De quelle reprise parle la ministre de l’Energie ?

De quelle reprise parle la ministre de l’Energie ?
Dans une interview accordée à nos collègues de l’ECONOMISTE maghrébin, la ministre des Mines, de l’Energie et des Energies renouvelables, Hela Cheïkrouhou, s’est félicitée « des signes de reprise » qu’elle a constatés dans le secteur » ajoutant dans ce sens que les indicateurs des mines et de l’énergie sont en train de s’améliorer et que : « nous sommes en train de travailler pour qu’ils s’améliorent davantage et de manière significative. Les investissements dans ces secteurs seront très importants. »
 
Néanmoins, cet optimisme de la ministre semble démesuré puisque tous les signaux dans le secteur sont au rouge. Il suffit dans ce sens de rappeler qu’entre 2010 et 2016 la régression de notre production nationale d’hydrocarbures a été de l’ordre de 50%. De nombreux sites pétroliers ont cessé de travailler et de nombreuses compagnies étrangères ont définitivement quitté le pays (dont la dernière en date a été Anadarko) à cause des problèmes divers ou à cause du non renouvellement des permis de prospection.
 
Pire encore, très rares ont été les nouveaux permis octroyés et un tel  constat ne peut  qu’affecter encore plus la  production nationale d’hydrocarbures, ainsi que notre image de destination pour les investisseurs étrangers, si des décisions courageuses et urgentes ne sont pas prises.
 
La ministre a d’autre part estimé « que nous disposons de bien meilleures conditions pour développer à grande vitesse, la réalisation de projets d’énergies renouvelables » ajoutant que « de gros investisseurs comme Total ou l’ENI sont intéressés par le domaine de l’énergie verte en Tunisie ».
 
Or la réalité est beaucoup plus compliquée, puisque nous sommes très en retard dans ce domaine même au niveau des législations et il suffit dans ce sens de rappeler que lors du séminaire des énergies renouvelables récemment organisé dans notre pays, les représentants de la Banque mondiale et de la Banque européenne ont carrément estimé que les décrets d’application sur les énergies renouvelables en Tunisie ne sont même pas « banquables ».
 
Ce qui veut dire que ces décrets n’encouragent pas les compagnies étrangères à venir investir en Tunisie dans de pareilles conditions. Quant à l’intérêt annoncé par de gros investisseurs par le domaine de l’énergie verte en Tunisie, seul  l’ENI l’a exprimé afin de produire de l’électricité pour le fonctionnement de son champ El Borma (un besoin local), dans un souci de défiscalisation semble-t-il.
 
La ministre est aussi revenue sur les complications de la réalisation du très important projet de gaz Nawara où l’ETAP détient 50%, déclarant dans ce sens : « Ce projet a été initié depuis 2008, mais il ne sera finalisé qu’en 2018, à cause justement des protestations des groupes de personnes qui se sont relayés pour exiger des droits sur le passage du gazoduc et de se faire indemniser ».
 
Cela est en partie vrai car les sit-in et les revendications ont réellement retardé la réalisation de ce projet très important pour le pays qui a démarré en 2013 à l’époque où Mehdi Jomâa était ministre de l’Industrie.
 
Cependant, il fallait aussi préciser qu’il y a d’autres causes qui ont handicapé la réalisation de ce projet de gaz Nawara et qui continuent à le faire dont essentiellement le mauvais choix de la compagnie allemande qui a été chargé de sa construction, alors qu’elle n’était presque pas habilitée pour la faire.
 
En tout cas, face à l’importance des pertes dues au retard de la finalisation du projet, (chaque année de retard cause un manque à gagner de 300 millions d’Euro à la Tunisie), il faut impérativement que tous les obstacles soient levés au plus vite pour accélérer sa réalisation. Tout comme les autres obstacles qui se dressent devant de nombreuses compagnies, qui pénalisent leur production et creusent  davantage le déficit de la balance énergétique du pays…
 
BM

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