Tunisie: Les touristes algériens boudent-ils notre pays?

1,100.000 de touristes Algériens ont visité la Tunisie depuis le début de l’année 2018 jusqu’à la fin du mois de juillet. Ce chiffre est très important certes, car il place les Algériens en tête des touristes étrangers qui ont visité notre pays. Mais il demeure très en dessous des prévisions qui tablaient sur une affluence record des touristes de ce pays pendant cette année 2018 avec 3 millions attendus.

Tendance à la baisse

Et à ce rythme la réalisation de cet objectif parait chimérique, surtout avec l’apparition de certains indices qui confirment la diminution du flux des Algériens en Tunisie pour diverses raisons.

Selon une source fiable au sein de la FTAV, le nombre de touristes venant de ce pays frère a baissé de 7% durant le mois de juillet 2018 par rapport à juillet 2017 et cette diminution risque de dépasser les 20% lors du mois d’août par rapport au même mois de l’année dernière.

Les raisons de cette triste tendance à la baisse sont nombreuses. Certaines sont extérieures à notre volonté, alors que d’autres sont dues à des erreurs de gestion du dossier de l’accueil réservé aux touristes Algériens dans notre pays.

Pour ce qui est des raisons extérieures à notre volonté qui ont imposé la diminution de la venue des Algériens pendant cet été en Tunisie, et qui malheureusement n’ont pas été prises en compte par ceux qui ont tablé sur ce chiffre record de 3 millions, on peut citer la durée très limitée des vacances estivales des familles algériennes cette année.

Des vacances qui n’ont commencé qu’après le Bac et qui prendront fin juste quelques jours avant l’Aïd el Kebir prévue le mardi 21 août, c’est-à-dire que leur durée est de moins d’un mois cette année. Ce qui influencera négativement sur le nombre de touristes algériens qui viendront en Tunisie et sur le nombre de nuitées qu’ils passeront dans nos hôtels durant la saison estivale.

La deuxième raison qui a fait que bon nombre de touristes de ce pays Frère ne seraient plus emballés à l’idée de venir chez nous pour passer leurs vacances d’été, est certainement due à cette campagne injustifiée lancée par certains médias Algériens malintentionnés visant à salir la destination Tunisie.

Campagne malintentionnée  

Bien que le Syndicat national des agences de voyages Algériens (SNAV) ait dénoncé à maintes reprises l’acharnement de certains médias Algériens contre la destination Tunisie, qu’il a qualifié de campagne «insidieuse, inexplicable et honteuse» et bien que son président Said Boukhelifa ait déclaré que la Tunisie est une : «terre hospitalière vis-à-vis des Algériens, qui sont toujours bien accueillis dans la rue et dans les hôtels tunisiens», cette campagne, encouragée certainement par des pays concurrents de la Tunisie, a eu des effets très négatifs.

En effet, à force de matraquage continue, cette campagne a réussi à faire croire à certains Algériens qu’ils sont des « persona non grata » dans notre pays, où ils risquent de faire face à l’attitude hostile des hôteliers qui leur préfèrent les touristes européens, dont les séjours sont plus organisés et réservés depuis des mois par les Tour-opérateurs.   

Bien que ces accusations soient généralement dénuées de tout fondement puisque les Algériens sont toujours les bienvenus chez nous, il faut reconnaitre qu’il y a parfois eu quelques dépassements de la part de certains hôteliers tunisiens, qui ont fortement servi les intérêts de ceux qui se cachent derrière cette campagne malintentionnée visant la destination Tunisie.

La vidéo des agents de sécurité d’un hôtel de Hammamet contraignant les femmes algériennes en Burkini à quitter la piscine et la déclaration d’une responsable de la Fédération Tunisienne du l’Hôtellerie qui a insisté qu’il est du droit des hôteliers d’interdire aux femmes portant ce genre de tenue de se baigner en piscine ont été, à titre d’exemple, très relayés sur les réseaux sociaux en Algérie, mettant de la sorte de l’huile sur le feu dans le cadre de cette campagne hostile.

Ce qui a certainement découragé de nombreuses familles algériennes à venir passer leurs vacances dans les hôtels tunisiens, surtout celles qui comportent des femmes voilées qu’on a fait fuir au lieu de les séduire par des produits et des offres adaptées à leurs besoins, comme le font nos concurrents.

Concurrence ardue des autres destinations

A cela s’ajoutent d’autres raisons qui sont aussi pour quelque chose dans cette tiédeur dans l’affluence des Algériens vers notre pays comme l’augmentation des tarifs des hôtels tunisiens, la cherté de la vie, la dépréciation du dinar tunisien, et surtout l’insécurité dans les régions frontalières, suite à l’attentat terroriste, du dimanche 8 juillet dans le post- frontalier de Ghardimaou, qui a coûté la vie à 9 braves agents de la garde nationale.

Autre argument avancé par les professionnels du tourisme Algériens pour expliquer cette baisse, la concurrence des autres destinations comme la Turquie, l’Italie, l’Espagne ou même le Maroc et l’Egypte qui ont tout fait pour séduire nos voisins avec des prix attractifs des offres adaptées à leurs besoins et même des avions charters affrétés pour assurer leur voyage dans d’excellentes conditions.

D’ailleurs selon nombreux professionnels algériens, un voyage d’une semaine à Charm Echeikh, en Egypte, dans un hôtel 4 étoiles en formule All-Inclusive et incluant le billet d’avion est proposé à 800 dinars tunisiens.

Un tarif introuvable, selon eux, en Tunisie pour les mêmes prestations.  

Une stratégie de reconquête s’impose

Cette grave tournure des événements impose au ministère du Tourisme Tunisien et aux professionnels d’accorder au plus vite l’importance nécessaire au dossier du marché algérien afin de trouver les solutions adéquates pour ne pas le perdre.

L’« Eductour » organisé à partir de ce jeudi pour des représentants d’agences de voyages algériennes et des journalistes afin d’inspecter et de juger de la qualité des services présentés à nos frères algériens, que ce soit dans les hôtels, les restaurants, les aéroports ou même dans les posts frontaliers est certes une bonne initiative. Mais elle est insuffisante et très tardive pour inverser la tendance durant cette saison estivale.

Une stratégie globale de reconquête et de séduction doit être mise en place dans les plus brefs délais pour permettre à la destination Tunisie de reprendre sa vraie place dans le cœur de nos frères algériens.

Kais Ben Mrad