La Tunisie, partenaire privilégié de l'Union européenne depuis la Révolution
Photo capture d'écran (UE)
S'il est un événement qui aura secoué la Tunisie tout entière aussi bien sur les plans économique et financier que social, c'est bien ce qu'il est convenu d'appeler la révolution du Jasmin. Jadis parangon de la réussite économique et chouchou des investisseurs étrangers, le pays est subitement tombé au ras des pâquerettes. Même s’il se relève doucement mais sûrement.
Après les moments d'euphorie qui accompagnèrent la chute inespérée de la dictature, le pays est confronté très vite à l’amère réalité. L'inflation, l'instabilité, le chômage, la crise économique (et son corollaire la baisse du niveau de vie) ont supplanté une économie naguère prospère dont les indicateurs étaient enviés de partout.
Mais grâce aux relations euro-tunisiennes séculaires doublées d'accords et échanges en tous genres, le pays a réussi, mais très difficilement à garder la tête hors de l'eau boueuse. Mais, il faut l'avouer, les sacrifices consentis étaient à mille lieues d'être une partie de plaisir.
Un des premiers bénéficiaires de l'assistance européenne
Premier pays méditerranéen à signer avec l'UE un accord d'association, et à intégrer la zone de libre-échange, la Tunisie reste l'un des premiers bénéficiaires de l'aide et de l'assistance européenne. Une assistance renforcée au lendemain du 14-Janvier, conférant à l'ancienne Ifriqiya le statut de "partenaire privilégié" dès 2012.
Ce partenariat aboutira à l'adoption d'un Plan d'action pour les années 2013-2017. Ce plan d'action, censé sauver la Tunisie de la tempête post-révolutionnaire, est défini selon les termes du Conseil de l'UE comme une « feuille de route ambitieuse qui traduit la volonté de la Tunisie de développer les réformes dans tous les domaines».
En ratifiant cette coopération, les 28 Etats-membres entendaient encourager la mise en œuvre de réformes structurelles en Tunisie.
Six ans après la révolution, il n'est pas l'ombre d'un doute que des avancées remarquables ont été notées, notamment sur le plan de la consolidation de la démocratie et de la promotion de la bonne gouvernance, la modernisation de l'économie, la réforme du système judiciaire, la lutte contre la corruption, le renforcement de la sécurité, l'intégration économique et sociale, la promotion des droits de l’Homme..En témoignent les dispositifs techniques, logistiques et financiers engagés dans l'étape décisive de la transition démocratique.
Ainsi, à titre d’exemple, au cours des élections en 2014, l'UE débloqua une aide financière de 45 millions d'euros dans le cadre du Programme d'Appui à la Relance qui permit à l'ISIE (Instance supérieure indépendante pour les élections) de s'acquitter de sa lourde tâche de mener à bien ces élections. Il en fut de même pour le soutien financier accordé à la société civile dans ses activités d'observation, à travers trois ONG locales: ATIDE (Association tunisienne pour l'intégrité et l'éveil démocratique), Lam Echaml et la LTDH (Ligue tunisienne des droits de l'homme).
Le soutien constant de l'Union européenne au lendemain de la révolution s'est traduit également par l'implication de la Tunisie au programme de recherche Horizon 2020 et au Programme Erasmus+, ainsi que l'adoption d'un partenariat pour la jeunesse et la mobilité.
Dans un rapport sur l'état des relations UE-Tunisie pour la période 2015-2016 publié récemment par la Commission européenne, il est fait état de la progression des réformes clés conformément aux priorités stratégiques convenues entre les deux parties, notamment en ce qui concerne la consolidation de la démocratie, la promotion de la bonne gouvernance, la relance socio-économique et la mise en œuvre de réformes structurelles.
Ainsi, la Haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a même annoncé, le 1er novembre 2016, que l’UE allait accorder à la Tunisie une aide financière de 300 millions d’euros par an entre 2017 et 2020.
Accéder à un nouveau palier d'intégration
Dans le cadre de ce partenariat privilégié, la Tunisie entend passer la vitesse supérieure et accéder à un nouveau palier d’intégration avec l’Europe à travers une dynamique de rapprochement. Sauf que ce statut de "partenaire privilégié", quand bien même il serait salué au plus haut niveau, ne fait pas pour autant l'unanimité.
Certains analystes rompus aux arcanes de la chose économique, issus de l'opposition et de la société civile n’ont pas manqué de tirer à boulets rouges sur ce partenariat qu’ils jugent « déséquilibré » et inéquitable, et qui pourrait conduire à la longue à un surendettement suicidaire. Achevant de mettre la Tunisie sous tutelle déguisée, loin du fameux concept de partenariat gagnant-gagnant ressassé à cor et à cri.
Les tenants de cette thèse pointent du doigt les difficultés économiques de la Tunisie et sa dépendance étouffante vis-à-vis d'un ensemble européen qui, derrière ces « générosités », dicterait en réalité un échange à sens unique et au seul bénéfice des principaux partenaires européens de la Tunisie (France, Allemagne, Italie). Ce qui risque à la longue d’aboutir à l’éternelle relation entre assistants et assistés. Cet alarmisme et cette peur sont-ils réellement justifiés dans l’état actuel des choses ? Attendons voir !
Oumar DIAGANA
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