La démocratie tunisienne, on y est, on y est bien !
Par Jamel HENI
La révolution dura ce que durent les révolutions : un jour. Le jour où Ben Ali prit la poudre d’escampette. Elle ne laissa pas de déplaire aux contre-révolutionnaires entiers, partiels, et déguisés, sept ans durant. Les sept ans de vaches maigres, que fut la transition démocratique. Or Youssef finit toujours par triompher de ses frères et du pharaon à la fois. La jeunesse ne s’en était pas laissée conter. Elle se bâtit jusqu’au bout ; contre les gérontocrates, les « paladins », les jacobins, les militaristes, les khobzistes, les salauds, les vendus et la Mafia ! La sacrosainte mafia. L’immortelle mafia. Les hommes d’honneur de la coupole, encore acquis à Ben Ali et à son « faiseur » ! Suivez mon doigt.
Jusqu’au bout, cela veut dire : jusqu’à l’instauration d’un système politique alternatif. Après la fausse route de la constituante -tradition européenne sans la moindre indication historique- le réformisme radical des Tunisiens rectifia la trajectoire. Un modèle parlementaire dont on jugera l’efficacité avec le temps, plusieurs codes, des instances de régulations…..Cela aurait mieux abouti sans la survivance d’une invraisemblable « bourgeoisie associative », soumettant l’espace public à ses lubies aussi fantasques que doctrinaires. Sans les « grèves politiques » et sans les fameux syndicats « boursouflés » du ministère, qui ont inversé les rôles, profané l’exercice social et dévoyé les luttes légitimes.
Néanmoins, le système politique alternatif est bien là. Le provisoire n’a pas duré. L’infrastructure législative est fin prête. La constitution est promulguée, le code des collectivités locales est adopté. De quoi renouveler l’exercice du pouvoir central et local selon les règles d’alternance. Or une tradition se mesure à sa durée, et donc au fameux « deuxième coup ». Nous y sommes au deuxième coup, nous y voilà. Sans compter les constitutionnelles, les Tunisiens ont voté une fois pour élire un président, une seconde fois pour élire un maire. La boucle est bouclée. Le système politique alternatif marche sur ses deux pieds. Le système politique alternatif est stable. Il se suffit à lui-même. Reste maintenant à le protéger par une cour constitutionnelle. La restauration n’est plus possible. La révolution a gagné. Le pire n’est ni certain, ni possible. Le chaos est plutôt oxymore.
La Tunisie est aujourd’hui une démocratie. Politiquement et constitutionnellement, une démocratie. La caricature d’une république monarchique est derrière nous. Le spectre de la restauration est bien loin. Le goulag n’est plus une hantise. Le terrorisme a vécu. Joseph a triomphé de ses frères et du pharaon à la fois. Le faiseur de Ben Ali, ne tardera pas à tomber.
La toquade des indépendants nous passera. Les partis politiques demeurent le socle de l’exercice démocratique. L’éternel dissident ne sera ni le Bucéphale d’Alexandre, ni le Babiéça de Cid ni le Ward de Hamza. Le dissident éternel restera un cheval de Troie.
Les médias ont rendu hommage à la vertu partisane en faisant l’éloge de sa disparition. Les fameux indépendants ont simplement passé un week-end dehors. De minuscules partis se seraient ligués pour de meilleurs résultats, de grands partis auraient essaimé pour effriter les votes. Si peu de véritables indépendants pour sonner le glas des partis. Quelques exceptions qui confirment la règle.
Le système politique tunisien est aujourd’hui en place, la triade est sauve : un gouvernement, un parlement et des partis. Le pouvoir local ne déroge pas à la règle. Les organes de contrôle suivraient.
La page de la dictature est définitivement tournée. Prodige tunisien ! Quel courage. Quelle dignité. Quel peuple. Carthage n’en rêvait pas moins.
Votre commentaire