Quelles solutions budgétaires pour 2021 ?

 Quelles solutions budgétaires pour 2021 ?

Enfin, les querelles opposant le gouvernement à la Banque Centrale de Tunisie (BCT) à propos du financement du déficit budgétaire de l’exercice 2020 ont cessé. Une disposition de dernière minute a mis fin à un mois de dispute  entre deux institutions qui étaient sensées coordonner leurs efforts pour le bien du pays au lieu de se chamailler sur des problèmes sans substance ni contenu. 
Si l’on dépasse les querelles juridiques qui cachaient, à mon humble avis, des motifs politiques, d’autres solutions demeurent faciles à imaginer et à mettre en place. Et ce ne sont pas les compétences qui manquent pour ce faire.

Toutefois, le problème reste entièrement posé pour l’exercice 2021 qui démarre très bientôt. Le caractère plausible et raisonnable des estimations et des projections gouvernementales est  rudement mis en doute par un bon nombre d’experts avérés. A juste titre, le financement du budget pour ledit exercice ne semble pas du tout réaliste. Certains le qualifient, même, de budget à crédit.

En effet, pas moins de 19,5 milliards de dinars devraient être « dénichés» et empruntés pour assurer la bonne conduite des affaires budgétaires de l’Etat durant cet exercice. Si l’endettement intérieur parait être facilement mobilisable (2,9 milliards de dinars), la mobilisation de 16,6 milliards de dinars est largement hypothétique.
Ni les emprunts projetés  au soutien au budget de 6,3 milliards de dinars (provenant des partenaires financiers et bilatéraux) ni ceux à mobiliser  sur le marché international (10,3 milliards de dinars) ne semblent être accessibles au gouvernement tunisien.
Ces deux types d’emprunts sont tributaires d’un satisfecit émanant du FMI attestant de  (i) la rigueur  des estimations et des projections du gouvernement quant à la bonne tenue de l’économie nationale sur les années à venir (ii) l’engagement ferme et sans équivoque du gouvernement pour la mise en œuvre des réformes nécessaires au redressement de l’économie et des finances publiques du pays. Or, d’aucuns n’ignorent que les contacts sont rompus avec le FMI depuis un certain temps et il semble que la reprise de ces contacts n’est pas l’une des priorités du présent gouvernement.

Par ailleurs, la récente dégradation de la note souveraine de la Tunisie par les principales agences de notation à la note B avec perspectives négatives aggrave le risque  de l’incapacité du gouvernement à mobiliser les capitaux requis sur le marché international. Le contraire serait pénalisant pour le pays : les emprunts, à mobiliser sur ce marché, seraient rémunérés à des taux d’intérêt prohibitifs. Je pense, humblement, que ces taux seraient supérieurs à 10%.

Que faire alors ?

A mon humble avis, continuer sur ce rythme effréné de l’endettement public à outrance n’est ni intelligent, ni réaliste, ni soutenable, ni populaire. Hypothéquer l’avenir des générations futures n’est pas, non plus, un choix sur lequel il faut persister.

Le plan suivant pourrait être perçu comme un début de solutions aux difficultés des finances publiques :
a-  il faudrait s’atteler, en toute urgence, à concocter un nouveau programme sérieux et réaliste cumulant des mesures de relance économique et de réformes financières, économiques et sociales et engager, sans délai, des négociations avec le FMI pour sa mise en œuvre. La condition sine qua non pour la réussite de ce programme est la nécessité de réunir, pour sa conception et sa défense, des compétences économiques et financières avérées qui manquent cruellement à ce gouvernement.
b-   il faudrait convaincre les partenaires financiers du pays du report du principal de la dette publique extérieure pour trois ou quatre exercices tout en continuant à payer les intérêts y afférents.  Pas moins de 6,5 milliards de dinars pourraient être reportés soit environ 5,7% du PIB.
Ce report est devenu réalisable et réaliste compte tenu de l’accord conclu lors de la dernière réunion du G20 qui s’est tenue en Arabie Saoudite, où les pays les plus riches ont convenu de plusieurs mesures d’aides au pays pauvres dont notamment le report de leurs dettes. Je pense que la Tunisie doit, impérativement, saisir cette opportunité pour s’alléger un tant soit peu du fardeau pesant de la dette extérieure.
c- il faudrait procéder à une augmentation conséquente du budget d’investissement actuellement de 4,3 milliards de dinars en vue de booster la croissance, eu égard à la faible participation du secteur privé dans l’effort national d’investissement. J’estime qu’un accroissement se situant entre 1,5 et 2 milliards de dinars serait d’un grand secours à l’économie et aux entreprises tunisiennes.
d- il faudrait, enfin, mettre à contribution la diplomatie économique pour solliciter la garantie américaine facilitant une éventuelle sortie sur le marché international pour la mobilisation de capitaux étrangers. L’élection de Jo Biden, vice-président de Barak Obama en 2011,  pourrait nous être d’un grand bénéfice.

Ce qui précède n’étant que des ébauches de propositions de sortie de crise de court terme, Le pays ne s’en sortira réellement et effectivement que si de véritables réformes économiques, institutionnelles et sociales sont mises en œuvre pour assurer la croissance et le développement durables.

 Houssem Eddine TAABOURI
(Membre du Conseil des Analyses Economiques)

 

 

 

 

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