Zoritsa Urosevic: "Il est temps de repenser le tourisme, bouée de sauvetage pour des millions de personnes"
L’espoir que l'industrie du tourisme rebondirait après les effets dévastateurs de la pandémie de Covid-19 a été ébranlé par la propagation extrêmement rapide du variant Omicron. Dans un récent entretien exclusif accordé à ONU Info, Zoritsa Urosevic, Directrice exécutive de l'Organisation mondiale du tourisme des Nations Unies (OMT), a appelé à de nouvelles idées pour relancer le secteur.
L’OMT est l'une des 15 agences spécialisées des Nations Unies, qui a pour objectif de promouvoir le tourisme dans le monde, et d'en faire le moteur de la croissance économique et du développement durable.
S'adressant à ONU Info fin 2021, peu après l'assemblée générale de l'agence, Mme Urosevic a commencé par souligner l'impact dévastateur que la pandémie de Covid-19 continue d'avoir sur le tourisme et les perspectives de reprise.
Le tourisme a été le secteur le plus touché par le COVID-19?
Zoritsa Urosevic : Le tourisme a été le secteur le plus durement touché par la crise, ainsi que toutes les personnes et les moyens de subsistance qui en dépendent. Fondamentalement, ces deux années ont été très difficiles, mais nous considérons qu'à l'avenir, nous devrons repenser complètement le secteur, et c'est peut-être une opportunité.
Les pays développés étaient bien mieux préparés à tenir le coup, principalement avec des programmes financiers pour soutenir l'industrie et les petites entreprises, et pour essayer de préserver les emplois des gens. Les pays en développement ont vraiment du mal à le faire.
Nous avons créé le paquet de relance du tourisme, un outil permettant d'évaluer rapidement ce qui doit être fait dans un pays donné, et nous avons créé le tout premier code de protection des touristes, car le renforcement de la confiance est vraiment un élément très important pour les personnes qui décident de voyager.
Nous sommes totalement d'accord avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sur l'importance de s'engager dans des protocoles de voyage plus sûrs plutôt que d'arrêter complètement les voyages, car nous savons combien de moyens de subsistance dépendent du tourisme, non seulement directement, mais aussi ceux des personnes qui travaillent dans les industries qui dépendent sur le secteur, comme la production alimentaire, les services et l’industrie.
A l'heure où les populations se déplacent de plus en plus vers les zones urbaines, le développement rural par le tourisme va certainement être l'une des grandes tendances du secteur. Nous avons lancé une initiative appelée Best Tourism Villages, et nous allons avoir un centre mondial pour le développement rural du tourisme.
Diriez-vous que le coup porté au tourisme est sans précédent ?
Zoritsa Urosevic : Cela a certainement été la plus grande crise qu'ait connue le secteur. Fondamentalement, c'est comme si nous étions revenus 30 ans en arrière en 2020. Au cours des trois dernières décennies, le tourisme n'a cessé de croître d'environ 4% chaque année, nous avons donc maintenant une situation où nous avons beaucoup d'offre, beaucoup d'entreprises, et pas de touristes.
Des pays qui en avaient la taille et le pouvoir d'achat, comme la Chine, ont pu se tourner vers le tourisme intérieur, mais pour les petits pays en développement comme les Fidji, qui ont été les plus durement touchés par la crise, et où le tourisme représente entre 40 et 70% du PIB, ce n'est pas possible.
Nous appelons à l'harmonisation des protocoles de voyage, qui ont été très volatils car, même si les pays parviennent à un accord, un changement dans la situation pandémique signifie que cela ne peut pas être appliqué.
Les pays qui ont le mieux réussi sont ceux qui ont été capables de communiquer très clairement et d'énoncer les protocoles. La Grèce en est un bon exemple : ils ont ouvert en juillet 2020, mais ont communiqué bien à l'avance, et de nombreux touristes qui avaient prévu d'aller ailleurs se sont plutôt rendus en Grèce, car ils étaient bien informés.
Comment informez-vous les touristes des progrès réalisés dans la coordination internationale des protocoles de voyage?
Zoritsa Urosevic : Nous avons vraiment intensifié notre présence sur les réseaux sociaux et avons cent fois plus d’abonnés qu'auparavant. Nous faisons de notre mieux, mais ce n'est jamais assez, nous sommes donc très ouverts aux nouvelles idées et aux nouvelles opportunités.
Que dites-vous aux personnes dont les moyens de subsistance dépendent du tourisme?
Zoritsa Urosevic : Tout d'abord, je dirais que ce secteur est très résistant : nous rêvons tous, et nous voulons tous voyager. Pour l'instant, nous devons améliorer l'éducation et la formation, mais je pense que l'avenir est prometteur. Les touristes reviendront, et ils seront plus respectueux qu'avant : il y aura un nouveau chemin vers le bonheur dans le tourisme et l'échange culturel.
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