L’accord de Kébili : des pertes colossales, mais qui va payer la facture ?
Un accord a été conclu samedi pour mettre fin aux protestations dans le gouvernorat de Kébili qui touchent particulièrement les champs pétroliers. Devrait-on pour autant s’en réjouir.
En attendant une reprise toujours possible du mouvement puisque cela a été le cas ces dernières semaines au cours desquelles les accords conclus ont fini par être désavoués par ceux-là mêmes qui les ont négocié, la communauté nationale doit connaître le cout de cette saute d’humeur des jeunes de la région qui n’ont trouvé mieux pour se faire entendre que d’arrêter la production du pétrole alors que le pays a tant besoin de devises et surtout d’argent pour boucler son budget 2017 en recourant à l’endettement toujours lourd à supporter outre qu’il hypothèque l’indépendance nationale.
Déjà en juin dernier, le ministère de l’Energie, des Mines et des Energies renouvelables a affirmé que le saccage des édifices pétroliers et gaziers, et des pipelines est de nature à provoquer des dégâts techniques, matériels et environnementaux qui seront supportés par l’Etat tunisien, étant propriétaire de cette infrastructure, importante et structurée, dont la préservation permet de développer l’activité de nombreux puits gaziers et pétroliers dans la région.
il est à rappeler que les sit-in ont débuté à Tataouine le 3 avril , puis se sont étendus à plusieurs régions de Kébili le 3 mai suivant ce qui a mis à mal la production dans un premier temps, puis en a provoqué l’arrêt total, souligne le communiqué dudit ministère paru, le 1er juin.
Le ministère affirme que l’arrêt de la production dans les deux gouvernorats a des répercussions directes sur l’économie nationale, et contribue à l’augmentation du déficit de la balance commerciale, avec un manque à gagner de 24 millions de dinars par semaine. En effet, Tataouine et Kébili contribuent à près de 46 % de la production nationale de pétrole et à 27 % de la production nationale de gaz.
Selon la ministre de l’énergie Hela Cheikhrouhou lors d'une récente émission Midi Show sur Mosaïque FM, le coût direct de l’arrêt de production de pétrole en raison des sit-in qui perturbent au point de paralyser la production de pétrole dans le sud-est du pays depuis quatre mois, s’élève à 200 millions de dinars. Sans tenir compte du ralentissement de certains projets importants dans la région comme le projet Nawara dont le coût s’élève à 2500 millions de dinars.
Ce dimanche le ministère affirme dans un communiqu , que si un accord a été conclu avec les sit-inneurs de Kalâa, de Douz et de Faouar, la production pétrolière ne reprendra pas avec le rythme habituel dans l’immédiat. Le ministère a expliqué qu’en plus d’avoir engendré des pertes matérielles colossales, la fermeture sauvage des vannes a causé des problèmes techniques surtout au niveau des puits les plus anciens baissant ainsi leur productivité.
A ce titre, Calvin Brackman, vice-président des relations extérieures et de la stratégie chez Serinus Energy, une entreprise pétrolière internationale basée à Calgary au Canada, opérant en Tunisie sous le nom de Winstar a affirmé dans une interview à Leaders qu’« en raison des nombreuses protestations sociales », cette société a dû arrêter sa production afin de garantir la sécurité de nos employés et de nos installations », ajoutant que « les multiples arrêts de la production ne font que nuire à la capacité de l'entreprise à investir et à créer plus d'emplois, et ne nous permettent pas de préserver les emplois actuels. L’arrêt de la production nuit au climat d'investissement pour l'exploration pétrolière et gazière dans le pays, car les entreprises se voient refuser leurs droits contractuels pour produire et obtenir un retour sur leurs investissements ».
Il a souhaité que « par le biais du dialogue, les manifestants et le gouvernement parviennent à une solution définitive et que tous les producteurs de la région puissent travailler de manière stable et durable. »
Ainsi des suites de ces arrêts à répétition le pays perd non seulement de l’argent frais (200 millions de dinars) et des dommages collatéraux que la communauté nationale doit payer pour remettre les gisements, les vannes et les oléoducs en marche (la facture semble colossale), mais aussi son crédit auprès des investisseurs dans ce domaine fort sensible. Mais qui doit payer ces factures ?
RBR
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