d’une manière intrusive et opaque de nombreuses zones censées, autrefois, infranchissables de la science, de la technologie et des sociétés humaines.

A cet égard, l’IA contemporaine repose sur la technologie d’apprentissage automatique permettant de construire des systèmes informatiques intelligents capables d’apprendre tout seul et d’améliorer leur performance au fils du temps à partir des données qu’ils utilisent.     

Sans entrer dans la vive polémique afférente à la classification de l’Intelligence Artificielle en IA étroite, forte, ou en apprentissage supervisé, non supervisé, par renforcement ou profond (Deep learning) que nous allons aborder plus explicitement dans notre prochain article, il convient de préciser que la problématique majeure de l’IA d’aujourd’hui - en sus de l’opacité de ses algorithmes et sources informationnelles - se situe au niveau de la  compréhension parfaite du contexte - un biais de contextualisation par excellence - ce qui rend  l’hypothèse que « rien n’échappe à l’IA ! »  incapable de tenir longtemps …

Comment ?

Alors que la performance de la technologie de reconnaissance vocale se mesure en fonction de son taux de précision (c-à-d le taux d’erreur de mots connu par l’acronyme anglophone WER), certains facteurs peuvent affecter le taux d’erreur de mots, en rapport avec l’accent, le ton, le volume et les bruits de fond qui dépendent étroitement de la composante géographique (physique et humaine) environnante…

En dépit des efforts de contournement entrepris par Google via son programme de recherche « Euphonia », les facteurs d’ordre socio-culturel confrontés par n’importe quels modèles acoustiques varient d’un individu à un autre produisant des accents, tons et volumes extrêmement disparates dont l’IA, à l’état actuel, n’est pas vraiment en mesure  d’identifier avec haute précision les nuances qui en résultent car les systèmes de reconnaissance vocale sont entraînés à partir d’enregistrements vocales qui correspondent à une norme, représentative de la majorité. Idem pour « les bruits de fond » qui sont susceptibles d’impacter néfastement le taux de précision de mots (WER) surtout en environnement bruyant où les systèmes de reconnaissance vocales trouvent du mal à discerner clairement la voix principale de l’arrière-plan sonore…

Pour la reconnaissance faciale, la donne ne change pas beaucoup par rapport à la reconnaissance vocale bien sûr à quelques nuances près !

En tant que technologie IA en vogue d’identification//authentification des personnes  permettant d’analyser les traits de visage d’un individu et de les comparer à des images stockées dans une base données et en dépit de ses avantages indéniables notamment en matière de cyber-sécurité, la fiabilité des dispositifs de reconnaissance faciale n’échappe pas aussi aux risques d’erreurs suite à des éventuelles failles dans la technologie de type algorithmique, des angles de caméra, du niveau d’éclairage ou encore de la qualité de l’image…      

En revanche, le ChatGPT dans sa version 4, tend à établir une passerelle de type   symbiotique entre IA et les outils SIG !

Hypothèse 2 : Rien n’échappe vraiment à la Géo-AI (Géomatique Augmentée) !

Certes, le « ChatGPT » représente une avancée considérable dans les relations homme-machine, mais il est important de garder à l’esprit qu’il génère aussi d’innombrables réponses incorrectes ou inappropriées faute d’une compréhension précise du registre spatio-linguistique de l’utilisateur !

A l’opposé, la super star des Chatbots contemporains « ChatGPT-4 » lancé le 14-Mars-2023  accuse une amélioration significative au niveau de son modèle de traitement naturel de langage (NLP) dans une vision d’assurer une interaction plus cohérente avec son macro-environnement spatio-socio-culturel…

En effet, grâce à son architecture multimodale (texte, voix, image, données), le TchatGPT-4 ou tout autre Chatbot équivalent, sont capables à moyen terme, de transformer les pratiques géomatiques actuelles en assurant l’exécution d’une multitude de fonctions dédiées aux Systèmes d’Information Géographique (SIG), entre autres :

1- Une fonction tutorale en SIG : ChatGPT est en mesure de répondre à vos questions, du niveau basique au plus complexe !

Nb : Ces tendances sont encore valides pour l’année en cours (2024)

2- Une fonction d’ordre méthodologique : ChatGPT peut apporter aux géomaticiens de précieux conseil sur les différentes méthodes ou processus géomatique permettant de répondre à un besoin.

3- Une fonction de développement : ChatGPT est apte à proposer des exemples de code à dimension géo-spatiale dans différents langages (html, Javascript, Python etc.) capable à générer des cartes web !

Pas si mal pour un robot non ?

En somme, les perspectives d’une convergence entre IA et Géomatique s’annoncent  prometteuses ouvrant la voie à l’éclosion d’une « Géomatique Augmentée » dotée d’un éco-système synergique de type hybride faisant imbriquer l’IA dans le cycle de vie de l’information géographique selon l’expression logique :

                                                  (SIG and Télédétection) and IA = Géomatique Augmentée

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