L’analyse éclairée de l’ancien chef de la diplomatie Mongi Hamdi sur la Tunisie, la Libye et la Syrie
Dans une interview accordée au journal la Presse et publiée dans son édition de ce lundi 06 janvier, le diplomate et ancien ministre des affaires étrangères Mongi Hamdi, livre son analyse sur la conjoncture nationale, régionale et internationale. Et adresse un message aux Tunisiens pour leur dire que la « Tunisie mérite beaucoup plus de nous tous. Les difficultés sont énormes et les défis sont très grands. Mais notre pays qui a connu plusieurs convulsions à travers sa longue histoire plusieurs fois millénaires a toujours su se relever. Et elle se relèvera grâce à ses compétences, femmes et hommes ».
Sur la situation en Libye qui se complique de jour en jour, notamment après l’offensive du Maréchal Khalifa Haftar sur Tripoli et la décision de la Turquie d’intervenir militairement au côté du gouvernement Sarraj, l’ancien chef de la diplomatie rappelle son initiative lancée en 2014 pour tenter de résoudre la crise libyenne et appelle la Tunisie qui est actuellement membre non permanent du Conseil de sécurité à présenter une résolution dans ce sens.
La Tunisie peut présenter un projet de résolution au Conseil de sécurité :
Il pense que « la Tunisie a les moyens d’agir en cette période précise. D’abord en restant à l’écart de tous les axes. Elle doit, par contre, faciliter le dialogue entre les partenaires libyens tout en évitant de soutenir une partie contre une autre et coordonner son action avec l’Algérie qui se trouve dans la même situation. La Tunisie, qui est actuellement membre du Conseil de sécurité depuis le 1er janvier 2020, peut présenter une résolution pour soutenir les efforts des Nations Unies et ressusciter l’initiative de pays voisins afin d’éviter toute intervention militaire étrangère. Elle peut également agir sur le plan arabe en sa qualité de présidente du dernier sommet organisé à Tunis en mars 2019 ».
Il a rappelé son initiative de 2014. « J’ai pris le dossier à bras le corps, a-t-il affirmé, en recevant les ambassadeurs des pays concernés directement ou indirectement par le conflit libyen : les cinq Grands, les pays voisins ( Algérie, Egypte, Soudan) et les autres( Turquie, Qatar, Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis, Maroc). A la suite de cela, j’ai pris l’initiative de réunir en Tunisie les ministres des affaires étagères de tous les pays voisins de la Libye, à savoir l’Algérie, l’Egypte, le Soudan, le Tchad et le Niger. Deux autres réunions ont été organisées au Caire et à Khartoum. Une quatrième réunion a eu lieu à New York en octobre 2014 en marge de l’Assemblée générale des Nations Unies. Nous avons convenu de la création de deux comités, politique et sécuritaire. J’avais alors lancé une initiative pour faciliter le dialogue inter libyen afin de barrer la route à toute intervention étrangère. J’ai écrit une lettre au secrétaire général des Nations Unies, Ban ki Moon à l’époque que je connais bien pour lui demander de nommer un envoyé spécial en Libye. Ce qui fut fait. Malheureusement, cette initiative n’a pas fait long feu après mon départ et le Maroc a pris la relève en parrainant sous l’égide des Nations Unies l’accord dit de Skhirat conclu en décembre 2015 ».
Je ne vois pas Hafter entrer sur un char à Tripoli :
Concernant l’offensive de Hafter, il exclue de voir le Maréchal « entrer sur un char de combat à Tripoli. Le coût serait très cher pour la population civile et pour lui également. Il sait qu’il n’a pas en face de lui une armée régulière, mais des milices armées. Et même s’il arrive à contrôler la capitale ou une partie de la capitale, il ne pourra pas stabiliser la situation. Il a mis plus de deux ans pour arriver à contrôler Benghazi. Je pense qu’il finira par négocier avec le gouvernement Sarraj ».
Il pense également qu’une intervention militaire turque parait « difficile, voire impossible. Déjà l’accord entre Erdogan et Sarraj a été fustigé par de nombreux pays dont l’Egypte voisin, l’Union européenne, la Grèce, Chypre, et critiqué par les Etats Unis et la Russie. Toute intervention militaire en Libye aura des conséquences incalculables sur la région. Avec le risque d’enlisement du conflit ».
Daesh est battu mais les « daeshiens » courent toujours
Pour ce qui est la Syrie, Hamdi souligne que même si « Daesh est battu en Syrie, les « daeshiens » courent toujours. Ils constituent une menace pour beaucoup de pays dont la Tunisie qui a fourni un contingent important de « jihadistes ». La rupture des relations diplomatiques avec la Syrie n’était pas opportune. Elle a compliqué les choses et les autorités tunisiennes se sont trouvées devant des difficiles énormes pour suivre de près la situation des membres de la colonie tunisienne, ainsi que celle des nombreux « jihadistes » tunisiens. C’est pourquoi, le gouvernement Jomaa dont je fais partie a décidé l’ouverture d’un consulat à Istanbul en juillet 2014 pour contrôler les jeunes tunisiens qui transitaient par la Turquie pour rejoindre les rangs des organisations terroristes ».
Clique sur le lien suivant pour lire l’interview : https://lapresse.tn/42977/mongi-hamdi-ancien-ministre-des-affaires-etrangeres-a-la-presse-la-tunisie-doit-presenter-un-projet-de-resolution-sur-le-conflit-libyen/
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