Après l’élection partielle à Souk Jedid : Le pire est à venir ?!
Dimanche, une élection municipale partielle s’est tenue à Souk Jedid, une petite localité du gouvernorat de Sidi Bouzid. En dépit du caractère local de ce scrutin, on ne peut ne pas y voir un sondage grandeur nature de l’état de l’opinion publique nationale dans la perspective des élections générales prévues au cours du dernier trimestre de l’année.
Certes on ne peut faire la translation de ces résultats sur le plan global du pays mais on ne peut s’empêcher de remarquer des tendances lourdes qui risquent de se matérialiser aux prochains scrutins dont les manifestations sont les suivantes :
*une désaffection de l’électorat et un désintérêt pour le vote : un taux autour des 30% des électeurs inscrits qui reproduit celui des élections municipales en mai 2018, on risque de le retrouver à la fin de l’année en dépit du million et quelques centaines de milliers de nouveaux inscrits sur les listes électorales.
*un émiettement à l’extrême de l’électorat par un vote anarchique aux différentes listes rendant la commune dans le cas de l’espèce et le pays en entier à la fin de l’année ingouvernable. Ainsi huit listes ont envoyé des représentants au nouveau conseil municipal avec une faible amplitude entre la première (3 sièges) et la dernière (1 siège).
*un vote-sanction pour les partis politiques de la majorité comme de l’opposition avec comme mot d’ordre tous pourris, tous incompétents, tous incapables. Les partis politiques ont été si conscients de cet état des choses que trois seulement ont présenté des listes dans cette élection. Seuls Ennahdha, le courant démocratique et Tahya Tounes se sont présentés à visage découvert. On ne peut d’ailleurs qu’être surpris que ni le Parti destourien libre qui a le vent en poupe, ni le Front populaire qu’on croyait bien implanté dans cette région, n’ont présenté des listes propres. On ne sait pas s’ils ont soutenu des listes indépendantes en sous-main. Ce qui semble être le cas de Nidaa Tounes qui fait face à une crise de légitimité au lendemain de son congrès électif.
*une floraison des listes indépendantes qui ensemble raflent la mise mais qui sont dans l’incapacité de gouverner ensemble. Certes Ennahdha arrive en tête mais il n’engrange que 15% des suffrages exprimés alors que les voix additionnées des listes indépendants dépassent les 65%. Mais ces listes sont incapables de gouverner ensemble. D’ailleurs, la dissolution des conseils municipaux montre d’une façon éclatante cette réalité, puisque ce sont les indépendants qui ont remporté les élections municipales en mai 2018. Du reste l’hécatombe des dissolutions n’est pas prête de s’arrêter.
Par le fait du consensus mou entre deux partis censés être des adversaires mais qui ont gouverné ensemble et mal, qui est le contraire de la démocratie qui suppose l’existence d’une majorité qui gouverne et d’une minorité qui s’oppose, opposition, en raison du rejet de la classe politique dans son ensemble et du fait de l’échec patent des gouvernements d’après-14 janvier 2011, on risque de voir les résultats obtenus à Souk Jedid se reproduire sinon s’amplifier.
En effet, avec un émiettement à l’extrême de l’électorat et un vote-sanction à l’échelle nationale, on risque de se retrouver avec une assemblée ingouvernable incapable d’accorder son investiture à un gouvernement issu de ses rangs ainsi qu’un président de la République issu de l’anti-système donc totalement incompétent à assumer ses deux fonctions régaliennes, les affaires extérieures et la défense nationale.
Cette inévitable déconfiture aura des effets seront désastreux pour la démocratie naissante. Le besoin d’un homme fort et d’un parti puissant se fera sentir. La restauration de l’ancien système légèrement remodelé sera au bout du chemin.
Cette image se dessine de façon quasi-certaine. Nous nous dirigeons vers une crise institutionnelle majeure surtout sous l’empire de l’actuel mode de scrutin qui ne sera pas touché ainsi que de la Constitution qui a montré ses limites. Pour un pays en quasi-faillite économique et financière avec une croissance atone (puisque le PIB en 2019 est moindre que celui de 2010 en dollars), on va directement vers le mur.
Un tableau noir dites-vous. J’espère me tromper mais tout laisse présager le pire ?
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