Tourisme-cri de détresse : 98% des hôtels fermés à Tozeur et ce n’est pas mieux dans la zone Aïn Drahem-Tabarka

 Tourisme-cri de détresse : 98% des hôtels fermés à Tozeur et ce n’est pas mieux dans la zone Aïn Drahem-Tabarka

 

Le secteur touristique vit actuellement une crise sans précédent en rapport avec la covid-19 et les mesures prises qui n’ont fait qu’aggraver une situation déjà difficile.

Le tourisme local a été particulièrement impacté comme l’atteste la grave récession dans la zone Tozeur-Kébili, ce qui a eu de terribles incidences sur les travailleurs et l’ensemble des intervenants dans le secteur dont les agences de voyages, les artisans et les autres métiers.

Zone Tozeur-Kébili : de mal en pis

Dans ce cadre, Adel Dhouibi membre de la Fédération régionale du tourisme de Tozeur affiliée à la Fédération tunisienne de l’Hôtellerie (FTH) a souligné que la situation n’est pas seulement alarmante, mais qu’elle va de mal en pis. Il a ajouté que le tourisme saharien est une activité saisonnière qui permet d’animer la région dans des proportions acceptables et offre aux professionnels la possibilité de réaliser des résultats au diapason de leurs obligations.

Après la révolution, et avant même l’apparition du coronavirus, on a enregistré jusqu’à 50% d’établissements hôteliers fermés, a-t-il ajouté en indiquant qu’avec la pandémie, cette proportion a atteint les 98%.

Depuis décembre 2019, le secteur est quasiment à l’arrêt, et même les 2% encore ouverts, ils ne fonctionnent que de façon limitée. Un secteur quasiment à l’arrêt Et Adel Dhouibi d’ajouter : « Lorsqu’on évoque le tourisme, l’on ne parle pas seulement des unités touristiques qui en forment l’ossature, mais aussi des agences de voyage, du secteur de l’artisanat ainsi que d’autres secteurs qui ont un rapport direct ou indirect avec le tourisme.

Aujourd’hui notre secteur est sinistré, puisque sa locomotive est paralysée. Les autres composantes souffrent autant et sont également impactées. Si pour les unités hôtelières installées sur le littoral, les conditions spécifiques et la nature permettent aux jeunes travailleurs de se rabattre sur d’autres métiers leur offrant le minimum requis même à titre temporaire, il n’en est pas de même pour les jeunes des régions du sud et de l’intérieur du pays qui n’ont pas des ressources de remplacement.

Ainsi alors que la saison estivale booste le tourisme, les voyages et l’artisanat dans les autres régions, elle constitue la saison morte dans les zones du sud en raison des conditions météorologiques extrêmes.

Nous attendons l’hiver pour que le tourisme connaisse son dynamisme, mais il n’en est rien cette année, puisque tout le secteur est paralysé, y compris le commissariat régional du tourisme qui est quasiment à l’arrêt faute d’activités, ajoute Adel Dhouibi.

6000 emplois’’disparus’’

Notre interlocuteur a conclu : « Nous ne nous exprimons pas et nous ne proclamons pas nos revendications par des protestations, par le blocage des routes ou d’autres, bien que notre secteur compte 6000 emplois directs sont actuellement considérés comme ’’disparus’’, sans compter les emplois indirects en rapport avec l’état du secteur. En attendant que la conjoncture change, nous demandons au gouvernement de consacrer dans l’immédiat des aides matérielles directes aux travailleurs du secteur (au moins 200 dinars par mois) pour alléger les effets du chômage et leur accorder le minimum vital. Pour nous les professionnels, des négociations sont en cours avec l’UGTT, le gouvernement et les banques en vue de parvenir à des solutions radicales à nos problèmes qui vont se situer dans le cadre de la somme dont nous avons appris qu’elle sera allouée pour soutenir le secteur touristique dans son ensemble (500 millions de dinars, parait-il) et lui permettre de surmonter l’épreuve et ses difficultés aigues. Nous espérons en être une partie-prenante, car nous sommes une composante effective du secteur. Notre situation aujourd’hui est effrayante et difficile et les mots ne peuvent décrire ce qu’il en est réellement. Je le résume dans une phrase qui veut tout dire : si la situation dans les zones côtières est difficile et étouffante, elle est dans les zones de l’intérieur (ici à Tozeur et à Kébili particulièrement) elle est irrespirable, mortelle et annonciatrice d’une catastrophe imminente ».

