Où sont ces millions de touristes annoncés par la ministre du tourisme ?
Alors que la destination Tunisie s’annonce prometteuse après trois années difficiles, l’attaque terroriste survenue dimanche 8 juillet 2018, sur les frontières avec l’Algérie a jeté un pavé dans la vitrine touristique alors redevenue attrayante.
Elle a rappelé aux esprits cette année noire, 2015, marquée par des attentats meurtriers causant la mort de près d’une soixantaine de touristes étrangers en plus d’une douzaine de policiers. Ses conséquences ont été immédiates.
Le festival international de Jazz à Tabarka, programmée du 20 au 28 juillet. Il a été reporté à la fin du mois d’août prochain, officiellement en raison de la « non fonctionnalité du nouveau Théâtre de la Mer ». Ce qui a été démenti par les autorités régionales.
Cette attaque terroriste, si elle a éveillé les inquiétudes face la résurgence du phénomène terroriste et les craintes de son impact sur la saison touristique, n’a pas eu d’effet sur les réservations déjà enregistrées ni sur le flux des Algériens, selon le ministère du tourisme qui table sur un total de 8 millions de touristes, soit un million de plus que l’année dernière.
Un grand retour des touristes, notamment des européens, a été annoncé après la levée par Londres des restrictions de voyager en Tunisie pour les ressortissants les britanniques, suite à l’attentat contre un hôtel à Sousse, en juin 2015, qui a coûté la vie à 38 d’entre eux.
Toutefois, sur le terrain le constat semble tout autre. Il contredit les estimations du ministère et les annonces de la ministre Selma Elloumi Rekik.
Aussi bien dans les plages de Hammamet que celles de Sousse, ou encore dans les « Marinas » des deux stations balnéaires, on ne croise que rarement des têtes blondes qui d'habitude profitent des prix écrasés, du sable et du soleil.
En vérité, il semble que le tourisme tunisien n'arrive pas encore à se relever des terribles coups qu'il a pris au cours de l'année 2015 qui a connu deux attentats terroristes sanglants ayant visé principalement des touristes étrangers.
Même les Algériens reconnaissable à leur faciès, comme le nôtre, à leur accent et à l’immatriculation de leurs voitures ne sont pas pour le moement aussi nombreux que l’année dernière. Pourtant la Tunisie a, depuis toujours, été une destination privilégiée des Algériens qui, chaque année, viennent en grand nombre pour passer leurs vacances au bord des plages tunisiennes.
Il faut dire que, de tout temps, les familles algériennes affectionnent cette proximité et ce voisinage géographique et culturel avec les Tunisiens dont elles se sentent plus proches que d'aucun autre pays, surtout que les frontières avec l'autre voisin, le Maroc, sont fermées depuis plus de 20 ans.
La Tunisie est pour les Algériens un pays très compétitif en termes de tarifs où la plupart d'entre eux se rendent par la route et les passages frontaliers de Sakiet Sidi Youssef, Melloula, Babouche et autres connaissent, souvent, une grande affluence.
Mais la rumeur ou plutôt l’intox qui a circulé concernant le refus de certaines unités hôtelières de recevoir les Algériens et relayée sur les réseaux sociaux semble avoir eu son effet et ce, bien qu’elle ait été démentie par les professionnels du secteur.
La carte du tourisme intérieur, longtemps considéré comme la cinquième roue de la charrette, pour sauver, du moins partiellement, un secteur morose, n’a pas pris pour des raisons connues de tous. Les tarifs pratiqués pendant l'été sont prohibitifs et les Tunisiens n'ont pas la culture des agences de voyages pour reserver à l'avance.
Sur un autre plan, les Tunisiens ne se sentent pas aussi bien traités que les touristes étrangers. L'accueil est parfois réfrigérant.
Mais le tourisme tunisien souffre beaucoup plus de maux structurels dont notamment la qualité du produit, «une offre peu diversifiée et parfois de mauvaise qualité ». Avec en plus une qualité de services qui laisse souvent à désirer et un manque de propreté souvent perceptible et décrié par les touristes.
Par ces temps de crise, rogner sur les services pour trouver son compte porterait encore un coup dur à un secteur déjà chancelant. Ce service a souvent fait défaut dans certaines unités hôtelières ou dans les restaurants et cafés touristiques.
Les prévisions ambitieuses de madame la ministre pour la saison de l'été 2018, si elles incitent à l’optimisme, ne doivent pas occulter la réalité des choses.
Notre tourisme ne va pas bien et s'enlise comme le pays dans une crise profonde. Elles ne doivent pas, non plus, masquer une certaine fragilité de l’image du pays, même si l'on peut noter une nette amélioration dans bien des domaines, sécuritaires notamment.
On nous retorquera que le décompte final se fera à la fin de l'année. Dont acte. Mais « la visibilité sur le long terme n'est pas très claire », comme l'a affirmé un professionnel du secteur.
B.O
Votre commentaire