Ennahdha a-t-il coupé le cordon avec les frères musulmans ? Explications d’une spécialiste de l’idéologie islamiste
Anne-Clémentine Larroque, spécialiste de l’idéologie islamiste a dans une interview accordée à Jeune Afrique, explqiué la mue du mouvement Ennahdha. Maîtresse de conférences à Sciences Po Paris, chercheuse associée au Centre d’études et de documentation économiques, juridiques et sociales (Cedej), au Caire, elle est l’auteur de L’Islamisme au pouvoir : Tunisie, Égypte, Maroc (2011-2017) (Puf, 2018), elle pense que le mouvement de Rached Ghannouchi « n’a pas coupé avec ses racines et l'influence des Frères musulmans ».
Explications : Ennahdha comme tous les partis islamistes « partagent tous un ADN idéologique » avec les Frères musulmans. « Nous assistons à un moment de transition, et le gros défi reste la manière de conserver le nouvel électorat plus large qu’ils sont en train d’acquérir, tout en gardant une matrice religieuse. On ne peut pas dire que le cordon soit totalement coupé. Il reste quelque chose de l’ordre de l’identité. Ce genre de confrérie vous touche à vie. Malgré les étapes d’autonomisation et les mues. »
Pourtant, ses cadres « préfèrent ne pas présenter le parti comme tel, mais je considère qu’ils se sont appuyés sur une base islamiste et salafiste dès les élections de 2012. Le fait qu’ils doivent se positionner en 2013 contre les jihadistes armés d’Ansar al-Charia (AST) a entraîné une désertion de leurs bases salafistes. Je considère qu’ils sont en train de s’habituer à cela et à comprendre que les modalités d’action de la démocratie ne peuvent pas s’accompagner d’un dogmatisme trop fort. C’est la grosse différence avec les salafistes jihadistes, qui restent attachés à l’idée d’absolu ».
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