Bilel Sahnoun (PDG de la Bourse): "La faiblesse du volume des échanges et des transactions est inquiétante"

L’état actuel de la Bourse, les prévisions pour l’année 2020 et les nouvelles introductions en Bourse...tels sont les principaux points abordés par Bilel Sahnoun, le PDG de la Bourse de Tunis, lors de cette interview exclusive qu'il a accordée à Espace Manager.

Espace Manager : Quel est l’état actuel de la Bourse de Tunis et comment s’annonce l’année 2020 ?

Bilel Sahnoun : Il y a toujours des baisses et des hausses à la Bourse, mais depuis le début de cette année, l’indice boursier fait presque du surplace. D’ailleurs, la partie qui m’inquiète le plus c’est la faiblesse du volume d’échanges et des transactions depuis le début de l’année. En fait, jusqu’à la date d’aujourd’hui, la baisse est de l’ordre de 35% par rapport à la même période de l’année dernière.  

Comment expliquez-vous cette baisse ?

Trois facteurs sont derrière cette baisse. Le premier est l’absence de nouvelles introductions. En effet, sur les trois dernières années on n’a connu qu’une seule introduction alors que nous avons besoin toujours de nouvelles introductions en Bourse pour attirer les investisseurs et redynamiser le marché, sinon il n’y aura pas d’éléments attractifs pour l’investisseur.   
Le deuxième facteur est qu’aujourd’hui, la surenchère sur les taux de placements monétaires fait qu’il n’y a pas mal d’arbitrage en faveur des placements bancaires par rapport au marché financier. De plus, les gens qui disposent de l’argent préfèrent placer leurs fonds dans les banques et bénéficier des garanties du système bancaire au lieu d’investir dans la Bourse qui est un investissement stratégique et à long terme.

Le troisième et dernier facteur ne concerne pas seulement le marché boursier mais plutôt toute l’activité économique du pays et il est en rapport avec cette période de transition politique et d’attente. Il faut qu’il y ait un gouvernement, une vision et des actions pour le redressement économique du pays sinon les investisseurs ne seront pas attirés.

De façon générale, nous sommes dans une période de stand-by et d’attentisme. Quelle sera la couleur politique que nous allons donner aux orientations économiques ?

Nombre de personnes pensent que la crise actuelle dans le pays est purement politique, partagez-vous le constat ?

Oui la crise est tout d’abord politique. Il s’agit d’une crise socio-économique, mais dont l’origine est politique. Il est très clair aujourd’hui qu’on ne peut pas relancer notre économie en l'absence de réformes et de mesures permettant le redressement politique.

Tout en se basant sur les indices boursiers actuels, est ce qu’on peut parler d’une amélioration d’ici la fin de l’année ?

L’amélioration est d’avenir mais elle sera claire à partir du moment où le gouvernement s’installe et les principales mesures structurantes à court ou à long termes seront d’ordre économique. C’est à partir de ce moment seulement, qu’il y aura obligatoirement une relance au niveau de l’investissement en Bourse et sur l’économie en général.    

Au niveau de la Bourse, il y a aujourd’hui certaines actions qui ont été menées mais qui n’ont pas encore donné leurs fruits. On a restructuré le marché alternatif de la Bourse et on a allégé l’accès des entreprises au marché alternatif et on l’a dédiée exclusivement à la levée de fonds pour le développement des entreprises. Ajoutons à cela, la loi de finances 2020 qui a apporté des incitations fiscales de grande importance au marché alternatif.   

Quant au marché alternatif, cela pourrait être un moyen rapide de relance de l’activité boursière.

D’autres actions sont prévues au niveau de la réglementation de change. La Banque centrale de Tunisie (BCT) a évoqué la possibilité de mettre en place des mesures qui concernent la réglementation de change. Une réglementation révisée et libéralisée pourrait inciter les investisseurs étrangers à s’intéresser à notre marché.

Il y aura de nouvelles introductions en Bourse !

Il y aura « assurances Maghrebia » c’est la première société à s’introduire pour l’exercice 2020. J’espère que cela se fera au cours du premier semestre de cette année. D’autres dossiers d’introduction en Bourse sont en phase d’étude chez les intermédiaires en Bourse mais qui ne sont pas publiquement annoncées. J’espère que ces nouvelles introductions auront lieu au second trimestre 2020.

Cette année connaitra entre 3 et 5 introductions sur le marché principal de la Bourse dans le secteur de l’assurance, du tourisme et de l’industrie.  

Propos recueillis par B.R.