Expulsion des Burkinabè à Tunis-Carthage: "Ils ont prétendu que nous étions... clandestins"

Expulsion des Burkinabè à Tunis-Carthage: "Ils ont prétendu que nous étions... clandestins"
 
 
En avril dernier, était annoncée la suppression de visa d’entrée en Tunisie pour les ressortissants de sept pays : Burkina Faso, Congo démocratique, Congo Brazzaville, Zimbabwe, Botswana, Centrafrique, et Jordanie, et ce, à partir de début mai. Cette décision a été prise pour promouvoir notre tourisme, délaissé par les Occidentaux.
 
Pourtant tout récemment, des Burkinabès, dont des commerçants venus faire des affaires chez nous, ont été refoulés à l’aéroport Tunis-Carthage, sous prétexte qu’ils n’avaient pas de… visas pour entrer sur le territoire tunisien.
 
Etonnés, ces visiteurs ont expliqué qu’il n’y avait plus de visa pour les Burkinabè entrant en Tunisie et que cette décision a été prise par le ministère tunisien des Affaires étrangères. Réponse de la police des frontières : «Nous ne sommes pas au courant !».
 
Pourtant des voyageurs ont bien vérifié avant de prendre leur vol que la suppression de visa pour les Burkinbè voyageant pour la Tunisie avait été décidée pour le 1er mai. Ils ont demandé à faire leur visa sur place puisque certains avaient leur réservation d’hôtel en main.Rien n'y fit !
 
Les policiers leur ont dit que le visa ne leur était pas accordé et qu’ils devaient repartir pour Ouaga, avec un ton «méprisant» selon les témoignages recueillis et sans explications au refus. Ils ont été mis dans des salles avant leur «expulsion», les laissant parqués ainsi comme des animaux, sans eau et sans pouvoir passer des appels.
 
Le visa de la discorde
 
Georges Kaboré, fondateur et directeur de l’Institut Burkina, pour la promouvoir la culture et l'éducation, nous a apporté son témoignage : «Les passeports nous ont été confisqués. J'ai demandé à avoir mon passeport parce que je devais poursuivre mon voyage vers d'autres pays. Ils ont refusé prétendant que j’étais candidat à… l’immigration illégale ! J'ai tous mes visas à jour et j'ai un visa de 5 ans pour les USA. Et j'ai déjà mes billets ! Nous avons été traités comme des terroristes. Nous avons été expulsés comme des moins que rien, comme des crève-la-faim ! Je ne laisserais pas passer cette affaire. Je vais organiser mardi [2 juin] une conférence de presse et je vais porter l’affaire à notre ministère des Affaires étrangères».
 
C'est ainsi que M. Kaboré a adressé une lettre ouverte aux Ministres des Affaires étrangères du Burkina Faso et de la République tunisienne."Messieurs les Ministres, 
 
Alors que la suppression du visa d’entrée en Tunisie pour les ressortissants burkinabè a été annoncée en grande pompe par les deux Gouvernements pour le 1er mai 2015 ; j’ai été victime comme beaucoup de mes compatriotes d’une expulsion en règle le 28 mai 2015 de l’aéroport de Tunis Carthage car on me reprochait de ne pas avoir de visa s’entrée. Sans compter le préjudice d’un séjour que j’avais organisé – billets d’avions achetés, réservations d’hôtels etc… - et qui a été perdu, je souhaite dénoncer la confusion et le manque de communication entretenus entre nos deux gouvernements, les compagnies aériennes et la police aux frontières.", écrit-il. 
 
Côté tunisien, nous avons décidé d'en savoir davantage en nous adressant au secrétaire d'Etat aux Affaires arabes et Africaines au ministère des AE, Touhami Abdouli. Le secrétaire d'Etat nous a fait comprendre qu’il ne pouvait avoir de suppression de visa sans accord bilatéral. 
 
«Nous avons fait la proposition de la suppression des visas entre la Tunisie et le Burkina Faso au ministère burkinabè des Affaires étrangères par le biais de leur représentation diplomatique, et ce, début mai. Et nous attendons toujours sa proposition de convention. Il faut qu’il y ait une réciprocité dans la suppression des visas. Dès que les autorités burkinabè seront d’accord pour cet accord bilatéral, nous le signerons ensemble et la suppression du visa sera effective, mais pas avant».
 
Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, de son côté, a souligné le fait que la Tunisie et le Burkina Faso «œuvreront à un accord réciproque pour supprimer le visa entre les deux pays», ajoutant qu’«il y a eu un contact entre un haut responsable tunisien et un haut responsable burkinabè» pour l’aboutissement de cet accord bilatéral. 
 
"En attendant cet accord, tout Burkinabè désireux de venir chez nous doit demander un visa. Il est à préciser que toute attribution de visa dépend de l’accord du ministère de l’Intérieur. Il faut savoir que notre pays n’a pas de représentation diplomatique au pays des «Hommes intègres» ; le Burkina Faso étant attaché à notre ambassade à Bamako, au Mali", ajoute-t-il. Reste à connaître la position du ministère des Affaires étrangères du Burkina, suite à cette affaire gravissime qui a causé l'expulsion de paisibles citoyens burkinabè. 
C.A.