La Tunisie perd 10% de croissance par an à cause des mauvaises pratiques commerciales

Lors des journées de l'entreprise version 2009, les organisateurs ont innové en proposant des études réalisées

par d'éminents universitaires tunisiens et ce pour chacun des cinq panels.

Après une présentation vidéo de chaque étude, les panélistes prennent la parole pour apporter leur point de vue sur la question.

Une étude réalisée par MM. Mohamed-Salah Redjeb et Lotfi Bouzaiene portant sur les pratiques commerciales et performance de l'entreprise en Tunisie propose des résultats intéressants quant au coût du déficit de qualité des pratiques commerciales.

Alors que l’attention de la littérature spécialisée se concentre généralement sur les grands équilibres (budget, paiements extérieurs, emploi, inflation, etc.), nos deux universitaires se sont plutôt intéressés sur le fonctionnement des marchés et des entreprises.

De ce fait, la performance n’est plus mesurée seulement par les résultats économiques. Elle
est évaluée aussi par les moyens, les conditions dans lesquelles fonctionne l’entreprise. La qualité des pratiques commerciales est l’un de ces éléments.

Après une présentation relative à la notion de pratiques commerciales, de son contenu et de ses enjeux pour la croissance, les deux universitaires se sont intéressés à une revue des indicateurs
internationaux sur le climat des affaires en relation avec les pratiques commerciales et l’état
des lieux qui y est établi pour la Tunisie (World economic forum, Heritage Foundation et Doing Business).

La dernière partie de l'étude a été consacrée à l’analyse des résultats d’une étude sur le terrain 
sur la base d’entretiens avec des entrepreneurs.

Si la revue des trois indicateurs internationaux  (World economic forum, Heritage Foundation et Doing Business) a permis de sortir un récapitulatif des points faibles propres à la Tunisie et qui tirent leur source du marché du travail (flexibilité des salaires, mauvaise éthique, rigidité de l'emploi et de la législation etc.), du marché financier (obtention de crédits etc.), mais aussi de la protection de l'investisseur et des lourdeurs administratives, un état des lieux des pratiques commerciales en Tunisie à partir d’une étude de terrain a été plus éloquent.

A la lumière de cette étude qualitative, Les points faibles en ce qui concerne les pratiques commerciales se situent  certes au niveau de l’abus de situation de dominance au sein de l'entreprise mais pas seulement.

En effet, les problèmes posés par les pratiques commerciales sont également liés aux clients (les retards de paiement, les impayés etc.) mais aussi, à la qualité du service du fournisseur, à la concurrence (la contrefaçon, pratiques d’obtention des marchés etc.) au peu de développement du circuit commercial et enfin aux restrictions et inefficience bancaires (réglementation du change, manque de clarté de la notion de paiements courants).

Quel est le coût du déficit de qualité des pratiques commerciales ?

En ce qui concerne la question sur l’impact sur les coûts de production, un potentiel de gains de productivité est calculé comme suit :

Les enquêtés ont déclaré des gains potentiels sur les coûts de production de leurs entreprises qui varient d’un secteur à un autre et d’une entreprise à une autre.

En moyenne, l’on peut retenir que le coût du déficit de qualité des pratiques commerciales représente 12,8% des coûts de production.

L’impact de cette économie sur les coûts de l’entreprise en termes de croissance économique générale dépend de plusieurs paramètres. On peut cependant présenter une estimation approximative.

On suppose à cet effet que la part de la valeur ajoutée des entreprises est de l’ordre de 35% de  leur chiffre d’affaires, que les entreprises concernées par les pratiques commerciales déficientes ont une part dans la valeur ajoutée totale de l’économie de l’ordre de 70% et que les surcoûts des pratiques commerciales sont à raison de 50% des transferts. On suppose que ces transferts sont perdus à raison de 20% pour les deux parties, le destinataire et l’émetteur.

Sur la base de ces hypothèses, on estime que l’amélioration de la qualité des pratiques commerciales pourrait se traduire par une augmentation du PIB d’environ 10,0%. Il s’agit d’une augmentation une fois pour toute qui fait passer l’économie à un palier de PIB plus élevé de 10,0%. 
C’est le gain maximum qui pourrait résulter d’une amélioration substantielle des pratiques commerciales. Un scénario d’amélioration abordable avec des réformes graduelles étalées sur le prochain plan pourrait se traduire par un gain de 5 points de croissance du PIB.

C’est le coût du déficit de qualité des pratiques commerciales. C’est l’équivalent d’une année de croissance économique.

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