Droits et devoirs dans un système de gestion de l’eau efficace et équitable
Dans le cadre du projet intitulé ‘’L’utilisation durable de l’eau dans le bassin méditerranéen’’, des représentants d’institutions partenaires –Centre de recherche, organismes publics, ministères et société civile- ont été réunis par le CERTE -Centre de Recherches et Technologies des Eaux- pour discuter de l’aspect législatif de la mise en place d’une nouvelle gouvernance participative de l’eau, en concertation avec les acteurs gestionnaires et utilisateurs de l’eau.
Cette troisième concertation entre les différents partenaires a porté sur les textes de régulation de la décentralisation et de l’accès au service de l’eau ainsi que sur l’amélioration de la gestion publique de l’eau en tant que patrimoine national.
Une application limitée pour un cadre législatif développé
La Tunisie est l’un des pays du bassin méditerranéen à posséder un arsenal d’outils législatifs ou règlementaires des plus fourni pour la gestion et l‘utilisation de l’eau. Et pourtant leur mise en pratique demeure limitée. Et bien que la nouvelle constitution garantit le droit à l’eau et l’autonomie administrative et financière des collectivités locales, ce qui suppose une recomposition des relations entre citoyens, acteurs, ressources et territoires, le système de gouvernance actuel reste encore le fait des institutions publiques et le rôle de l’entité locale se limite souvent à exprimer un besoin en la matière. Désormais, tout l’enjeu sera d’assurer une transition d’un système de gestion fortement centralisée vers une gestion locale décentralisée et efficace.
Un patrimoine national sous haute protection
Les partenaires sont unanimes : cet objectif ne pourra être atteint que par l’intégration de la société civile aux conseils régionaux, en lui assurant le droit à l’information et à la participation à la prise de décision. La société civile pourra prendre part à tout le processus, de l’étude stratégique jusqu’à la mise en place locale des projets. La première étape serait de définir un ensemble de principes et priorités stratégiques nationales, puis, sur la base de données locale, les potentialités et les besoins de chaque région. La nécessité de considérer d’autres composantes étroitement liées à l’eau telle que l’énergie et/ou la sécurité alimentaire devra être également prise en considération.
Dans un souci d’équité, d’efficacité et de transparence, trois besoins distincts mais complémentaires ont été identifiés : le besoin humain de base, le besoin économique et le besoin à la fois écologique et environnemental pour une gestion durable. ‘’D’après les participants, l’eau, source rare, requiert un grand degré de professionnalisme, de responsabilité et de citoyenneté. Elle ne peut en aucun cas être gérée par des amateurs’’ a soutenu Mme Latifa Bousselmi coordinatrice du programme au sein du CERTE.
Mais si la garantie constitutionnelle du droit à l’accès à l’eau en fait un patrimoine national, la prudence reste de mise. Reconnue bien commun, il importe que l’eau ne prenne pas une dimension marchande. Il faut donc en assurer la pérennité et favoriser le maintien de sa qualité pour le bénéfice de la collectivité.
L’usager doit être également redevable quant à l’utilisation et la détérioration de l’eau selon une approche « utilisateur-payeur et pollueur-payeur ». C’est un principe économique qui stipule que l’usager doit financer les coûts sociaux de son activité. Ce principe vise, notamment, à responsabiliser les utilisateurs de l’eau aux valeurs de cette ressource et aux coûts inhérents à sa protection, à sa restauration ou à sa mise en valeur
Le ‘livre blanc’’, un outil de base pour une gestion durable d’un patrimoine national
En se basant sur l’expérience et l’expertise développées et le contenu de la nouvelle constitution, il est important d’unifier les définitions, les principes globaux et les priorités nationales et régionales ainsi que les droits et obligations de chaque acteur, afin de les traduire en mécanismes de gouvernance et ensuite en réglementation.
Les trois tables de l’eau tenues dans le cadre du projet ont traité de la gouvernance de l’eau au niveau local et ont abordé les droits et les devoirs du citoyen ainsi que les aspects institutionnels et législatifs. Les principales conclusions des participants seront rassemblées dans un ‘livre blanc’’.
L’accent sera mis sur :
- la nécessité d’œuvrer à la mise en place d’un système d’information fiable, robuste, transparent et accessible à tout citoyen désirant s’informer sur l’eau.
- La mise en place d’une instance de régulation indépendante, responsable et redevable, à pouvoir décisionnel.
- La révision du cadre juridique et le développement des outils légaux et nécessaires à la mise en place d’une politique de bonne gouvernance en accord avec la nouvelle constitution.
- La mise en place de mesures d’accompagnement indispensables au niveau local.
Il s’agira par la suite de traduire ce document blanc en plan d’actions concrètes par les acteurs.
Dans ce sens, positionné comme un centre public d’excellence et de recherche-développement, le CERTE de par ses missions, apporte son expertise et mobilise les différents acteurs dans le domaine de l’eau, pour contribuer et pousser à la concrétisation des propositions de chacun des acteurs participants.