Tunisie: quand la rumeur gouverne et que l’information se tait

À l’ère des réseaux sociaux et de l’instantanéité, les rumeurs se substituent trop souvent à l’information vérifiée. En Tunisie, le silence des canaux officiels et certaines dérives médiatiques alimentent un climat de confusion, où spéculations, fausses nouvelles et sensationnalisme menacent la confiance publique et la cohésion sociale.
Une avalanche d’informations, souvent non vérifiées, circule aujourd’hui sur les réseaux sociaux. Certaines d’entre elles touchent à des sujets d’une extrême sensibilité, allant jusqu’à concerner la sûreté nationale ou les relations de la Tunisie avec des pays avec lesquels les liens sont historiquement profonds et solidement ancrés. Ces informations – ou plutôt ces rumeurs – trouvent parfois un écho auprès d’une partie de l’opinion publique, qui les prend pour argent comptant, faute de repères fiables.
Lorsque les canaux officiels se montrent défaillants, que la communication institutionnelle est absente ou brouillonne, et que les journalistes peinent à accéder à une information claire et vérifiable, le vide informationnel devient un terreau fertile pour les rumeurs. Pour combler ce manque, une autre forme de « communication » s’impose alors : celle des réseaux sociaux, où les fausses nouvelles se propagent à grande vitesse, telles une traînée de poudre, emportant avec elles nuance, vérification et sens des responsabilités.
Plus préoccupant encore, certains médias traditionnels – radios et télévisions confondues – ont, à leur tour, cédé à la tentation du sensationnalisme. En puisant leurs informations dans des sources peu fiables, notamment les réseaux sociaux, ils participent à la diffusion de rumeurs infondées, parfois de nature à troubler l’ordre public. Dans certains cas, ces dérives vont jusqu’à porter atteinte à la vie privée des individus, en s’appuyant sur des analyses fragiles et des allégations insuffisamment étayées.
Ces dérapages sont d’autant plus regrettables et dangereux qu’ils nourrissent un climat de peur, attisent la méfiance et sèment la zizanie et la rancœur au sein de la société. Dans un contexte déjà marqué par les tensions et l’incertitude, la responsabilité des médias – qu’ils soient classiques ou numériques – n’en est que plus grande. Restaurer la confiance passe inévitablement par le respect des règles élémentaires du journalisme : vérification des sources, hiérarchisation de l’information et refus de l’amalgame et du sensationnel.
Brahim Oueslati
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