Présidentielle: Ayachi Zammel, un héros malgré lui

Ayachi Zammel n’aurait jamais imaginé un jour se trouver dans cette situation complètement ubuesque et presque inextricable. Il était le premier à avoir déposé son dossier de candidature à l’élection présidentielle du 6 octobre 2024 et il était le premier dont la candidature a été validée par l’instance des élections qui lui a attribué le numéro Un. Mais depuis, les ennuis judiciaires ont commencé et  il est trimballé d’un poste de police à l’autre, si ce n’est d’un tribunal à l’autre dans la fourgonnette des prisons. Avec pour seul repas «  de l’eau et rien que de l’eau », selon son avocat Abdessatar Messaoudi. Inconnu du grand public, Ayachi s’est hissé au firmament et s’est fait un nom qui revient sur toutes les lèvres et  dans tous les médias tunisiens et étrangers, celui d’un héros, malgré lui.

Son incarcération, à laquelle il s’attendait n’a pas empêché  son équipe de mener campagne,  pour lui. Avec détermination.

Le cas Zammel n’est pas unique dans les annales des élections dans le monde. C’est le quatrième connu au cours des dernières années.

Il y a eu, en effet, un précédent similaire au Pérou, où le candidat Gregorio Santos du parti Démocratie directe a été placé en détention préventive pendant tout le processus électoral. Etant autorisé à participer à la campagne par téléphone, il a réussi à passer au 2ème tour. Il avait alors bénéficié de permission de sortie de dix heures lors du deuxième débat en 2016. Mais il a été battu.

Le second cas est celui de Nabil Karoui que les sondages donnaient favori lors de l’élection présidentielle anticipée de septembre 2019. Il fut arrêté le 23 août 2019 et placé en détention provisoire. Néanmoins, il fut autorisé à participer au premier tour de la présidentielle le 15 septembre mais empêché de quitter la prison pour faire campagne.

Il réussit à passer au second tour avec  15,58 % des suffrages,  derrière Kaïs Saïed (18,40 %). Il fut libéré quatre jours seulement avant le second tour et participe le 11 octobre à un débat télévisé face à son adversaire qui l'emporte avec 72 % des suffrages exprimés.

En mars 2024, l'opposant sénégalais Bassirou Diomaye Faye, arrêté en avril 2023, et placé en garde à vue pour « diffusion de fausse nouvelle, outrage à magistrat et diffamation envers un corps constitué » et libéré peu de temps avant le scrutin présidentiel auquel il s’est présenté, a été élu dès le premier tour.

Il prête serment le 2 avril 2024, et devient à 44 ans le plus jeune président de l'histoire du Sénégal ainsi que le premier officiellement polygame.

Mais qui est Ayachi Zammel ?

Ayachi est né le 16 août 1977 à Mansoura, dans la délégation de Kesra, gouvernorat de Siliana, au Nord-Ouest de la Tunisie. Il a fait ses études dans » l’école publique », comme il aime le répéter. Après avoir terminé  ses études primaires à Mansoura et ses études secondaires à Makthar, gouvernorat de Siliana, il s’inscrit à la faculté des Sciences de Tunis et à l’École nationale d’ingénieurs de Tunis où il obtient un diplôme d’ingénieur en chimie.  Il a poursuivi ses études à Paris, se spécialisant en ingénierie et en développement industriel.

Il rentre chez lui pour se lancer dans  le domaine de l’investissement et des affaires. Il a investi dans son village dans l’industrie agroalimentaire, où il a mis en place des unités de valorisation des produits agricoles, forestiers et biologiques. Il a également mis en place des relations commerciales avec plusieurs marchés internationaux à travers le monde.

 Zammel s’est engagé dans la vie politique à la fin de l’année 2019.  En octobre 2019, il a été élu député à l’Assemblée des représentants du peuple sous la bannière du parti «Tahya Tounes». Il a démissionné du parti et de son bloc en juin 2020, pour rejoindre le bloc national en tant que député indépendant en octobre 2020. Il a occupé le poste de président de la Commission de la santé et des affaires sociales durant la période de la pandémie de Covid-19, jusqu’à la dissolution du Parlement après le 25 juillet 2021. Il a également été membre de la Commission du développement régional, de la Commission de l’agriculture, de la sécurité alimentaire et du commerce, ainsi que de la Commission des affaires des Tunisiens à l’étranger.

Ayachi Zammel a fondé le mouvement «Azimoun» en juin 2022, mais a suspendu sa présidence du mouvement le 24 août dernier, après avoir présenté sa candidature à l’élection présidentielle, en s’appuyant sur les parrainages populaires.

Il est marié et père de deux enfants.

B.O