Tunisie: Ce formidable gâchis des centaines d’hôtels abandonnés (photos et vidéo)
Les rumeurs sur l’éventuelle démolition du mythique hôtel du Lac de Tunis sont de plus en plus insistantes et nous poussent à ouvrir un dossier douloureux celui du formidable patrimoine touristique abandonné, avec des édifices jadis splendides, qui ont fait la grandeur du tourisme tunisien et qui sont aujourd'hui totalement délaissés ou en perpétuel chantier.
De très belles unités, véritables joyeux d'architecture situés sur les plus belles plages tunisiennes ou encore implantées dans des oasis merveilleuses, des dizaines d’hôtels sont à l'abandon depuis de longues années.
Les raisons de ces fermetures sont multiples. Certaines le sont pour des raisons financières, d’autres sont dues à des problèmes juridiques entre les propriétaires et les tours opérateurs, entre les propriétaires et les banques, et parfois même entre les propriétaires eux mêmes, à l'instar de certains hôtels appartenant à des sociétés d’exploitation libyenne et dont l’avenir est tributaire à la résolution des conflits en Libye, alors que d’autres sont les victimes de successions qui ont mal été préparées.
Si quelques-unes de ces unités peuvent être sauvées parce que leur restauration est programmée, malgré des travaux interminables, la majorité des établissements fermés sont en déchéance épouvantable et leur avenir est totalement incertain.
Hélas, le spectacle désolant de ces hôtels abandonnés ou en chantier interminable se répète dans toutes les régions du pays.
A Tunis, outre le fameux Hôtel du Lac fermé depuis 2008 et dont on dit qu’il sera remplacé par un hôtel de luxe, une tour de 30 étages et un centre commercial, de nombreux autres établissements connus sont dans la même situation.
Le plus prestigieux est le splendide hôtel Amilcar, qui bénéficie d’un emplacement exceptionnel entre Carthage et Sidi-Bou Saïd. Fermé depuis 2007, pour changement de propriétaire puis pour rénovation, l’hôtel subit des travaux interminables et il semble que sa gestion reviendra à la chaîne Marriott une fois sa restauration terminée.
De nombreux autres hôtels de la banlieue nord vivent cette situation désolante au grand dam des nostalgiques, tels que Kahna (fermé depuis 2001), Le Megara (fermé depuis 2004), Nova Parc (fermé depuis 2009), et Karim (fermé depuis 2010).
Un spectacle désolant dans une région qui représente la vitrine du tourisme d'affaires tunisien et qui compromet la bonne commercialisation des enseignes nationales et internationales qui y sont implantées.
A l’intérieur du pays, de nombreux hôtels jadis splendides sont abandonnés à leur sort.
C’est l’île des rêves (Djerba) qui souffre le plus de ce phénomène puisqu’elle compte au moins une trentaine d’établissements abandonnés ou fermés. Les plus prestigieux parmi eux sont le Tanit fermé depuis 2003, Sidi Slim fermé depuis 2007, Les Alizés fermé depuis 2010, Abir fermé depuis 2010, Le Club Med Djerba La Fidèle fermé depuis 2013, Les Sirènes fermé depuis 2015, Yasmine fermé depuis 2015 et la liste est longue...
Ce même spectacle désolant se répète dans la région de Tozeur-Nafta où ils ne restent parfois que les carcasses des hôtels abandonnées à leur triste sort. Dans cette région, le nombre d'hôtels et de Palaces fermés depuis des années dépasse la vingtaine. A titre d’exemple, Neptus est dans cette triste situation depuis 2004, Basma depuis 2006, Le Sahara Palace depuis 2007, Nafta Palace et l’Oasis depuis 2011, Sarra Palace depuis 2012, Tamerza Palace depuis 2014, Eramla depuis 2015.
Même les zones touristiques huppées de Hammamet, Sousse et Monastir ne sont pas épargnées.
La région de Hammamet-Nabeul compte à elle seule une vingtaine d’hôtels fermés depuis de nombreuses années. Tout comme la région de Sousse où le triste spectacle des bâtisses délaissées est remarquable même sur la corniche de Boujaafar où il y’a un triste alignement d’hôtels en déchéance : (l’Abou Nawas Boujaafar est fermé depuis 2010, Nejma depuis 2013, Samara depuis 2013, Sousse Résidence depuis 2017).
La région de Monastir compte quant à elle une dizaine d’unités fermées dont les plus prestigieuses sont Sidi-Mansour (fermé depuis 1990) et Skanes (fermé depuis 2011).
Ce spectacle frappant des hôtels qui ont connu des années de gloire grâce, entre-autre,à leur emplacement unique, avant de sombrer dans l’anonymat, se répète dans les gouvernorats de Sfax, Mahdia, Kairouan, Gabès, Kebili, Bizerte, Kasserine et surtout Jendouba où les carcasses d'hôtels abandonnés sont remarquables comme ceux La Forêt et Les Chênes à Aïn Draham fermés respectivement depuis 2013 et 2018.
Ce dernier sera espérons-le sauvé, puisque l’approbation de la décision de son réaménagement et de sa restauration pour en faire une unité hôtelière de trois étoiles, d’une capacité totale de 60 lits, a été prise en attendant le démarrage tant attendu des travaux.
Outre les palaces et les hôtels de renommée, des dizaines de petits hôtels familiaux ou de résidence ont fermé ces dernières années.
Ces cessations d'activités sont dû aux crises répétitives qui frappent le secteur depuis une dizaine d'années et qui ont mis à l'épreuve ses finances.
Selon les statistiques officielles du ministère du Tourisme, 146 unités dotées d’une capacité d’hébergement de 53 292 lits, étaient fermées au début de l’année 2020. Cette situation s’est évidemment compliquée avec les conséquences catastrophiques de la crise sanitaire de la COVID-19, puisque quelque 250 autres unités ont fermé leurs portes à la fin du mois d'octobre et leur réouverture est loin d'être garantie.
Face à la gravité de la situation, le ministère du Tourisme et les différents intervenants doivent réagir au plus vite pour sauver ce qui reste du patrimoine hôtelier tunisien.
Pour cela il faut assainir le secteur et cela passera nécessairement par la restructuration financière, la diversification du produit et la révision du cadre réglementaire vers un assouplissement des conditions d'investissement et de l'exercice de l'activité.
Kais Ben Mrad
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