La communication du chef du gouvernement : Un art consommé de la communication

 La communication du chef du gouvernement : Un art consommé de la communication

 

Communiquer est un art c’est aussi un savoir. Beaucoup de communication tue la communication. Communiquer c’est surtout avoir quelque chose à communiquer. Sinon il vaut mieux se tenir à carreau. Puis évidemment communiquer, c’est être au diapason du public-cible et lui tenir le langage qu’il comprend. La bonne communication a horreur des approximations, de la langue de bois et de la phraséologie,  en un mot de tout ce qui peut être de l’ordre du bavardage.

Jusqu’ici,  le  chef du gouvernement Youssef Chahed a montré un art consommé de la communication, ce qui est un atout. Le verbe facile, la locution porteuse, des mots simples, Youssef Chahed a tout pour convaincre. Il faut dire que les  difficultés éprouvées par son prédécesseur sur ce plan lui ont donné des ailes avec lesquelles il a pu voler avec assurance et confiance en soi.

Que ce soit au moment où il a été chargé de former le gouvernement, dans son discours d’investiture à l’Assemblée des représentants du Peuple ou enfin lors sa première interview radiotélévisée, il a été bon en communication verbale et non verbale. Sans fioritures, utilisant une langue dialectale améliorée, usant parfois des termes en français comme les jeunes de sa génération, avec des phrases courtes, il a su tirer son épingle du jeu. Mais derrière on sentait une studieuse préparation, le choix des mots qui portent et des arguments qui convainquent.

Pour un début c’est tout à fait prometteur. Mais c’est sur la longue durée et dans les épreuves que l’on sent la sincérité, ce qui est l’assurance du succès qui reste toujours hypothétique. La règle primordiale sur ce plan c’est de ne pas sentir que la communication est surfaite, c'est-à-dire qu’elle est un subterfuge ou pire une échappatoire pour se sortir d’affaire. Le public doit sentir que celui qui s’adresse à lui est sincère et qu’il ne recourt pas à une technique destinée à faire dorer la pilule.

Il y a en matière de communication un élément émotionnel qui ne doit pas échapper à celui qui y recourt, c’est de faire sentir à ceux à qui on s’adresse qu’on les aime, qu’on les estime ou tout du moins qu’on les respecte. Il ne faut surtout qu’ils se sentent manipulés,  floués ou dupés. Il n’y pas plus contre-productif  que d’avoir le sentiment d’être trompé sur la marchandise. Le public versatile à souhait ne le pardonne pas.

L’une des règles d’or c’est que trop de communication tue la communication. Il faut maintenir le mystère et  choisir minutieusement le moment,  le prétexte et le moyen de communiquer. A la différence de l’artiste, obligé de faire de la promotion pour son œuvre et qui se trouve obligé d’aller de radio en télévision, et de journal en magazine pour faire du matraquage, l’homme politique travaille sur le moyen et le long terme et doit donc espacer ses sorties médiatiques et faire en sorte qu’elles soient opportunes et porteuses de message. Certains leaders politiques ont choisi la formule de la discussion au coin du feu à intervalles réguliers, mais ils ont dû y renoncer car les interviews périodiques mais sans contenu peuvent se révéler contre-productives. Il faut, par contre, diversifier les genres. Car parfois une déclaration de deux minutes à la télévision peut être plus utile et beaucoup plus porteuse qu’une longue intervention de plusieurs dizaines de minutes.

Utiliser les médias c’est bien mais cela n’est pas suffisant. Aller directement vers les gens, partager leurs heurs et leurs malheurs,  leur parler les  yeux dans les yeux, c’est bien évidemment encore mieux. Mais en les respectant c'est-à-dire sans grande pompes ni déploiement sécuritaire tape-à-l’œil. Le contact direct reste la manière la plus appropriée pour gagner la confiance et mettre en place une relation intime avec le public. Les grandes visites dans les régions avec un programme préparé longtemps à l’avance n’est plus de mise. Il faut leur  préférer les visites courtes, bien ciblées et plutôt impromptues. L’usage médiatique qu’on en fait doit être bien réfléchi. Le pire ennemi de ce genre de couverture c’est de tout concentrer sur le responsable politique. Il faut aussi et surtout montrer les gens, les situations, la réalité et les difficultés.

Reste les moyens up-to-date en communication, les médias alternatifs et les réseaux sociaux. Il importe que le chef de gouvernement dispose de sa page Facebook et de son compte Twitter mais il faut en faire bon usage. Ils offrent le moyen de réagir vite et avec une totale liberté aux événements et aux développements qui surviennent avec célérité et efficacité. Mais là aussi, il ne faut faire ni trop ni trop peu. La présidence du gouvernement doit elle aussi disposer de sa page institutionnelle. Essayez de chercher la page et vous vous retrouvez nez-à-nez avec les activités de Hamadi Jebali datant de plus de 3ans. Il faut vite actualiser la page, car si le chef du gouvernement porte un nom, il est d’abord une institution essentielle de la Seconde République.

Bien que les temps aient changé et que des médias nouveaux et plus performants se soient introduits dans le monde politique, la communication du président Bourguiba reste un exemple en la matière dont il faut s’inspirer. Le contact direct, c’est lui. Le langage simple et porteur c’est encore lui. Aimer ses concitoyens et s’adresser à eux comme des semblables, c’est toujours lui. Evidemment il faut adapter cela aux réalités du monde moderne, mais aussi à la démocratie et aux libertés acquises.

Une mise en garde enfin. Il faut tenir le discours de la vérité, honorer les engagements pris et concrétiser les promesses annoncées. Il n’y a pas  pire  ennemi pour un homme politique que la communication mensongère. C’est rien moins que de l’escroquerie.

RBR

 

 

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