Tunisie- vaccin contre la grippe A: il faut, avant tout, convaincre les medecins !
Depuis le passage à la phase pandémique qui a été décrété en Tunisie à partir de la deuxième moitié du mois de
novembre dernier, les interrogations autour de la grippe A/H1N1, ses symptômes, son vaccin, l’efficacité de ce dernier et les personnes les plus ciblées par la vaccination, alimente le débat public, mais également le débat au sein du personnel soignant.
Il faut dire qu’à l’instar de ce qui se passe chez les citoyens, les avis au sein du personnel soignant restent mitigés notamment pour ce qui est de la question du vaccin, de son efficacité etc.
C’est pour répondre à toutes ces questions que le conseil de l’ordre des médecins a organisé, récemment, à Tunis, une table ronde regroupant médecins praticiens, spécialistes et généralistes, de différentes générations et issus des différentes structures hospitalières de la capitale.
L’initiative, faut-il indiquer, revient au ministère de la santé publique qui ambitionne à travers cette rencontre d’impliquer davantage le corps médical dans l’effort de prévention et de lutte contre le fléau de la grippe porcine.
Notons à titre indicatif, que le nombre de cas confirmés en Tunisie a atteint les 2078 personnes dont 11 décès avec notamment la mort de deux femmes enceintes, et de deux jeunes adultes souffrant de maladies chroniques.
Ces cas ont été constatés sur la base de tests rapides (2/3) et de PCR pour le reste.
Pour revenir à la table ronde, on retiendra principalement trois principaux axes débattus, à savoir ; le profil de l’épidémie en Tunisie en termes de fréquence et de gravité, l’intérêt des antiviraux et la place de la vaccination en plein pic de l’épidémie.
Il en ressort, d’après le long exposé assuré par M. Noureddine Lakhal, responsable de l’observatoire national d’épidémiologie, que contrairement à la grippe classique, la Grippe A/ H1N1 est plus fréquente chez les sujets jeunes, dans le sens où elle tue les patients âgés ou qui présentent des facteurs de risque comme elle peut tuer des jeunes en bonne santé apparente, mais qui décèdent rapidement. Ceci fait que l’environnement de cette grippe demeure énigmatique et sa compréhension reste difficile.
En Tunisie l’accélération de l’épidémie a donné lieu à plusieurs foyers notamment en milieu scolaire. Et aujourd’hui, personne ne peut prétendre connaître le nombre exacte et réel des cas sur le territoire national.
Néanmoins, il faut savoir que la Tunisie est l’un des rares pays a avoir continué de faire les tests biomoléculaires même après l’entrée en phase d’épidémie et ce, pour mieux protéger les malades à risque.
Rappelons que la stratégie nationale consistait en une méthode barrière avec pour objectif de retarder au maximum l’arrivée de l’épidémie jusqu’à la confection du vaccin.
La controverse autour du vaccin
S’agissant justement du vaccin, explique M. Lakhal, celui-ci reste le meilleur moyen aujourd’hui pour lutter efficacement contre la maladie et en dépit de ce qui se dit un peu partout dans le monde sur les effets indésirables et sur la nocivité du vaccin voire des adjuvants, aucune étude sérieuse n’a formellement démontré la nocivité du vaccin ou de ses adjuvants.
Le vrai hic dans l’histoire c’est le fait que les médecins praticiens qui sont appelés à convaincre les gens de se faire vacciner ne sont pas eux-mêmes convaincus de l’utilité du vaccin.
Ces derniers constitueraient même un frein pour le programme de vaccination.
Or, il faut savoir que cette grippe n’est pas la peste, ni la grippe aviaire qui sont de loin plus virulents, mais une grippe qui présente tout de même la particularité d’être très contagieuse.
Actuellement, l’Etat dispose d’environ 200 mille doses de vaccins ; le « Focetria », issu d’un laboratoire suisse et qui est à base de l’huile de foie de requin et le « Panasin » qui est un vaccin monovalent sans adjuvants. Et comme pour tout les vaccins, il y a des contre-indications pour ses deux vaccins aussi, mais pas de quoi lancer vraiment des psychoses. Ces contre-indications ressemblent fortement à ce qui se passe après l’administration du vaccin contre la grippe saisonnière.
Quoi qu’il en soit, ce qu’il faut surtout savoir au stade actuel de l’épidémie, c’est que les deux premiers objectifs du programme de vaccination sont la protection des personnes les plus exposées et la réduction de la morbidité induite par ce virus.
« Le fait est que pour stopper la maladie, il faudrait faire vacciner 30 à 40% de la population, ce qui n’est pas possible vu le nombre de doses disponibles. Seulement avec cette réticence et ce refus de se faire vacciner qui persistent, on va probablement perdre la bataille », a précisé M. Noureddine Lakhal.
Et d’ajouter qu’à partir de l’année prochaine, la souche H1N1 va être incluse dans la composition du vaccin de la grippe classique ou saisonnière.