Youssef Chahed doit assumer pleinement ses choix
Dès sa désignation comme nouveau chef du gouvernement, Youssef Chahed s’est engagé dans une véritable course contre la montre face aux attentes des uns et des autres pour composer son équipe et la dévoiler avant les délais constitutionnels impartis. Une équipe, comme il l’a promis, jeune et qui, pour la première fois dans l’histoire du pays, comprend huit femmes dont six ministres, trois d’entre elles occupent des secteurs clés, les finances, la santé et la jeunesse, Lamia Zribi, Samira Meraii et Majdouline Cherni.
Youssef Chahed a, également, élargi son équipe pour rallier sept des neuf partis signataires du « Pacte de Carthage ». Il a intégré dans son équipe gouvernementale Al Massar avec son secrétaire général Samir Taïeb, désigné à l’Agriculture, et Al Joumhouri avec le député Iyed Dahmani, en charge des Relations avec le Parlement, mais aussi deux anciens dirigeants de la centrale syndicale, Mohamed Trabelsi et Abid Briki qui se trouvent à la tête de deux ministères clés, les affaires sociales et la fonction publique. L’UGTT a, en effet, pesé de tout son poids dans le choix de certains nouveaux membres du gouvernement et dans l’éviction d’autres dont notamment les ministres de la santé Said Aidi et des finances Slim Chaker.
L’autre nouveauté de ce gouvernement est l’entrée de hautes compétences indépendantes à la tête des ministères de la justice dont le titulaire, le revenant Ghazi Jeribi, haut magistrat, ancien ministre de la défense dans le gouvernement Jomaa, qui aura à charge de réformer la justice et redorer son image. Tout comme Fadhel Abdelkefi qui vient d’être nommé ministre du développement, de l’investissement et de la coopération internationale.
Aussitôt la nouvelle équipe gouvernementale annoncée, plusieurs formations politiques, dont Nidaa Tounes et Ennahdha ont émis des réserves concernant leur faible représentativité et la présence de certaines personnalités. D’autres ont critiqué, parfois, de manière virulente, une équipe inexpérimentée, accusant le chef du gouvernement désigné d’avoir fléchi sous les pressions de toutes parts pour satisfaire les revendications des uns et des autres, allant jusqu’à élargir l’équipe à une quarantaine de membres alors qu’il a promis une équipe resserrée. Certains continuent à faire pression sur Chahed pour qu’il révise sa copie. Yassine Brahim, le président d’Afek Tounes, a même déclaré que le chef du gouvernement désigné l’a assuré d’introduire des modifications dans son gouvernement. Slim Riahi, le président de l’UPL qui s’est trouvé en dehors de la nouvelle équipe continue de croire en la possibilité d’un remaniement de l’équipe pour y faire intégrer certains dirigeants de son parti avant la vote de confiance, prévue pour vendredi 26 août. De son côté, le parti Al-Joumhouri qui se trouve représenté par son seul et unique député Iyed Dahmani, a, dans un communiqué, demandé au chef du gouvernement désigné de « parachever » les consultations, rien de moins. Or, comme nous l’avons démontré dans de précédents articles, Chahed ne peut plus introduire la moindre modification sur son équipe qui est désormais entre les mains de l’Assemblée des représentants du peuple.
Youssef Chahed qui a déclaré avoir constitué son équipe loin de toutes formes d’interventions et de pressions, tient à conduire l’équipe qu’il annoncée samedi dernier à l’Assemblée des représentants du peuple pour solliciter le vote de confiance, sans y apporter la moindre modification. Il sait qu’il sera jugé à l’aune de sa capacité à résister à ce genre de fortes pressions et de marchandages mesquins. Il sait, également, que le moindre fléchissement pourrait l’handicaper et le mettre dans les habits d’un chef hésitant et pusillanime et qu’une fois cette brèche ouverte elle ne risquerait pas de se fermer de sitôt.
Il doit endosser les habits du chef de l’exécutif et glisser dans son nouveau rôle de premier responsable du gouvernement qui assume pleinement ses choix et ses décisions.
Brahim Oueslati
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