60ème anniversaire du ministère des affaires étrangères: Cérémonie « Œcuménique » sous l’égide de Béji Caïd Essebsi
Qui mieux que la politique étrangère peut rassembler tous les Tunisiens ? Depuis que ses principes et fondamentaux ont été définis et mis en œuvre par Habib Bourguiba qui défia la France en signant le décret établissant le ministère des affaires étrangères dont il cumula le pote avec celui de chef de gouvernement, les Tunisiens se sont retrouvés autour d’elle et l’ont soutenu car elle a fait en tout temps leur fierté. Elle a surtout fait connaitre ce pays et assuré son rayonnement dans le monde.
Que la célébration de son 60ème anniversaire soit l’occasion de réunir toutes les générations et toutes les sensibilités et même les adversaires pour ne pas dire les « ennemis » d’hier, cela semble aller de soi.
Le président Béji Caïd Essebsi en diplomate chevronné ne peut pas ignorer quel profit il peut en tirer. Si la politique peut les diviser, la politique étrangère ne peut que les réunir. L’ancien ministre des affaires étrangères de Bourguiba (1981-1986) a eu l’intelligence de réunir au palais de la république, sous son égide et en sa présence tous les ministres des affaires étrangères encore en vie de Bourguiba et de Ben Ali et ceux de l’après 14 janvier 2011, ainsi que l’ensemble des chefs de missions diplomatiques et consulaires depuis l’indépendance de toutes les époques.
Ce furent de franches retrouvailles ponctuées de souvenirs communs. Sans distinction ni d’appartenance politique ou partisane, ni de régime ou de proximité avec tel président ou tel autre. Le « vivre ensemble » à la tunisienne dans sa meilleure illustration.
Alors on a retrouvé dans la même salle côte à côte les ministres de Ben Ali, d’Habib Ben Yahia à Kamel Morjane en passant par Abderrahim Zouari, Saïd Ben Mustapha, Abdelbaki Hermassi, et surtout Abdelwaheb Abdallah. L’ancien ministre, porte-parole de la présidence sous Ben Ali et un de ses proches collaborateurs a fait lundi 16 mai 2016, son retour au Palais de la république depuis ce fameux 14 janvier 2011. Les ministres d’après cette date fatidique étaient aussi présents. Le plus emblématique est bien sûr Rafik Abdessalem, membre du parti Ennahdha et qui était tout content d’être parmi les invités. Taieb Bccouche, le prmier qui a occupé le poste après les élections d'octobre 2014 avant de le céder à Khemaies Jhinaoui, son précdecessuer Mongi Hamidi étaient à leur tour présents.
Parmi les ambassadeurs beaucoup furent des ministres de Ben Ali. Mais personne ne s’en soucie. Ils ont été des représentants de la Tunisie à l’extérieur et ils portent ce titre comme un honneur à vie que personne ne peut leur ôter. Alors pêle-mêle, il y avait dans la salle Hédi Baccouche , premier ministre de Ben Ali et ambassadeur de Bourguiba(Alger et Berne), Fouad Mebazaa, président intérimaire au lendemain du 14 janvier 2011 mais aussi ambassadeur à Rabat et à Genève. Avec eux, il y avait également Habib Ammar, l’un des principaux acteurs du 7 novembre 1987 et ambassadeur à Vienne. Etaient de la fête Chadli Neffati ministre de l’intérieur et secrétaire général de l’ex-RCD, ambassadeur au Caire. Sans oublier d’autres ministres ou secrétaires d’Etat de Ben Ali comme Moncer Rouissi, Salah Baccari, Ali Chaouch, Samir Labidi, Mohamed Ali Ganzoui, Néziha Mezhoud, Abdelhafidh Hergam, Sadok Fayala, Youssef Mokaddem, Fethi Houidi, Lazhar Bououni, Mongi Safra, Habib Haddad, Mabrouk Bahri, Mohamed Saad, Kamel Hadj Sassi. Et j’en oublie. Pour la plupart c’est la première fois qu’ils reviennent à ce palais où ils avaient leurs habitudes.
Sans oublier, les ambassadeurs de carrière comme les ambassadeurs politiques. Ceux-ci et ceux-là étaient bien sûr les plus nombreux. Certains, vieux routiers de la diplomatie étaient parmi les pères fondateurs. D’autres plus jeunes qui ont fait partie de la seconde sinon de la troisième génération des diplomates étaient tout heureux de retrouver leurs aînés qui étaient pour eux des modèles et des exemples.
Béji Caïd Essesbi n’était pas peu fier de rassembler tout ce beau monde. Sûr de son effet, il a dès le départ tenu à en tirer la leçon. « La Tunisie, c’est 3000 ans d’histoire, les régimes passent l’Etat demeure » a-t-il dit en s’adressant à l’assistance. Comme pour justifier que les représentants de l’Etat tunisien que sont les ambassadeurs ou les consuls aient droit à ce titre à vie. Il a fait le parallèle avec la galerie des Beys, ce couloir du palais où Bourguiba a tenu à disposer les portraits des souverains husseinites comme une démonstration de la continuité de l’Etat tunisien, en dépit du changement de régime de la monarchie à la république. « C’est ça la Tunisie que nous voulons Une Tunisie reconnaissante à tous ses enfants qui à un moment ou autre de leur carrière, ont porté haut ses couleurs dans les instances internationales et dans les capitales étrangères. » a encore dit le Chef de l’Etat.
Le clou de la cérémonie était la conférence donnée sur le 60ème anniversaire du ministère des affaires étrangères par l’ancien ministre et ex-ambassadeur M.Ahmed Ounaies. Ce fut une conférence magistrale dans le fond comme dans la forme. Avec les dates clés autant avant le protectorat qu’après l’indépendance en 1956 pour recouvrer la souveraineté sur la politique étrangère. Il a cité avec une apparente émotion les grands diplomates de la Tunisie à qui la reconnaissance de la Nation est due. En hommage à ceux qui ont perdu la vie dans l’exercice de leur mission, il a demandé qu’un Mémorial soit érigé en leur honneur. Il a réclamé aussi la mise à la disposition des différentes associations diplomatiques « une maison de la diplomatie » qui soit un lieu de rencontre et de réflexion. Il a appelé à la fin ses collègues à rédiger leurs mémoires pour enrichir la bibliothèque diplomatique.
La célébration a été l’occasion d’une sympathique réception qui a vu le président de la république passer de groupe en groupe pour serrer des mains et échanger quelques mots avec les présents. La cérémonie a pris fin sur la terrasse du Palais donnant sur la baie de Tunis où ministres, ambassadeurs, consuls et diplomates jeunes et moins jeunes ont égrené des souvenirs du temps qui passe inexorablement. Mais qui ne doit pas laisser des stigmates.
R.B.R.
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