L’ingénierie et l’architecture planchent sur les énergies renouvelables et le logement social en Tunisie et en Libye
La Tunisie et la Libye disposent d’atouts considérables pour développer l’utilisation des énergies renouvelables dans le secteur du bâtiment et de la construction. Un secteur énergivore et cruellement exposé à une urbanisation galopante et anarchique. Les ingénieurs et les architectes des deux pays se sont penchés sur cette question.
L’intégration des énergies renouvelables dans le bâtiment et plus particulièrement dans les logements sociaux, est aujourd’hui, et plus que jamais auparavant, une priorité collective. L’épuisement des ressources extractives, la dépendance énergétique, les problèmes d’environnement dus au réchauffement climatique, la pollution provoquée par les hydrocarbures et tout ce qu’ils dégagent comme gaz à effet de Serre sont autant de raisons pour substituer les énergies renouvelables - dites propres - issues du vent, du soleil, de la mer et de la terre aux énergies fossiles polluantes.
C’est la problématique dont s’est accaparé, deux jours durant, le 3ème colloque tuniso-libyen organisé par l’Ordre des Ingénieurs Tunisiens en partenariat avec le Syndicat Libyen des Métiers d’Ingénieurs qui s’est tenu le 23 & 24 avril 2016 à Hammamet en présence d’experts architectes et ingénieurs, tunisiens, libyens et internationaux en matière d’énergies renouvelables. Ces derniers ont apporté leur discernement et donné leur argumentation quant à la nécessité voire l’urgence de devoir construire dorénavant des logements communautaires humains et responsables avec une conception écologique durable. Des habitations sociales à faible impact environnemental, c'est-à-dire avec une consommation énergétique maitrisée.
Les renouvelables au service du logement social et de la ville
Nos ressources énergétiques couvrent uniquement 59% de nos besoins, a affirmé Oussama Kheriji, Président de l’Ordre des Ingénieurs Tunisiens (OIT). L’alternative se trouve dans les énergies renouvelables, a-t-il dit en précisant que la construction, où le logement occupe la plus grande place en Tunisie, est le 3ème secteur consommateur d’énergie.
L’efficience énergétique doit être au centre de nos projets nouveaux. Elle doit devenir le « vecteur principal de notre mode de vie », a déclaré Aymen Zriba, Président du Conseil de l’Ordre des Architectes de Tunisie (OAT). Avec une architecture bioclimatique qui sollicite le solaire, l’éolien et le géothermique, nous pouvons construire des logements plus confortables, plus humains et moins gourmands en énergie. Des logements « durables et mieux réfléchis avec des matériaux recyclés qui s’accommodent intelligemment à l’environnement, au climat et à la culture du pays où ils sont édifiés », a recommandé Nikos Fintikakis, membre du Conseil de l’Union internationale des architectes.
« Nos cités souffrent d’infrastructures laides et de constructions ignobles et abusives mues par une urbanisation irrationnelle, sans fin et sans contrôle », a lâché Antonio Riverso, vice-président du programme ARES (Architecture et Energies Renouvelables), en appelant d’un ton optimiste à « devoir respecter l’espace naturel et la verdure ». Il faudrait construire des cités « à taille humaine, harmonieuses et connectées à l’environnement local ». Ces cités doivent être « évolutives et capables de se régénérer de manière durable », a ajouté Antonio Riverso en qualifiant « d’insoutenables et scandaleuses » les cités modernes qui se construisent - autour de Rome à titre d’exemple - en soulignant que c’est « l’ouverture de l’Architecture aux énergies renouvelables » qui nous permettra d’avoir des modèles urbains responsables et intelligents.
Par ailleurs, l’Etat doit favoriser des conditions incitatives pour la construction de foyers équipés en énergies propres. Il doit accorder des avantages financiers en mettant en place une réglementation qui encourage le financement de projets d’investissement fondés sur l’utilisation de ces énergies. La transition énergétique doit être accompagnée pour augmenter les sources d’énergies renouvelables et diminuer les sources d’énergie carbone. Un dispositif de soutien de ces énergies doit être mis en place. Pointées du doigt, l’urbanisation anarchique et les constructions sans autorisation doivent être lourdement sanctionnées par les autorités concernées.
Le point « eutectique » d’une coopération future
En clôturant ce colloque, l’Ordre des ingénieurs tunisiens et le Syndicat général des professions d’ingénierie en Libye ont signé un protocole de partenariat qui vise à développer des relations étroites et de nouvelles synergies entre les bureaux d’études d’architecture et les bureaux d’ingénierie dans les deux pays voisins.
Qualifié en marge de ce colloque de « point eutectique » par le Secrétaire Général de l’OIT, Abdessattar Hosni, ce partenariat tuniso-libyen devrait couvrir tous les domaines d’ingénierie et ouvrir la porte à une coopération dynamique, géographiquement plus étendue entre la Tunisie et tous les pays du Maghreb.
La volonté de développer des logements sociaux écologiques éclairés et chauffés par les énergies propres est ambitieusement affichée, certes, mais le chemin de la « régénérescence » de nos villes risque d’être long et fastidieux étant donné le coût exorbitant des renouvelables et les difficultés pour contrer sur le terrain cette urbanisation tout azimut regrettablement bien avancée.
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