Médecins du Monde: Droit à la santé des populations migrantes en Tunisie
L’ONG Médecins du Monde Belgique section Tunisie, vient d’organiser, aujourd’hui 28 octobre 2020 à Tunis, une conférence d’information et de restitution des résultats du projet « Amélioration de l’accès aux soins de santé pour la population migrante en Tunisie », en présence de représentants des différents ministères et institutions partenaires, associations impliquées, bailleurs de fonds et experts divers.
Ce projet, multidisciplinaire et multi-acteurs, qui a débuté en 2015 sur le Grand Tunis avant de s’élargir après sur les régions de Sfax et Médenine prend fin en octobre 2020. Mis en œuvre en partenariat avec plusieurs structures et institutions de l’Etat tunisien, il a été soutenu par plusieurs bailleurs de fonds, dont la coopération Suisse, GIZ Tunisie, L’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC), le Fond des Nations Unies pour la Population (UNFPA), Islamic Relief (IR), ONU Femmes et le Fonds des Nations Unies pour les victimes de la traite.
Le projet a comme principaux objectifs d’améliorer l’accès aux services de santé pour les migrants en situation de vulnérabilité, à renforcer les capacités des acteurs institutionnels de la santé et de la société civile et à assurer le respect des droits des migrants à une prise en charge médico-psycho-sociale intégrée.
Plus de 8500 consultations médico psychosociales en une année
Durant la troisième phase de mise en œuvre du projet, avril 2019 à octobre 2020, le nombre total de consultations médico psychosociales assurées au profit des populations migrantes, au Grand Tunis, Sfax et Médenine, a atteint plus de 8500 consultations. Depuis janvier 2020, plus de 72 consultations ont été réalisées auprès des Tunisiens de retour, dont 29% sont des femmes.
L’année 2020 a été très particulière avec le déclenchement de la crise sanitaire due à la pandémie COVID-19 et de grands efforts spécifiques de protection des migrants et d’accès aux soins ont été déployés. Plus de 435 personnes migrantes ont été sensibilisées aux mesures de prévention, outre la distribution de 383 kits d’hygiène, 6 Kits médicaux et la réalisation de 24 maraudes.
Renforcement des compétences du personnel associatif et médical
En partenariat avec l’Association Tunisienne de la Santé de la Reproduction (ATSR), Terre d'Asile Tunisie (TAT), et l’Association pour le Leadership et le Développement en Afrique (ALDA), 4 pools d’animateurs communautaires ont été consolidés en 2019 et 2020 permettant d’avoir un total de 53 éducateurs pairs, dont 64% sont des femmes.
23 cadres du personnel de la santé ont été formés sur plusieurs thématiques, telles que « migration et droit », « psycho-traumatisme et exil », « compétences en soins transculturels », « migration et défis sanitaires » et « référencement médico psycho-social en santé-migration ».
Un guichet spécial à Bhar Lazrag
A Bhar Lazrag, la Marsa, un guichet spécial pour les migrants a ouvert ses portes en juillet 2020 ayant pour objectif d’améliorer l’accès aux soins des populations vulnérables dont les personnes migrantes et les tunisiens de retour. Une première expérience pilote de ville inclusive qui a été chaleureusement félicitée dans cette région et qui a pu soutenir et orienter un grand flux de femmes migrantes subsahariennes, notamment enceintes.
Communication, mobilisation & plaidoyer
L’ONG Médecins du Monde Belgique ainsi que ses partenaires divers ont lancé une série d’études sur la thématique migration et santé. En décembre 2019, une étude de données de base sur l’accès des migrants à la prévention combinée a été lancée et en 2020, une thèse de doctorat intitulée « santé mentale des migrants en Tunisie durant la pandémie Covid-19 » a été réalisée.
Dans le cadre du projet, une autre étude a été menée en juillet 2020 et financée par la GIZ Tunisie sous le thème « analyse du vécu des expériences des tunisiens de retour: facteurs facilitateurs et obstacles à l’intégration socio-économique ».
Récemment, le 10 octobre 2020, une convention tripartite entre Médecins du Monde Belgique, l'Association de développement durable et de coopération internationale ADDCI-Zarzis et la Municipalité de Zarzis a été signée dont l’objectif est d'élaborer une étude exploratoire afin de mieux cerner les besoins des populations migrantes en situation de vulnérabilité en termes de santé et de protection sociale dans la région.
Pour mieux communiquer la problématique de l’accès à la santé en faveur des populations migrantes en Tunisie, les droits, les expériences et les bonnes pratiques, le projet a développé une série de guides pratiques et de supports de sensibilisation et d’orientation médicale, outre un film documentaire sur la traite des personnes vulnérables.
Selon Mme Madame Christelle Léon, coordinatrice générale de Médecins du Monde Belgique - section Tunisie « Notre ONG présente en Tunisie depuis 2012 contribue à l’autonomisation des populations vulnérables, tunisiennes et migrantes, et soutient leur cheminement vers un droit universel effectif d’accès à la santé, et ce à travers des programmes communautaires innovants ». Et d’ajouter « Notre action ainsi que celle de la société civile ne se substituent pas aux programmes des autorités publiques, au contraire nous consolidons les rôles de chaque partie prenante et nous travaillons en partenariat multi-acteurs afin de mieux garantir l’accès des plus vulnérables ou marginalisés au système de santé publique ».
Migration et santé : une responsabilité partagée
La migration est un phénomène complexe et variable au vu de différentes circonstances de son déclenchement. Certains événements semblent être extrêmement récurrents au cours d’un parcours migratoire. Il s’agit notamment des violences, des mauvaises conditions de vie, économiques, sociales et psychologiques, des difficultés d’accès aux soins, tout cela menant à une dégradation de l’état de santé des personnes migrantes et de leur entourage.
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) affirme que « la santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. La possession du meilleur état de santé constitue l’un des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale ».
La population migrante est souvent jeune et en bonne santé au moment du départ en migration. Toutefois, vu la situation particulière de la migration et ses circonstances, plusieurs éléments font augmenter la vulnérabilité sur plusieurs plans, tels que l’exposition à certaines maladies infectieuses ou pathologies chroniques, l’environnement climatique, la rupture avec la communauté et le changement de culture, les violences sur le parcours, l’exclusion sociale, l’incertitude et l’insécurité sur le présent et l’avenir. Tous ces éléments ont des conséquences directes sur la santé physique et mentale des migrants. Les conditions de vie des migrants augmentent certainement leur exposition directe aux risques divers : logements avec conditions d’hygiène pauvres, conditions de transport ou de travail, pauvreté, alimentation insuffisante en quantité et en qualité.
L’accès limité aux soins dans les pays de transit ou d’accueil, peut constituer une barrière principale à la protection de ces populations migrantes, hommes et femmes. C’est ainsi que l’ONG Médecins du Monde Belgique œuvre avec ses partenaires divers, par la sensibilisation, la mobilisation et le plaidoyer, pour permettre l’accès aux soins aux migrants de la même façon que pour les natifs des pays et pour mieux encadrer, soutenir et orienter ces populations vulnérables souvent marginalisées.
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