Quand l'Équipe nationale retrouve son public en...France

Quand l'Équipe nationale retrouve son public en...France

À Radès, les tribunes sonnent creux. À Lille, elles débordent de rouge et blanc. Il aura fallu un duel face au Brésil, à des milliers de kilomètres, pour que l’équipe nationale retrouve enfin la chaleur de son public. Un paradoxe qui en dit long sur l’état d’esprit du pays et sur le désamour grandissant envers ses propres symboles.

Ce soir à Lille, dans un stade vibrant et presque entièrement acquis à sa cause, l’équipe de Tunisie a retrouvé ce qui lui manque tant lorsqu’elle joue à domicile : un public. Face au quintuple champion du monde, le Brésil, les Aigles de Carthage ont livré une prestation étincelante, marquant les premiers grâce à Hazem Mastouri et ne cédant qu’à la suite d’un penalty pour le moins sévère, transformé par Estevão. Sans cette décision discutable, la Tunisie aurait même pu créer l’exploit. N’en déplaise aux Cassandres et aux sceptiques, elle a ébloui.

Mais cette belle soirée pose une question douloureuse : pourquoi faut-il que la Tunisie joue à l’étranger pour enfin être portée par une marée rouge ?

Des stades tunisiens vides, un symbole qui fait mal

Malgré un parcours impeccable en éliminatoires du Mondial 2026, l’équipe nationale ne parvient plus à mobiliser. À Radès comme ailleurs, les tribunes sonnent creux, les chants se font rares et les drapeaux disparaissent. Le contraste est saisissant : une sélection performante, mais un public absent.

Ce désengagement dépasse le simple football. Il reflète un rapport distendu entre les Tunisiens et leurs symboles, y compris le plus fédérateur d’entre eux : leur équipe nationale. Pendant des décennies, les Aigles de Carthage ont incarné la fierté collective, la revanche sportive de notre pays contre les géants du continent. Aujourd’hui, cette ferveur s’effrite.

Critiques injustes, climat pesant et désintérêt officiel

Les raisons sont multiples. Les critiques excessives, parfois violentes, qui tombent après chaque faux pas ont instauré un climat toxique autour de la sélection. Le politique, de son côté, n’affiche plus le même enthousiasme : pas de mobilisation, pas de communication forte, pas d’effort pour recréer un élan populaire.

Le public, déjà désabusé par les difficultés du quotidien, a fini par décrocher. L’équipe nationale vole désormais seule, sans l’énergie que seule une foule peut offrir.

Et pourtant : la Tunisie sait encore vibrer

Le match de Lille en est la preuve éclatante. À des milliers de kilomètres, les supporters tunisiens ont rempli le stade, chanté, agité les drapeaux, retrouvé cette étincelle que le pays semble avoir oubliée. La Tunisie a prouvé qu’elle n’a rien perdu de son talent… ni de son pouvoir de rassembler, dès que les conditions s’y prêtent.

Un miroir de l’état d’esprit national

Ce désintérêt intérieur pour l’équipe nationale dit quelque chose de profond sur la Tunisie actuelle : un rapport fragilisé à l’identité collective, une fatigue sociale, une perte de confiance dans les symboles. Le drapeau, l’hymne, l’équipe… tout ce qui unissait semble aujourd’hui lointain.

Mais le football a cette magie : il peut rallumer la flamme. Encore faut-il lui en donner la chance.

Brahim Oueslati

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