La zone Tabarka-Aïn Drahem impactée

A l’instar d’autres régions de l’intérieur, le secteur touristique dans la zone Tabarka-Aïn Drahem est impacté par la crise sanitaire. Cette région attire particulièrement les touristes de l’Algérie voisine ainsi que des touristes européens qui choisissent d’y passer les fêtes de fin d’année ou s’adonner à la chasse au sanglier.

Nabil Ben Abdallah, représentant de la FTH dans la zone du nord-ouest (en attendant l’élection d’une fédération régionale qui n’a pas eu lieu en raison des circonstances que traverse le pays) a souligné que toutes les unités touristiques sont dans une situation critique. Une exception, seulement à savoir l’unité appartenant à un état du Golfe qui emploie 360 personnes qui n’ont pas à souffrir des conditions économiques et sanitaires du pays et qui reçoivent leurs salaires de façon régulière, du fait que ses propriétaires la soutiennent de manière continue.

Notre interlocuteur n’a pas nié que le secteur connait une certaine animation au cours de la dernière période, indiquant que l’activité est stagnante dans la plupart des unités touristiques mais cela n’a pas empêché des clients de s’y trouver au cours des week-ends mais cela n’est pas suffisant au vu de ce que les professionnels doivent payer comme cotisations sociales, impôts, salaires et règlements des factures d’eau et d’électricité et remboursement de prêts et autres dettes et dépenses. Devant cette situation difficile la plupart des professionnels ont été contraints de fermer leurs unités touristiques et on ne sait pas si cela est de façon permanente ou temporaire. Beaucoup de Tunisiens en ont assez de la situation qui commence à leur peser et ont décidé de rompre certaines procédures pour se rendre aux hôtels afin d’y passer le week-end au moins étant entendu que les professionnels adhèrent au protocole sanitaire à 100%. D’ailleurs si des clients viennent pour la fin de semaine, il n’y a presque personne au cours des autres jours. »

Qu’en est-il des fêtes de fin d’année ?

Nabil Ben Abdallah ajoute : « Par nos amis en France, on a appris que les Français ne sont pas soumis au couvre-feu comme chez nous et qu’ils coexistent avec le confinement. Leur étant leur a permis de se déplacer pour les fêtes de fin d’année (Noël et le Jour de l’an) que certains ont pris l’habitude de les passer chez nous. Nous avons d’ailleurs reçu par le courrier électronique des demandes de réservation mais nous ne savons, tout simplement pas si nous devons les accepter ou les refuser étant donné l’étrange ambiguïté des décisions de notre gouvernement. Ainsi nous n’avons pas compris la poursuite du couvre-feu jusqu’au 30 décembre ? Allons-nous revenir à une vie normale après cette date ? Et si c’est le cas, pourrions-nous accueillir les touristes européens pour la fête de fin de l’année. Du reste nous n’avons pas répondu à leurs demandons et nous ne savons pas s’ils vont venir ou pas. Franchement, la situation est autant difficile que déconcertante. Les professionnels rencontrent de grandes difficultés, pas seulement ici mais dans toutes les régions du pays.

La pire période depuis l’indépendance. Que faire ?

Nabil Ben Abdallah a conclu en nous déclarant : « Le secteur touristique de façon générale vit sa pire période depuis l’indépendance. La pandémie n’a fait qu’aggraver la situation et les professionnels sont dans le désarroi, car nombre d’entre eux ne savent pas s’ils vont continuer leurs activités lorsque la situation revient à la normale, ou s’ils vont fermer les portes de leurs unités et s’adonner à autre chose. Ce qui provoque le malaise, c’est que l’Etat n’a pas mis en place une stratégie claire pour sauver le secteur considéré comme vital puisqu’il contribue par une part importante dans l’économie nationale et emploie des milliers de personnes de façon directe ou indirecte. Par sa stagnation, de nombreux secteurs risquent de dépérir. La politique autant conjoncturelle que sur le long terme est ambigüe et nous ne savons ce qui va advenir demain que dire de ce qui risque d’arriver dans plusieurs mois. Nous ne demandons pas l’impossible et nos problèmes sont semblables dans la plupart des régions. On demande à l’Etat qu’il soit à nos côtés au cours de la période actuelle et qu’il nous aide à surmonter la crise globale que nous traversons, en espérant que ce secteur important reprendra de sitôt ses activités, un secteur vital qui contribue de façon notable à l’emploi, suppléant à l’incapacité de l’Etat d’offrir des emplois particulièrement dans les circonstances actuelles ».

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