La décentralisation, un sujet toujours d’actualité

L’association tunisienne des anciens de l’ENA de France (ATAENA) vient d’organiser, une journée d’étude sur un thème récurrent dans les débats d’actualité qui rythment la finalisation de  la rédaction de la nouvelle Constitution tunisienne après le changement politique. Le thème de cette journée était «décentralisation et gouvernance locale: enjeux et perspectives pour un développement équitable».

Cette association a été créée le mois de février 2012 pour promouvoir la coopération avec les institutions françaises et européennes pour la modernisation de l’administration publique et la gouvernance et pour consacrer les valeurs républicaines, la démocratie, les droits de l’Homme et la transparence.

Le Président de l’association, Nizar Ben Seghaier a lancé la journée en rappelant l’importance de comprendre la logique de la décentralisation avant de trancher pour ou contre la décentralisation, tout en insistant sur la symbolique d’aborder ce sujet dans la première manifestation de l’association, comme pierre angulaire pour l’instauration d’une démocratie locale propice à un développement régional équitable.

Cette journée a traité 4 thématiques en rapport avec la décentralisation et la gouvernance locale: les aspects constitutionnels et institutionnels, le financement de la décentralisation, la coopération décentralisée internationale et la participation de la société civile à la gouvernance locale.

Michel Charasse membre du Conseil Constitutionnel français et ancien homme de la décentralisation de François Mitterrand aux débuts des années 80, a commencé par rappeler la genèse de la décentralisation en France et les étapes de son évolution, tout en signalant que ce choix de la décentralisation doit être un choix rationnel basé sur une connaissance exacte de la réalité politique, économique et sociale d’un pays. De son côté, le professeur Mustapha Beletaief a valorisé le modèle de la décentralisation consacré par le projet de la Constitution qui, d’après lui, est un système avant-gardiste comparé au système de la Constitution de 1959 et peut être un garant du développement politique et économique.

Charasse a tenu à signaler quelques imperfections dans la rédaction des articles relatifs aux collectivités locales, dont il a appelé à améliorer leur contenu compte tenu de son expérience de terrain en la matière et au vu de l’expérience française.

Pour le financement des collectivités locales, Monsieur Sofiane Essid directeur général de la Caisse des prêts et des collectivités locales a exposé les activités et les résultats de son organisme tout en insistant sur l’accroissement du soutien de la Caisse aux collectivités. Amine Belhaj Amor, contrôleur des dépenses publiques de la Ville de Tunis a dégagé les imperfections dans le système de financement des collectivités locales dont, d’après lui, la procédure de vote du budget local qui ne reflète pas la volonté des élus municipaux vu la lenteur des procédures et l’intervention de la tutelle dans la fixation du budget « voté ».

La Coopération décentralisée internationale a fait l’objet d’une communication présentée par le directeur au ministère de l’Intérieur Saber Houcheti qui a mis en relief l’importance des fonds alloués pour développer cette coopération avec des collectivités publiques françaises.

Omar Weslati, Président de l’association tunisienne pour le développement et de la formation a traité pour sa part des insuffisances de la participation de la société civile à la gestion des affaires publiques locales, des insuffisances inhérentes aux allégeances politiques et idéologiques de certaines associations, le manque d’encadrement des cadres dans les associations et la concentration de ces associations dans la capitale et son éloignement des préoccupations quotidiennes des régions intérieures du pays.

Dans le débat final, Habib Malouce, ancien de l’ENA de France (Promotion 1956) a insisté sur l’importance de rédiger un projet de texte sur la base des idées véhiculées par les intervenants pendant cette journée pour améliorer la gestion des affaires publiques locales, surtout à travers l’accroissement et la rationalisation des compétences transférées aux collectivités locales.

La journée a été clôturée par le Président de l’association Nizar Ben Seghaier qui a indiqué que la décentralisation restera toujours un sujet d’actualité tant que les pouvoirs publics et la Constituante n’ont pas pris position pour concrétiser dans la pratique l’essence et l’esprit de la décentralisation, vecteur de développement régional équitable